14ème législature

Question N° 36317
de Mme Françoise Dumas (Socialiste, républicain et citoyen - Gard )
Question écrite
Ministère interrogé > Culture et communication
Ministère attributaire > Culture et communication

Rubrique > patrimoine culturel

Tête d'analyse > monuments historiques

Analyse > protection. réglementation.

Question publiée au JO le : 27/08/2013 page : 8927
Réponse publiée au JO le : 30/09/2014 page : 8229
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

Mme Françoise Dumas attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la protection de notre patrimoine. Chaque année, environ 500 immeubles et 3 000 objets mobiliers sont protégés au titre des monuments historiques. Les immeubles, ou parties d'immeubles publics ou privés qui, sans justifier de classement immédiat au titre des monuments historiques, présentent un intérêt d'histoire ou d'art, peuvent être inscrits, par décision de l'autorité administrative, sur un inventaire supplémentaire. Cela ne protège pourtant pas le monument en question de toute éventuelle démolition, si son propriétaire en a avisé l'autorité administrative avant. Cette situation se révèle problématique, puisque le bâtiment ne bénéficie pas d'une protection totale, bien qu'il soit reconnu comme patrimoine d'intérêt général. Nous retrouvons cette situation dans la ville de Nîmes où l'hôtel Colomb de Daunant, construit à la fin du XIX° siècle, fait partie des hôtels particuliers témoignant de l'urbanisation engendrée par l'arrivée du chemin de fer. Depuis 1984, l'intérêt patrimonial pour cet hôtel, se traduit par de nombreux investissements dans sa restauration. Inscrit à l'inventaire des monuments historiques par le ministère et reconnu comme patrimoine d'intérêt général, il est aujourd'hui menacé d'un accord donné par l'Architecte des Bâtiments de France sur un projet de construction qui nécessite sa démolition. Le classement au titre des monuments historiques étant dépendant de l'examen de la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites, il est difficile de classer instantanément le bâtiment au titre de monument historique. L'inscription à l'inventaire des monuments historiques se révélant être la première reconnaissance de notre patrimoine, elle lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour que, l'inscription à l'inventaire des monuments historiques, protège les bâtiments concernés.

Texte de la réponse

Le régime de protection des monuments historiques institué par la loi modifiée du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, et intégré depuis 2004 dans le livre VI du code du patrimoine, prévoit deux niveaux de protection, pour les immeubles comme pour les objets mobiliers : le classement au titre des monuments historiques, et l'inscription au titre des monuments historiques. Le classement, prononcé par arrêté ministériel, en cas d'accord du propriétaire, ou par décret en Conseil d'État, en cas de refus, après avis de la Commission nationale des monuments historiques, est la mesure de protection la plus forte, justifiée par l'intérêt public du bien, en termes d'histoire ou d'art. Un immeuble ou un objet mobilier classé ne peut faire l'objet de travaux qu'après autorisation du préfet de région. S'agissant des immeubles, le classement fait échec à toute autorisation d'urbanisme (permis de construire, de démolir ou d'aménager, décision de non opposition à une déclaration de travaux exemptée du permis de construire) antérieurement délivrée, et les travaux prévus ne peuvent être engagés sans l'autorisation du préfet de région. L'inscription au titre des monuments historiques est une protection moins contraignante, justifiée par l'intérêt suffisant que présente la conservation du bien du point de vue de l'histoire ou de l'art. Elle est décidée par arrêté du préfet de région, après avis de la commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS). Les travaux sur un immeuble inscrit doivent faire l'objet d'une déclaration, quatre mois à l'avance, auprès du service territorial de l'architecture et du patrimoine ; l'administration ne peut s'y opposer qu'en procédant au classement du bien. Toutefois, lorsque les travaux relèvent de l'une des autorisations d'urbanisme évoquées ci-dessus, ce permis (ou cette décision de non opposition) ne peut être délivré sans l'accord du préfet de région. Lorsque le bien a fait l'objet d'un permis ou d'une décision de non-opposition au titre du code de l'urbanisme antérieurement à son inscription, celle-ci ne remet pas en cause ce permis ou cette décision. C'est pourquoi, dans le cas de l'hôtel Colomb de Daunant, à Nîmes, hôtel particulier construit dans les années 1880 pour l'avocat du même nom, l'inscription au titre des monuments historiques, décidée le 8 octobre 2010, n'a pu faire échec au permis de démolir antérieurement délivré. Ce permis faisant, à l'époque, l'objet d'un recours contentieux de la part d'une association, le préfet de région avait décidé l'inscription de l'immeuble, sur l'avis de la CRPS, pour qu'en cas d'annulation du permis, l'édifice se trouve désormais protégé, et que sa démolition ne puisse plus être envisagée sans son accord. Le permis de démolir ayant finalement été confirmé par le juge, l'immeuble a été démoli en août 2013, après avoir été gravement endommagé par un incendie. Les circonstances très particulières de la protection et de la démolition de l'hôtel Colomb de Daunant ne sauraient être considérées comme témoignant d'une insuffisance du régime de protection des immeubles inscrits : aucun travail conséquent, a fortiori aucune démolition, ne peut en effet être autorisé sur un immeuble déjà inscrit sans l'accord du préfet de région. Le cas de l'hôtel Colomb de Daunant concerne uniquement les immeubles inscrits postérieurement à la délivrance d'une autorisation d'urbanisme, cas évidemment peu fréquent, qui n'était justifié, en l'occurrence, que par l'éventualité d'une annulation du permis. Si l'on peut déplorer la disparition de cet élément du patrimoine architectural nîmois, le système de protection à double niveau institué en France depuis une centaine d'années permet généralement de préserver les immeubles et les objets mobiliers protégés dans des conditions satisfaisantes. Il convient enfin de rappeler que les communes ont une responsabilité éminente dans la protection du patrimoine en France, et que le code de l'urbanisme leur permet notamment d'identifier, dans les plans locaux d'urbanisme, les immeubles qui, sans nécessairement justifier une protection au titre des monuments historiques, méritent d'être conservés, protégés et, le cas échéant, restaurés.