14ème législature

Question N° 34110
de M. François Cornut-Gentille (Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Défense
Ministère attributaire > Défense

Rubrique > défense

Tête d'analyse > armement

Analyse > exportations. réglementation.

Question publiée au JO le : 30/07/2013 page : 7998
Réponse publiée au JO le : 29/10/2013 page : 11336

Texte de la question

M. François Cornut-Gentille interroge M. le ministre de la défense sur le contrôle de l'usage des matériels militaires exportés. Une procédure très stricte est en vigueur pour contrôler l'exportation des équipements militaires. Une fois les autorisations obtenues, ces équipements sont propriétés des États acheteurs. Il est de l'intérêt de la France de veiller à l'emploi de ces équipements exportés pour éviter une atteinte à ses intérêts. Les États-unis disposent d'un arsenal juridique et technologique contraignant à même de les prémunir de ce type de danger. En conséquence, il lui demande d'indiquer les moyens juridiques, contractuels et technologiques dont dispose la France pour veiller à un usage de ces matériels exportés conformes à ses intérêts.

Texte de la réponse

La réglementation américaine contre le trafic d'armes au niveau international - dite ITAR (International Traffic in Arms Regulation) - procède d'un principe d'extraterritorialité contraire à l'approche prévalant au sein de l'Union européenne, et notamment en France. En effet, la France fonde la sécurité de ses exportations de matériels de guerre et matériels assimilés sur une analyse préalable du risque menée par la Commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG). La mission de la CIEEMG s'exerce dans le cadre de la position commune 2008/944/PESC du 8 décembre 2008 du Conseil de l'Union européenne qui définit les règles applicables en matière de contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires. Cette position commune établit une liste de huit critères à prendre en considération, et notamment l'obligation pour les États membres d'évaluer le risque de détournement d'une technologie ou d'un équipement militaire dans un pays acheteur, ou de leur réexportation dans des conditions non souhaitées. Aussi, ce paramètre est-il une préoccupation constante de la France lors des procédures de contrôle d'exportations de matériels militaires. La CIEEMG applique des procédures de contrôle spécifiques à la prise en compte de ce risque. Ainsi, certains pays font l'objet d'une vigilance particulière, eu égard aux informations détenues par la France quant aux trafics qui peuvent s'y dérouler. Dans ce contexte, les opérations de vente de matériels qui présenteraient un risque ne pouvant être maîtrisé sont alors systématiquement refusées. Plus généralement, et en fonction de la sensibilité des matériels de guerre, la CIEEMG s'assure de l'adaptation des biens exportés aux besoins réels des États clients ainsi que de la transparence du circuit commercial. En outre, elle exige de ces pays des certificats d'utilisation finale pour chaque produit (notamment dans le cas de composants qui ont vocation à être intégrés) et, selon les dispositions des contrats, des engagements de non-réexportation signés par les émissaires assermentés représentant l'autorité gouvernementale destinataire du matériel. En dehors d'une liste restreinte de pays avec lesquels une très grande confiance est établie, la qualité et la fonction du signataire des clauses de non-réexportation doit être attestée par le poste diplomatique dans le pays client. Dans le cadre des exportations les plus sensibles de matériels de guerre ou de biens à double usage[1], des réserves particulières permettent de contraindre l'industriel exportateur à assurer le suivi des matériels exportés par des prestations de mise en oeuvre opérationnelle ou des contrats de maintenance et de soutien technique sur le territoire du pays acquéreur. Ces dispositions donnent ainsi à la France la possibilité de vérifier l'utilisation in fine des matériels exportés les plus sensibles. Dans l'hypothèse d'une réexportation de matériels de guerre acquis par un État client en dépit de ses engagements ou du fait d'un changement soudain de régime, la CIEEMG dispose d'un mécanisme de contrôle couplé à un dispositif contraignant de pénalisation. Toutefois, les transferts illicites ou détournements de matériels peuvent parfois s'avérer difficilement détectables, compliquant d'autant l'application de pénalités. Aussi, la France demeure-t-elle extrêmement vigilante quant à la crédibilité des pays souhaitant faire l'acquisition de matériels de guerre. En cas de doute persistant, faute d'un dialogue fructueux avec l'État client, la France se réserve alors la liberté de suspendre, voire d'abroger les autorisations délivrées, ou de refuser la délivrance de nouvelles autorisations, marquant l'arrêt immédiat des livraisons, du soutien ou du maintien en condition opérationnelle des matériels par l'industriel. [1] Biens et équipements technologiques, logiciels ou savoir-faire immatériel ou intangible, susceptibles d'avoir une utilisation tant civile que militaire.