14ème législature

Question N° 32741
de M. Jean-Charles Taugourdeau (Union pour un Mouvement Populaire - Maine-et-Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère attributaire > Travail, emploi et dialogue social

Rubrique > politiques communautaires

Tête d'analyse > prestation de services

Analyse > réglementation.

Question publiée au JO le : 16/07/2013 page : 7411
Réponse publiée au JO le : 02/09/2014 page : 7457
Date de changement d'attribution: 03/04/2014
Date de renouvellement: 05/11/2013
Date de renouvellement: 04/03/2014
Date de renouvellement: 17/06/2014
Date de renouvellement: 17/06/2014

Texte de la question

M. Jean-Charles Taugourdeau attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur les difficultés de certains professionnels à rester compétitifs face à des prestataires issus d'autres pays européens et proposant des services ou de la main d'œuvre à moindre coût. Depuis un décret de 2007, le recours à des entreprises étrangères prestataires de services installées dans d'autres pays de l'Union européenne est en effet légal en France. Cependant, celles-ci doivent respecter le droit du travail français, en matière de rémunérations notamment. En novembre 2012, le Premier ministre avait annoncé un plan pour contrôler les prestataires étrangers en France. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer la suite qui a été donnée à cette annonce.

Texte de la réponse

Afin de concilier la libre prestation de services avec l'impératif de protection des travailleurs dans un climat de concurrence loyale, le code du travail encadre strictement les modalités d'intervention en France des entreprises établies hors de France, conformément aux dispositions de la directive européenne 1996/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services. L'entreprise prestataire étrangère doit notamment intervenir en France de façon temporaire (en fonction de la durée nécessaire à la réalisation d'une mission définie au préalable) et à la condition d'être régulièrement établie dans son pays d'origine et d'y justifier d'une activité significative. Une entreprise établie hors de France dont l'activité est entièrement orientée en France doit créer un établissement en France et ne peut pas se prévaloir du détachement. En ce qui concerne le droit du travail applicable, les entreprises étrangères intervenant en France au titre du détachement sont tenues de respecter certaines règles françaises (fixées par le code du travail ou les conventions collectives étendues) en matière de conditions de travail et d'emploi, notamment la rémunération, la durée du travail, la santé et les règles de sécurité au travail. Par ailleurs, elles doivent transmettre une déclaration préalable de détachement à l'inspection du travail du lieu d'exécution de la mission du salarié détaché. La commission nationale de lutte contre le travail illégal réunie le 27 novembre 2012 sous l'égide du Premier ministre a dressé le bilan des actions déjà engagées par les services de l'Etat et les organismes de recouvrement des cotisations sociales et fixé les axes prioritaires du plan national d'action pour les années 2013 à 2015. Cinq objectifs prioritaires ont ainsi été fixés dont le renforcement de la lutte contre les fraudes au détachement dans le cadre de prestations de services transnationales, notamment dans les secteurs du bâtiment et les travaux publics, des transports routiers de marchandises, du travail saisonnier en agriculture et du spectacle. Le plan combine des mesures préventives, telles que la négociation et la signature de conventions de partenariat de lutte contre le travail illégal entre les organisations syndicales, les organisations patronales et l'Etat, et les modalités d'organisation des actions répressives. Il prévoit ainsi le renforcement des contrôles et promeut la coordination entre les différents corps de contrôle compétents sur le terrain. La commission nationale de lutte contre le travail illégal, réunie le 5 décembre 2013, présidée par mon prédécesseur, a confirmé les objectifs du plan pour 2014 et réaffirmé la nécessité de lutter contre les fraudes au détachement. Les derniers éléments statistiques en matière de lutte contre le travail illégal ont été présentés à cette occasion : en 2012, près de 18 000 infractions ont été relevées visant près de 10 300 auteurs ou co-auteurs et concernant environ de 23 800 salariés. Concernant plus spécifiquement le recours à la prestation de service internationale, 89 procédures de travail illégal ont été engagées au 1er semestre 2013. Les contrôles effectués par l'inspection du travail dans le cadre de situations déclarées de détachement ont conduit au cours des trois premiers trimestres de l'année 2013 à 64 arrêts de chantier. Les 25 et 26 juin 2013, une opération d'envergure nationale a été menée par les services de l'inspection du travail et les autres corps de contrôle sur le secteur du bâtiment. Cette action a mobilisé près de 3 500 agents pour le contrôle de 332 chantiers et 2021 entreprises. Les conditions d'emploi de plus de 7 700 salariés ont ainsi pu être vérifiées. Les agents de contrôle se sont attachés à relever les principales infractions relevant d'organisations frauduleuses complexes visées dans le plan. L'opération consistait à contrôler au moins un grand chantier dans chaque département. Les contrôles ont porté sur des chantiers dont la taille et l'importance laissaient notamment présager le recours à des sous-traitants et au détachement de salariés d'entreprises étrangères. Par ailleurs, la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale complète l'arsenal législatif français en matière de lutte contre les fraudes au détachement, notamment en élargissant les possibilités d'action offertes aux organisations professionnelles d'agir en justice même si l'action publique n'a pas été mise en mouvement par le ministère public ou par la partie lésée et en autorisant les organisations syndicales à agir au nom d'un salarié détaché en l'absence d'accord express de l'intéressé. Cette loi instaure en outre un dispositif de responsabilité solidaire entre le donneur d'ordre et l'un de ses sous-traitant qui ne paie pas, ou pas intégralement, les rémunérations dues à ses salariés. Elle transpose ainsi la directive européenne 2014/67/UE du 15 mai 2014 relative à l'exécution de la directive européenne 1996/71/CE précitée en garantissant à tous les salariés, et notamment aux salariés détachés, la possibilité de faire valoir leur droit au paiement d'un salaire conforme aux règles du noyau dur (rémunération égale au minimum légal ou conventionnel). Mais elle va aussi plus loin que le dispositif prévu dans la directive. D'une part, la responsabilité solidaire mise en place n'est pas limitée au seul secteur du bâtiment mais s'applique à tous les secteurs professionnels. D'autre part, cette responsabilité pèse sur les maîtres d'ouvrage et l'ensemble des donneurs d'ordre, quel que soit leur rang dans la chaîne de sous-traitance et n'est pas limitée au seul cocontractant. Enfin la directive du 15 mai 2014 prévoit différentes mesures destinées notamment à faciliter le contrôle et les sanctions des entreprises qui ne respectent pas les droits des salariés détachés.