14ème législature

Question N° 3439
de M. Ary Chalus (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Guadeloupe )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > DOM-ROM : Guadeloupe et Martinique

Analyse > agriculture. traitements. épandage aérien. précautions.

Question publiée au JO le : 28/08/2012 page : 4805
Réponse publiée au JO le : 04/12/2012 page : 7159
Date de signalement: 27/11/2012

Texte de la question

M. Ary Chalus attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la problématique de l'épandage aérien comme dispositif de traitement visant à lutter contre la cercosporiose noire dans les bananeraies de Guadeloupe et Martinique. Sur la dernière décennie, la banane représente 20 % de la production agricole en Guadeloupe et 54 % en Martinique. La filière Banane est aussi le premier employeur privé de ces régions ; elle génère en tout plus de 10 000 emplois ; environ 1 actif sur 20 aux Antilles travaille pour la filière Banane ! L'épandage aérien de fongicides qui vise à lutter contre la cercosporiose noire, qui menace nos bananeraies depuis 2010, préoccupe nos populations qui demeurent traumatisées, à juste titre, par le scandale du chlordécone. Il convient aujourd'hui d'anticiper et de prévenir tout risque sanitaire tout en cherchant à préserver une activité économique qui représente 14 % des exportations de notre territoire. En effet, certains observateurs considèrent que cette pratique comporte des risques pour la santé humaine, la pollution des sols et des cours d'eau. Ces préoccupations ont d'ailleurs été étayées par les hésitations du Conseil européen sur l'inscription du BANOLE à l'annexe I de la directive 91/414/CEE. Le conseil de l'UE a d'abord proposé la non-inscription du BANOLE (CAS 64742-46-7) à l'annexe I de la directive du Conseil dans une proposition de décision du conseil Européen datée du 25 mai 2009, avant de se raviser un mois plus tard, le 25 juin 2009, en inscrivant les dites substances dans l'annexe I. Plus encore, la méthode d'application envisagée, l'épandage aérien, n'est autorisée que «dans des cas particuliers et sous conditions». Parmi ces conditions figure la réalisation d'une évaluation spécifique des risques liés à l'épandage aérien. En France, cette évaluation est confiée à l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail). D'ores et déjà, nous savons que les restrictions interdisant l'épandage aérien, y compris de produits autorisés, à moins de 50 m des zones habitées limitera fortement, dans nos régions à l'habitat diffus, l'efficacité du traitement. Ceci pourrait d'ailleurs remettre en cause l'opportunité d'une telle dérogation. Nous soulignons enfin que les stratégies de lutte actuelles ne pourront être utilisées indéfiniment. Par exemple, en Amérique centrale, des phénomènes de résistance des champignons aux traitements ont été observés deux ans seulement après le démarrage de leur utilisation. Le meilleur rempart contre la cercosporiose sera la découverte de variétés résistantes. Aux Antilles, la filière a fait le choix du croisement des variétés actuelles avec des variétés sauvages afin de ne pas avoir recours aux OGM. Dans cet objectif, l'Institut technique de la banane (ITBAN) créé en 2009 et devenu IT2 (Institut Technique Tropical) en 2010. La priorité de l'ITBAN était la recherche variétale, mission confiée au Cirad, l'Institut devant procéder aux essais en direct chez les planteurs associés au processus. Il lui demande donc si les services du ministère peuvent fournir une évaluation des travaux de l'IT2 ? Où en est-on au niveau des moyens alloués à ces missions ? Est-il possible de rendre publics les résultats de l'évaluation spécifique des risques effectuée par l'ANSES ? Enfin quelles sont les mesures qui seront prises par le Gouvernement pour éviter un nouveau drame sanitaire dans des départements où la culture de la banane demeure un des piliers de l'économie locale ?

Texte de la réponse

La directive 2009/128/CE pose le principe d'une interdiction des traitements aériens, sauf dans des cas particuliers et sous réserve de respecter certaines conditions, notamment lorsqu'il n'existe pas d'autre solution possible. De plus, les produits utilisés doivent avoir fait l'objet d'une évaluation spécifique quant aux risques liés à cette technique d'application et obtenu une autorisation expresse. Les articles L. 253-3 et R. 253-46 du code rural et de la pêche maritime, ainsi que l'arrêté du 31 mai 2011 transposent ces principes. L'arrêté précité prévoit que pour la lutte contre les cercosporioses du bananier, une dérogation annuelle puisse être délivrée, en raison des dégâts très importants que causent ces ravageurs et de l'absence d'alternative terrestre. Des mesures de gestion sont également prévues, de façon à protéger les lieux où se trouvent des riverains (habitations, jardins, parcs) et les espaces sensibles (par exemple les cours d'eau). Les produits phytopharmaceutiques utilisés sur les bananeraies ont fait l'objet d'une évaluation scientifique spécifique aux problématiques du traitement aérien, menée par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) selon des lignes directrices publiées en 2011. Les avis de l'ANSES sont rendus publics. Une fois l'évaluation terminée, et si celle-ci est favorable, les produits sont autorisés expressément, comme le prévoit la directive 2009/128/CE. Dans le cadre du plan Ecophyto, certaines actions ont pour objectif de développer des solutions alternatives au traitement aérien, permettant aux producteurs de s'affranchir de cette technique tout en maintenant leur capacité de production. Une première étude spécifique aux bananeraies a déjà été rendue, avec l'élaboration d'un prototype de pulvérisation terrestre qui est en cours de test sur le terrain. En accord avec la feuille de route issue de la conférence environnementale, l'étude Optiban 3 a été lancée de façon à mettre à disposition des producteurs un système de pulvérisation terrestre pour juillet 2014. Enfin, le centre de recherche agronomique pour le développement (CIRAD) mène des recherches en terme de création variétale visant à sélectionner des variétés résistantes à ce champignon. La direction générale de l'alimentation du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a notamment contribué au financement de ces travaux dans le cadre des appels à projet du comité technique permanent pour la sélection des plantes cultivées. La création de variétés résistantes représente une solution très prometteuse de lutte alternative compatible avec les objectifs du plan Ecophyto.