14ème législature

Question N° 3231
de M. Denis Baupin (Écologiste - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > énergie nucléaire

Analyse > réacteurs. construction. Royaume-Uni.

Question publiée au JO le : 21/10/2015
Réponse publiée au JO le : 21/10/2015 page : 8416

Texte de la question

Texte de la réponse

CENTRALE DE HINKLEY POINT


M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour le groupe écologiste.

M. Denis Baupin. Madame la ministre de l'énergie, comme le titre ce soir le journal Le Monde, EDF s'apprête à signer demain, à Londres, un contrat avec le gouvernement britannique et le président chinois pour construire deux réacteurs à Hinkley Point, pour la somme pharaonique de 34 milliards d'euros. (« Bravo ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.)

Même l'ancien secrétaire d'État à l'énergie de Mme Thatcher estime que ce contrat serait « le pire deal jamais conclu », avec un prix d'achat garanti pour trente-cinq ans au double du prix de l'électricité britannique, 30 % plus élevé que le prix de l'électricité renouvelable.

Le PDG d'EDF lui-même a reconnu qu'il avait échoué à faire participer les investisseurs étrangers prévus, tant les échecs de l'EPR les inquiètent.

M. Philippe Cochet. Vive l'éclairage à la bougie !

M. Denis Baupin. Seuls les Chinois participeraient, mais dans l'unique but de devenir incontournables sur le continent européen. La dépendance croissante du nucléaire français et britannique envers les Chinois pourrait d'ailleurs faire sourire : on nous a tant vanté le mythe de l'indépendance nationale ! Cette dépendance inquiète même les militaires.

Une troisième question taraude nos voisins : pourquoi acheter à prix d'or de vieux modèles EPR du XXème siècle qui ne marchent nulle part, alors même que la France y renonce, puisque EDF et Areva travaillent déjà à un EPR nouveau modèle ? Même les agences de notation, qui visiblement ne croient pas à l'avenir du nucléaire, annoncent qu'elles dégraderont la note d'EDF si le contrat est signé.

Madame la ministre, s'endetter pour des décennies afin de financer un tel projet, est-ce bien la priorité d'EDF ? L'État actionnaire compte-t-il, sans autorisation du Parlement, permettre à EDF de consacrer ses faibles marges financières à des projets du siècle dernier, aux dépens des énergies d'avenir que sont les énergies renouvelables ? Le contribuable français, qui paiera déjà très cher la folie des grandeurs d'Areva, a-t-il vocation à payer toutes les factures de la mégalomanie du nucléaire français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le député, permettez-moi d'abord de vous dire qu'aucune idéologie ne justifie que l'on porte atteinte aux intérêts d'une grande entreprise française ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. - « Bravo ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.)

Cette entreprise va en effet – et vous devriez vous en réjouir – signer un partenariat industriel de première importance. J'espère que ce ne sera pas le seul, et qu'à la suite de ce partenariat industriel avec le Royaume-Uni, d'autres seront signés avec la Chine, l'Inde et le Japon.

M. Bernard Accoyer. Les écologistes sont des traîtres à l'économie française !

Mme Ségolène Royal, ministre. EDF est en effet engagée – et vous ne pouvez pas l'ignorer, puisque vous avez voté la loi de transition énergétique – dans le mix énergétique français. C'est la première entreprise productrice d'énergie renouvelable en France. Nous avons donc réussi à atteindre un juste équilibre, grâce – entre autres – au débat parlementaire, entre la part du nucléaire – qui reste importante même si elle est ramenée de 75 % à 50 % du mix énergétique et électrique – et la montée en puissance des énergies renouvelables.

Seconde observation : en effet, ces partenariats industriels permettront d'améliorer la performance de la production d'énergie nucléaire qui, je le rappelle, est une énergie décarbonée. L'État actionnaire assume parfaitement ces choix industriels : ce sont de bons choix. Je regrette donc le ton de votre question, qui tend à jeter le discrédit sur une grande entreprise française qui, je l'espère, connaîtra d'autres succès industriels permettant de créer de l'activité et des emplois sur le territoire français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Socialiste, républicain et citoyen et du groupe Les Républicains.)