14ème législature

Question N° 34185
de Mme Laure de La Raudière (Union pour un Mouvement Populaire - Eure-et-Loir )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > électricité

Analyse > centrales à cycle combiné gaz. perspectives.

Question publiée au JO le : 30/07/2013 page : 8010
Réponse publiée au JO le : 20/05/2014 page : 4051
Date de changement d'attribution: 03/04/2014

Texte de la question

Mme Laure de La Raudière interroge M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'avenir des centrales à cycles combinés gaz. Leur développement a été encouragé par les pouvoirs publics, comme en témoigne par exemple le programme pluriannuel des investissements de 2009-2020 jugeant leur apport essentiel en raison du déclassement environnemental du central charbon et de certaines cogénérations (directive GIC). Les électriciens français et européen se sont fortement investis pour développer un parc de cycles combinés gaz fiables et performants. Ce parc français représente maintenant un atout à préserver, tant du point de vue de la transition énergétique (complément indispensable à l'intermittence des nouvelles énergies renouvelables) que du point de vue de la compétitivité industrielle. Les cycles combinés gaz n'ont jamais bénéficié de quelconque mécanisme de soutien public et n'ont jamais alourdi les charges de la contribution au service public de l'électricité. Ces centrales ont toujours été intégrées au marché sans en altérer le fonctionnement. Elles offrent de bonnes performances énergétiques et environnementales et constituent le 2e moyen centralisé flexible le moins émetteur de CO2 après la grande hydraulique de haute chute. Ces centrales présentent en outre un très bon niveau de disponibilité, tant en hiver qu'en été, ce qui les rend particulièrement utiles pour la sécurité du système électrique. Elles contribuent en outre à accroître les revenus des gestionnaires de réseaux de transport de gaz. Il est donc impératif de préserver l'apport de ces outils au système électrique et gazier français. Or la rentabilité des cycles combinés gaz s'est fortement dégradée : ces centrales ne couvrent plus leurs coûts opérationnels sans même parler de la rentabilisation des investissements initiaux de 300 millions à 400 millions d'euros. Cette situation résulte en grande partie de prix de marché effondrés, conséquence notamment d'un prix du CO2 extrêmement bas qui favorise la concurrence internationale des unités thermiques au charbon (lignite allemande) avec un prix du charbon très bas en comparaison du prix du gaz naturel. La Commission de régulation de l'énergie, dans son rapport sur le fonctionnement des marchés de détail de l'électricité et du gaz de janvier 2013, a estimé que l'exploitation d'un cycle combinés gaz "ne peut être aujourd'hui rentable en France" et que leur survie "nécessite des évolutions à court ou moyen terme des règles qui régissent l'environnement économique et réglementaire". En conséquence, les actionnaires des cycles combinés gaz mettent leurs centrales sous cocon ou étudient très sérieusement cette possibilité. Une telle décision est lourde de conséquences économiques et sociales. Pour les acteurs opérant un parc de centrales réduit, la mise sous cocon se révélerait extrêmement délicate sur le plan social (plusieurs centaines d'emplois sont en jeu, sans compter les emplois indirects) et pourrait même avoir un caractère irréversible (incertitude de redémarrage) qui fragiliserait irrémédiablement les tissus économiques locaux (suppression des revenus fiscaux liés à la CET ou à l'IFER). Or, à ce jour, aucune solution n'a été sérieusement envisagée par le gouvernement pour les cycles combinés gaz. L'annulation de l'appel d'offres transitoire de capacité pour l'hiver 2015-2016 ne fait que dégrader plus encore la situation. Aussi, elle souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage une extension de la prime capacité attribué aux cogénérations (article 38 de la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable) aux cycles combinés gaz. Elle souhaite également savoir si le Gouvernement entend mettre en œuvre : l'éligibilité des cycles combinés gaz au statut de gazon-intensif afin notamment de résoudre la problématique du prix du gaz dans la zone sud (article 43 de la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable) ; ou, à l'instar de la Belgique, de l'Allemagne et de l'Espagne, l'adoption d'un dispositif ad hoc pour l'ensemble de la filière des cycles combinés gaz à très court terme.

Texte de la réponse

Les centrales de production de type cycle combiné à gaz rencontrent actuellement de réelles difficultés économiques liées à une conjonction défavorable entre un prix moyen de l'électricité sur le marché de gros déprimé et un renchérissement de leur approvisionnement en gaz. Les facteurs explicatifs sont multiples, mais cette situation résulte en grande partie d'une situation de surcapacité européenne en moyens de production d'électricité. Selon les analyses de Réseau de transport d'électricité (RTE), cette surcapacité semble a minima porter sur le prochain hiver en France et conduit mécaniquement à un niveau de sécurité d'approvisionnement satisfaisant. Pour des raisons tenant notamment à la structure de leur parc de production, certains de nos proches voisins comme l'Allemagne et la Belgique subissent d'importantes tensions sur leur système électrique et ont donc recours à des mécanismes exceptionnels destinés à soutenir la disponibilité de leurs moyens de production. Cette surcapacité française, confirmée par RTE en juillet 2013, a par ailleurs conduit le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie à ne pas lancer l'appel à projets prévu par l'article 26 du décret n° 2012-1405 sur le mécanisme d'obligation de capacité et qui porte sur la période hivernale 2015-2016. Cette situation française de surcapacité devrait néanmoins évoluer à partir de l'année 2016 dans la mesure où plusieurs gigawatts (GW), d'installations fossiles devront être arrêtés en 2015 pour des raisons environnementales. La directive relative aux émissions industrielles (IED), impose en effet pour des motifs environnementaux que les installations anciennes soient fermées si des investissements lourds ne sont pas réalisés pour réduire de façon importante leurs émissions. Pour garantir la sécurité d'approvisionnement à cet horizon, en garantissant que les moyens de production et d'effacement seront suffisants, le Gouvernement poursuit en parallèle deux réformes de fond. D'une part, le mécanisme d'obligation de capacité, dont l'architecture a été définie dans un décret pris par le Gouvernement en décembre 2012 et dont les règles précises seront arrêtées prochainement, permettra de garantir la sécurité d'approvisionnement du système électrique français en apportant une rémunération complémentaire aux capacités de production et d'effacement en fonction de leur contribution à la réduction du risque de défaillance. La première année de livraison de ce dispositif couvrira l'hiver 2016-2017 et des premiers échanges de garanties de capacités pourront être réalisés avant 2016, apportant la rémunération associée. A moyen terme, ce dispositif contribuera donc à atteindre le bon niveau de capacités de production et d'effacement et devra donner des signaux clairs aux exploitants de capacités. D'autre part, il a été demandé à la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), de lancer une réflexion de fond sur l'évolution des mécanismes d'obligation d'achat, afin de mieux intégrer les filières qui en bénéficient au marché de l'électricité et améliorer ainsi son fonctionnement. Tout est donc mis en oeuvre pour que le contexte économique et réglementaire s'améliore à l'horizon 2016 et que les décisions d'investissement puissent être prises avec des perspectives suffisantes. Enfin, en parallèle des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, à l'effacement ou à la cogénération, la présence de centrales de type cycle combiné à gaz reste importante notamment pour compenser l'érosion du parc thermique. Dans cette perspective, la dernière programmation pluriannuelle des investissements (PPI), précise que le développement du parc de centrales à cycle combiné gaz est souhaitable afin de garantir le bon fonctionnement du système électrique, sans toutefois fournir d'objectif chiffré. Cette rédaction sera de nouveau débattue à l'issue de la loi sur la transition énergétique, dans le cadre de la préparation des nouvelles PPI.