14ème législature

Question N° 30664
de M. Thierry Mariani (Union pour un Mouvement Populaire - Français établis hors de France )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > système pénitentiaire

Tête d'analyse > établissements

Analyse > capacités d'accueil. perspectives.

Question publiée au JO le : 25/06/2013 page : 6606
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9889
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 22/04/2014
Date de renouvellement: 11/11/2014

Texte de la question

M. Thierry Mariani attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le nombre de détenus dans les prisons françaises. D'après les statistiques de l'administration pénitentiaire, publiées le 17 juin 2013, le nombre de personnes incarcérées atteint un nouveau record. Ce chiffre est d'autant plus inquiétant que l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) constate que la délinquance générale a fortement progressé depuis un an. Aujourd'hui, faute de place en milieu carcéral, des dizaines de milliers de peines de prison restent impunies. Il souhaiterait donc savoir si le Gouvernement entend poursuivre une politique laxiste en matière de justice alors même que les indicateurs sont préoccupants.

Texte de la réponse

La politique pénale menée durant ces dix dernières années a privilégié le recours à l'incarcération pour toute réponse pénale. Entre 2000 et 2011, le nombre de condamnations à une peine privative de liberté est passé de 284 182 à 288 152. Parmi les peines privatives de liberté, la part des peines totalement fermes s'est accrue (de 27,4 % à 30,3 % de l'ensemble entre 2000 et 2011). Par ailleurs, depuis de nombreuses années, une augmentation de la population carcérale est constatée : au 1er janvier 2002, la France comptait 48 594 personnes détenues écrouées, 58 402 au 1er janvier 2007 et 62 252 au 1er janvier 2009. Cette politique n'a pourtant pas permis que la sécurité de nos concitoyens soit mieux assurée. Elle n'a en outre fait qu'accroitre la surpopulation carcérale, entraînant des conditions de travail difficiles pour les personnels, des conditions de détention indignes pour les personnes incarcérées et réduisant ainsi les possibilités d'insertion ou de réinsertion des personnes condamnées. Dès 2012, face au constat, le ministère a axé sa politique pénitentiaire autour de trois objectifs : la rénovation et l'extension du parc immobilier, la prévention de la récidive par la réinsertion des personnes condamnées et la sécurité en détention, avec comme priorité, la dignité et la sécurité des personnels de l'administration pénitentiaire et des personne détenues. A été signé le 14 mai 2013 le protocole « Personnels de surveillance ». Ce document est le fruit de négociations engagées par la ministre en décembre 2012 entre la direction de l'administration pénitentiaire (DAP) et les organisations syndicales, qui ont participé à l'ensemble des travaux jusqu'à fin février 2013. L'objectif de ce protocole est la refonte du statut des personnels de surveillance (corps d'encadrement et d'application) qui date de 2006. Il vise à revaloriser le métier du surveillant, en développant, notamment, les parcours de carrière par le biais des formations continues en recherchant de meilleures articulations entre organisation du travail et contenu des missions, et en mesurant leur incidence sur la santé et l'équilibre social des agents. De plus, en accord avec les axes de la politique pénitentiaire actuelle, le protocole prévoit l'évaluation des conditions de travail des personnels afin d'améliorer le dispositif de prévention en matière de santé et sécurité au travail et une revalorisation indiciaire du corps d'encadrement et d'application : 17 millions d'euros seront ainsi alloués dans le cadre du budget triennal 2013-2015 à la revalorisation de la grille, mais également à la promotion de nombreux surveillants au grade de surveillants brigadiers. La surpopulation carcérale évoquée est un problème qui a également été pris en compte par la garde des sceaux, ministre de la justice. C'est la raison pour laquelle elle a doté le ministère de la justice d'un programme immobilier ambitieux. Sur la période 2012 à 2018, il est prévu la création de 6500 places de détention nettes et la rénovation de sites pénitentiaires dont l'état de vétusté est incompatible avec la dignité des personnes détenues et un cadre décent de travail pour les personnels : ainsi les rénovations de la MA Fleury Mérogis, de la MA La Santé et du CP des Baumettes sont elle en cours. En lien avec l'agence publique pour l'immobilier de la justice, est engagée une réflexion globale sur la conception des nouveaux établissements afin de centrer leur construction sur les personnes qui y travaillent, y vivent et y interviennent. Le conseil national de l'exécution de la peine installé par la garde des sceaux le 29 janvier 2014, constitué notamment de membres éminents de la société civile (universitaires, chercheurs, psychiatre, architecte...) et de parlementaires (présidents des commissions des lois), s'emparera également de cette question pour venir enrichir les travaux en cours. Mais la politique pénitentiaire de la ministre ne se limite pas aux projets immobiliers. La résorption de la population carcérale passe également par une politique pénale plus intelligente. Ainsi, la loi relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénale, adoptée le 15 août 2014, aura des effets positifs sur la surpopulation carcérale. En effet, s'inspirant du Rapport d'information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale, présenté par MM. les députés D. Raimbourg et S. Huygues en janvier de l'année dernière, la réforme contient la suppression des mécanismes automatiques (et notamment des peines planchers) afin d'assurer une meilleure individualisation des peines ainsi que la possibilité de prononcer une libération sous contrainte afin de lutter contre les sorties sèches et d'inscrire les personnes condamnées dans un processus d'insertion ou de réinsertion et, donc, de prévention de la récidive. La loi prévoit également, à la suite du souhait formulé dans le rapport parlementaire de « faire véritablement de l'emprisonnement le dernier recours en matière correctionnelle », une nouvelle peine, la contrainte pénale qui a vocation à être prononcée en lieu et place des courtes peines d'emprisonnement. Enfin, si les établissements pénitentiaires présentent un bon niveau de sécurité, au regard notamment du faible nombre d'évasions constatées en France, de récents incidents ainsi que l'insécurité juridique liée à l'application de l'article 57 de la loi pénitentiaire relatif aux fouilles ont démontré la nécessité d'un plan d'action annoncé le 3 juin 2013 par la garde des sceaux pour un montant global de 33 millions d'euros en vue de l'amélioration des dispositifs de sécurité. Ce plan de sécurisation s'appuie sur trois piliers : des moyens matériels supplémentaires, des pratiques retravaillées et une meilleure prise en charge globale de la personne détenue. Une intensification des contrôles, notamment aux abords des établissements pénitentiaires, un renforcement du renseignement pénitentiaire, ainsi qu'une réflexion autour de la formation des personnels seront institués, ceci afin de replacer l'humain au coeur du système pénitentiaire.