14ème législature

Question N° 30806
de M. Gilles Lurton (Union pour un Mouvement Populaire - Ille-et-Vilaine )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > chasse et pêche

Tête d'analyse > chasse

Analyse > oiseaux migrateurs. dates d'ouverture.

Question publiée au JO le : 02/07/2013 page : 6807
Réponse publiée au JO le : 23/12/2014 page : 10704
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Gilles Lurton appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les revendications des chasseurs français, notamment concernant le rétablissement en février de la chasse des oies et la levée des moratoires pour cinq années des espèces suivantes : courlis cendré, eider à duvet, barge à queue noire, vanneau huppé, sur l'ensemble du territoire. Selon la Fédération nationale des chasseurs, les dispositions qui ont conduit à l'adoption des moratoires n'ont aucune base ou justification scientifique. En effet, l'État s'était engagé à faire pratiquer des études scientifiques sur l'état de ces espèces dans les cinq années de validité de cette mesure. Or aucune étude n'a été réalisée durant cette période et aucune nouvelle donnée ne vient confirmer ou infirmer la nécessité de maintenir ces dispositifs qui pénalisent les chasseurs de gibier d'eau. Dans le département d'Ille-et-Vilaine, ces espèces sont chassées plus particulièrement en baie du mont Saint-Michel et en estuaire de la Rance. Les prélèvements opérés sur ces zones par les chasseurs sont infimes par rapport aux stationnements observés en périodes hivernales ou au regard de la population. Les chasseurs ne comprennent plus ces décisions et sont de plus en plus inquiets pour la pérennité de leur activité traditionnelle essentielle à la vie de nos territoires ruraux. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer les réponses qu'elle entend apporter aux demandes des chasseurs.

Texte de la réponse

Pris en application des dispositions de la directive « oiseaux » transposée en droit français, notamment par l'article L. 424-2 du code de l'environnement relatif au temps de chasse, l'arrêt du Conseil d'État en date du 23 décembre 2011 enjoint au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie de fixer une date de clôture de la chasse aux oies cendrées, aux oies rieuses et aux oies des moissons qui ne soit pas postérieure au 31 janvier. Un arrêté ministériel en date du 12 janvier 2012 et publié au Journal Officiel le 31 janvier 2012, modifie l'arrêté du 19 janvier 2009 relatif aux dates de fermeture de la chasse des oiseaux de passage et au gibier d'eau pour tenir compte de cette injonction. La Fédération régionale des chasseurs de Picardie a produit une étude le 9 janvier 2011, intitulée « argumentaire technique pour une chasse raisonnée des oies en France ». L'étude vise à « récolter des échantillons biologiques en vue d'analyser les teneurs isotopiques et différents marqueurs génétiques qui permettront de connaître réellement l'origine des oiseaux (Hollande ou Norvège) et de savoir si les oies qui passent en France sont celles qui commettent ou non des dégâts en Hollande ». Considérant que cette étude pouvait apporter un complément utile au programme de recherche sus-mentionné conduit par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), la ministre en charge de la chasse avait autorisé par arrêté en date du 3 février 2012 des prélèvements d'oies à des fins scientifiques jusqu'au 10 février 2012 dans 13 départements. Cet arrêté du 3 février 2012 autorisant le prélèvement d'oies à des fins scientifiques a fait l'objet d'une requête de l'Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) demandant son annulation. Par décision en date du 7 novembre 2012, le Conseil d'État a annulé l'arrêté considérant que « pour la mise en oeuvre de cette dérogation, l'article L. 424-2 du code de l'environnement a prévu que des dérogations aux règles résultant des dates de clôture de chasse pourront être accordées pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux migrateurs terrestres et aquatiques en petites quantités, conformément aux dispositions de l'article L. 425-14 ; que, d'une part, il ressort des pièces du dossier que les prélèvements aux fins d'études scientifiques autorisés par l'arrêté attaqué ne s'inscrivent dans aucun programme de recherche et notamment pas dans le programme d'amélioration des connaissances sur l'oie cendrée en France lancé en 2010 et coordonné par l'ONCFS ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'existerait pas d'autre solution satisfaisante que des prélèvements par tir pour améliorer les connaissances sur l'origine et les déplacements migratoires des diverses espèces d'oies en cause ; qu'il suit de là que le ministre chargé de la chasse a fait une inexacte application de l'article L. 424-2 du code de l'environnement en autorisant, par l'arrêté attaqué, les prélèvements contestés en l'absence de tout intérêt scientifique ». Compte tenu de cette décision du Conseil d'État et des premiers résultats précités du programme de recherche de l'ONCFS, la date de fermeture de la chasse des oies est restée fixée au 31 janvier en 2013. En 2014, considérant que les dégâts imputables aux oies, très importants aux Pays-Bas, s'étendent désormais à la Belgique, à proximité immédiate de nos frontières, considérant d'autre part que les oies sédentaires des Pays-Bas ne constituaient pas une population isolée mais qu'elles avaient bien des échanges avec le reste de la population ouest-européenne, et estimant par ailleurs qu'un complément de prélèvement pendant la première décade de février ne nuirait pas à l'état de conservation de l'espèce mais permettrait de contribuer à sa régulation, massivement mise en oeuvre aux Pays-Bas, il avait été décidé de prolonger par arrêté du 30 janvier 2014 la période d'ouverture de la chasse des oies jusqu'au 10 février 2014. Cette analyse n'a pas convaincu le juge des référés du Conseil d'État qui a ordonné la suspension de l'exécution de cet arrêté, retenant une interprétation stricte de la directive « oiseaux ». Le jugement sur le fond sera rendu avant la fin décembre 2014. Un programme d'étude relatif à l'amélioration des connaissances de l'Oie cendrée en France, réalisé par l'ONCFS depuis 2011 est en cours de finalisation. Il met en évidence notamment des changements majeurs au sein de l'aire de répartition de la population des oies cendrées dont l'Espagne représente la limite sud de son aire d'hivernage. En particulier, les résultats des 3 années de suivi confirment un début de migration prénuptiale dans la troisième décade de janvier et un pic dans la 2e décade de février pour l'axe migratoire est-Atlantique. Pour ce qui est des moratoires sur la chasse de certaines espèces d'oiseaux, après avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) le 6 juin 2013, le ministre en charge de l'écologie a pris un arrêté en date du 24 juillet 2013 (publié au Journal Officiel le 30 juillet 2013) afin de suspendre jusqu'au 30 juillet 2018 la chasse de la Barge à queue noire et du Courlis cendré (hors domaine public maritime pour cette seconde espèce). L'Eider à duvet et le Vanneau huppé ne sont pas concernés par cette suspension de la chasse. La Barge à queue noire est en mauvais état de conservation à l'échelle européenne. Un plan de gestion international a été adopté au titre de l'accord international sur les oiseaux d'eau d'Afrique et d'Eurasie (AEWA) en 2008 pour une durée de 10 ans, qui préconise un moratoire de la chasse de la Barge à queue noire dans les États concernés par l'Accord, dont la France. Les autres pays européens ont ainsi progressivement supprimé la chasse de cette espèce, la France étant jusqu'en 2008, le seul pays européen à prélever encore cette espèce. En ce qui concerne le courlis cendré, cette espèce est classée dans la catégorie des espèces « quasi menacées » de la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), pour lesquelles une action internationale est appropriée. La poursuite des moratoires de la chasse de la Barge à queue noire et du Courlis cendré s'accompagne d'études et de suivi pour évaluer leur efficacité.