14ème législature

Question N° 360
de Mme Elisabeth Pochon (Socialiste, républicain et citoyen - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > prestations familiales

Tête d'analyse > complément de libre choix du mode de garde

Analyse > tiers payant. mise en oeuvre.

Question publiée au JO le : 04/06/2013 page : 5611
Réponse publiée au JO le : 14/06/2013 page : 6396

Texte de la question

Mme Elisabeth Pochon interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la question du complément mode de garde pour les familles en insertion. Actuellement, un frein majeur du retour à l'emploi, notamment des femmes isolées, est constitué par la difficulté à trouver un mode d'accueil pour les enfants de moins de quatre ans. Lorsque ces familles veulent recourir aux services d'une assistante maternelle, elles bénéficient certes d'un droit au complément mode de garde de la CAF. Mais elles doivent effectuer le paiement de l'intégralité du salaire de l'assistante maternelle avant de bénéficier du versement de la prestation. La CAF et le conseil général de Seine-Saint-Denis ont soumis à la caisse nationale des allocations familiales une proposition d'expérimentation consistant à verser, en tiers-payant, le complément mode de garde et l'allocation départementale d'accueil du jeune enfant. Ce projet consiste à verser ces aides non pas aux familles tel que le cadre réglementaire le prévoit, mais directement aux assistantes maternelles. Le double enjeu visé par cette évolution est à la fois d'éviter l'avance des frais de garde, difficile à assurer pour certaines familles, et de rassurer les assistantes maternelles sur la solvabilité des familles, lorsque celles-ci sont en insertion. Ce dispositif n'occasionnerait aucun coût supplémentaire pour les institutions. De plus l'accueil individuel coûte globalement moins cher à la collectivité qu'un accueil en équipement collectif. Des freins réglementaires heurtent l'avancement du projet, techniquement faisable. Une évolution législative est donc nécessaire. Elle lui demande donc les mesures qu'elle envisage afin de mettre en oeuvre un tel projet qui présente des avantages certains aussi bien pour les familles, pour les assistantes maternelles et pour les institutions.

Texte de la réponse

lign='center'>CONDITIONS DE VERSEMENT DU COMPLÉMENT DE LIBRE CHOIX DU
MODE DE GARDE DES ENFANTS

Mme la présidente. La parole est à Mme Elisabeth Pochon, pour exposer sa question, n° 360, relative aux conditions de versement du complément de libre choix du mode de garde des enfants.
Mme Elisabeth Pochon. Madame la ministre déléguée chargée de la famille, je souhaite appeler votre attention sur la question du complément de mode de garde pour les familles en situation d'insertion.
La difficulté de trouver un mode d'accueil pour les enfants de moins de quatre ans constitue un frein majeur au retour à l'emploi, notamment des femmes isolées.
L'accès de ces enfants à un mode d'accueil collectif est encouragé, pour prendre l'exemple de mon département, par les gestionnaires d'équipements d'accueil du jeune enfant, afin de mobiliser une partie de leurs places en direction de ce public.
Mais les familles veulent souvent recourir - ou doivent recourir - aux services d'une assistante maternelle agréée. En ce cas, elles bénéficient, certes, d'un droit au complément de libre choix du mode de garde au titre de la prestation d'accueil du jeune enfant, versé par la CAF au taux le plus élevé, mais elles doivent effectuer le paiement de l'intégralité du salaire de l'assistante maternelle avant de bénéficier du versement de la prestation.
À titre d'exemple, en 2011, en Seine-Saint-Denis, 8 779 familles bénéficiaient du complément de libre choix du mode de garde, et seulement 328 étaient bénéficiaires du RSA.
La caisse d'allocations familiales et le conseil général de la Seine-Saint-Denis ont soumis à la CNAF une proposition d'expérimentation consistant à verser, en tiers payant, le complément de libre choix du mode de garde et l'allocation départementale d'accueil du jeune enfant.
L'expérimentation consisterait à verser ces aides, non pas aux familles, comme le prévoit actuellement le cadre réglementaire, mais directement aux assistantes maternelles.
Le double enjeu dont est porteuse cette évolution est d'éviter l'avance des frais de garde, difficile à assumer pour certaines familles, et de rassurer les assistantes maternelles quant à la solvabilité des familles lorsque celles-ci sont en situation d'insertion.
Ce dispositif n'occasionnerait aucun coût supplémentaire pour les institutions et permettrait, en mobilisant parallèlement les aides prévues par certaines municipalités, de réduire considérablement le reste à charge des familles - entre 100 et 150 euros par mois, en fonction du nombre d'heures - tout en rassurant les assistantes maternelles.
De plus, l'accueil individuel coûte globalement moins cher à la collectivité qu'un accueil en équipement collectif.
Le projet s'appuie sur une faisabilité technique confirmée mais se heurte à des freins réglementaires : en effet, la réglementation relative au complément de libre choix du mode de garde exclut le versement à d'autres acteurs que les parents employeurs.
Une évolution législative est donc nécessaire ; elle est attendue par d'autres départements ayant un diagnostic de besoins identique au nôtre.
Madame la ministre, quelles mesures pouvez-vous envisager afin qu'un tel projet, favorable tant aux familles qu'aux assistantes maternelles et aux institutions, puisse voir le jour ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille.
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille. Madame la députée, la question que vous posez revêt effectivement une grande importance au regard des difficultés que rencontrent les familles les plus modestes à assumer des frais de garde. Cela se traduit déjà dans les chiffres, puisque vous n'êtes pas sans savoir qu'au sein des familles les plus précaires, plus de 92 % des enfants sont gardés par leur mère. Ce n'est pas forcément un choix de sa part - même si cela peut arriver -, mais cela reflète surtout l'incapacité financière à assumer des frais de garde. On sait également qu'il s'agit là d'un facteur de creusement des inégalités, y compris des futures inégalités scolaires.
C'est pourquoi le développement de l'offre d'accueil des enfants de moins de trois ans, en particulier dans les milieux défavorisés ou en situation de précarité, est au coeur de la politique familiale et des objectifs prioritaires du Gouvernement.
Comme vous le savez, le Premier ministre a annoncé la semaine dernière un plan ambitieux de développement des solutions d'accueil, comprenant notamment la création, dans les cinq ans à venir, de 100 000 places auprès des assistantes maternelles. C'est un facteur de résolution des inégalités territoriales, mais aussi des inégalités sociales.
La question que vous posez est une question que, d'une certaine façon, nous pensions avoir réglée, puisque l'objectif poursuivi était bien de permettre l'avance des frais de garde par les caisses d'allocations familiales dans les situations les plus difficiles et les plus précaires.
Vous avez fait référence à l'expérimentation en cours en Seine-Saint-Denis et dans l'Essonne, qui a donné des résultats très positifs et très encourageants. Une disposition avait d'ailleurs été inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui incitait les départements voulant se lancer dans cette expérimentation à le faire. Vous n'êtes pas sans savoir que le Conseil constitutionnel a retoqué cette mesure, au motif qu'elle avait un effet trop indirect sur les dépenses de la branche famille puisqu'elle concernait et peu de ressources et peu de dépenses.
Malgré ce contretemps, nous n'avons pas renoncé à mettre en oeuvre une telle mesure, qui est de bon sens et dont les effets se sont avérés très prometteurs. Nous réfléchissons donc de manière efficace aux moyens de vous présenter prochainement une disposition législative qui permettra de répondre à vos attentes et à celles des familles les plus modestes. Elle visera notamment à régler le problème du reste à charge, car c'est là une source d'inégalités qu'il faudra corriger.
Mme la présidente. Madame la députée, puisque nous avons dépassé le temps imparti à la question, je ne peux vous donner la parole pour répondre à la ministre. Je rappelle que nous pouvons consacrer, au total, six minutes à chaque question.