14ème législature

Question N° 32959
de Mme Sandrine Hurel (Socialiste, républicain et citoyen - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > voirie

Tête d'analyse > sécurité

Analyse > éclairage public.

Question publiée au JO le : 16/07/2013 page : 7362
Réponse publiée au JO le : 29/10/2013 page : 11359

Texte de la question

Mme Sandrine Hurel attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'impact de l'arrêté du 25 janvier 2013 instaurant l'obligation, au 1er juillet 2013, d'éteindre l'éclairage nocturne des bâtiments non résidentiels entre 1 heure et 7 heures du matin. Bien qu'indispensable à la lutte contre le gaspillage des énergies et la pollution lumineuse, cette mesure a priori anodine n'est pas sans conséquence sur le sentiment de sécurité des usagers des voies publiques et sur leur liberté de mouvement. En effet, pour de nombreuses rues de nos villes, l'éclairage des voies publiques était de fait précédemment assuré par l'illumination des vitrines commerciales et des façades des bâtiments. L'extinction de ces éclairages inutiles, n'étant que partiellement compensés par un éclairage public utile et de qualité, a pour conséquence de plonger un grand nombre de rues dans l'obscurité dès la nuit tombée. Cela conduit à réduire la visibilité des usagers, à augmenter le sentiment d'insécurité et peut gêner leur liberté de mouvement, notamment celle des femmes qui, selon une étude de l'INSEE, se déplacent plus fréquemment à pied que les hommes. La sûreté de tous, en particulier celle des femmes se déplaçant seules, doit être en partie assurée par un éclairage public de qualité dans nos villes. L'impératif écologique ne saurait compromettre l'impératif de sûreté. Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il envisage de prendre pour concilier ces deux impératifs.

Texte de la réponse

Comme le souligne l'honorable parlementaire, le changement culturel qui permettra à la France d'entrer dans une logique de chasse aux gâchis et de sobriété énergétique est indispensable à la réussite de la transition écologique et énergétique de la France voulue par le Président de la République. L'arrêté du 25 janvier 2013, réglementant le fonctionnement des dispositifs d'éclairage des bâtiments non résidentiel constitue une mesure simple de sobriété énergétique en réduisant l'empreinte de l'éclairage artificiel sur l'environnement nocturne. Estimées à 2 térawatt-heure par an par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), les économies d'énergie attendues équivalent à la consommation électrique annuelle d'environ 750 000 ménages. Cette disposition permet d'éviter le rejet chaque année de 250 000 tonnes de CO2 et de réaliser une économie de 200 millions d'euros. Elle contribue aussi à la préservation de la biodiversité en évitant des pollutions lumineuses inutiles. La mise en oeuvre de cet arrêté du 25 janvier 2013 fait de la France l'un des pionniers en Europe dans ce domaine. A partir de son entrée en vigueur le 1er juillet 2013 : - les éclairages intérieurs de locaux à usage professionnel doivent être éteints une heure après la fin d'occupation desdits locaux ; - les éclairages des façades des bâtiments doivent être éteints au plus tard à 1 heure du matin ; - les éclairages des vitrines de magasins de commerce ou d'exposition doivent être éteints au plus tard à 1 heure du matin, ou une heure après la fin d'occupation desdits locaux si celle-ci intervient plus tardivement. En ce qui concerne les façades et les vitrines, le texte prévoit la possibilité pour le préfet d'accorder des dérogations pour la veille des jours fériés chômés, la période des illuminations de Noël, lors d'événements exceptionnels à caractère local, ou dans des lieux présentant un intérêt touristique exceptionnel définis par l'article L. 3132-25 du code du travail. Des règles portent également sur les conditions d'allumage : - les vitrines de magasins de commerce ou d'exposition peuvent être allumées à partir de 7 heures du matin ou une heure avant le début de l'activité si celle-ci s'exerce plus tôt ; - les éclairages des façades des bâtiments ne peuvent pas être allumés avant le coucher du soleil. Un bilan de l'application de cet arrêté sera réalisé en janvier 2014. Le dispositif règlementaire sera ultérieurement complété par des dispositions concernant notamment l'éclairage public, l'éclairage de mise en valeur du patrimoine et l'éclairage des installations sportives extérieures telles que les stades. Selon ADEME, les neuf millions de points lumineux qui constituent le parc d'éclairage public appellent, lorsqu'ils fonctionnent en même temps, une puissance d'environ 1 300 mégawatts, soit la puissance délivrée par une tranche nucléaire récente à pleine charge. L'éclairage public représente ainsi 47 % de la consommation d'électricité des communes et rejette annuellement 670 000 tonnes de CO2. L'arrêté du 25 janvier 2013 susvisé ne concerne pas l'éclairage public, entendu au sens de l'éclairage extérieur destiné à favoriser la sécurité des déplacements, des personnes et des biens, en particulier de la voirie et des espaces publics. L'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales dispose en effet que l'éclairage public constitue un des outils à la disposition des maires dans le cadre de leurs pouvoirs de police en vue d'assurer « la sûreté, et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques ». Les illuminations des façades de bâtiments non résidentiels ainsi que les éclairages des vitrines en coeur de nuit ont quant à elles vocation à répondre à une logique ornementale et de mise en valeur. On ne peut donc pas exiger de ces installations qu'elles assurent la fonction de l'éclairage public et s'y substituent. L'arrêté précité n'a donc pas pour objectif d'opposer un impératif écologique (réduction des nuisances lumineuses, économies d'énergie) à un impératif de sûreté ou de sécurité, que les installations lumineuses concernées, pour l'essentiel privées (façades de bâtiments non résidentiels, vitrines de magasins...), n'ont pas vocation à assurer. De plus, le sentiment de sécurité auquel il est fait référence est une notion complexe qui dépend de nombreux facteurs, l'éclairage en étant un parmi d'autres : il existe ainsi des espaces fortement éclairés mais où se crée un sentiment d'insécurité, et inversement des espaces faiblement éclairés où les usagers des voies publiques se sentent en sécurité. Il n'existe pas à ce jour d'étude scientifique établissant un lien de causalité entre baisse de la délinquance ou de la criminalité, et éclairage. Par ailleurs, une enquête réalisée pour le ministère chargé de l'écologie par TNS Sofres en août 2012 fait apparaître que 51 % des sondés sont « pas du tout » ou « peu » favorables à une extinction de l'éclairage public des rues, la nuit aux heures creuses, alors qu'ils étaient très majoritairement favorables à l'extinction des bureaux inoccupés et des vitrines de commerces (respectivement 87 % et 82 %). En l'état actuel de la réglementation, la décision d'éteindre l'éclairage public en coeur de nuit, de réduire sa puissance ou de limiter le nombre de points lumineux en fonctionnement relève de la seule compétence du maire en application de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.