14ème législature

Question N° 3657
de M. Jean Launay (Socialiste, républicain et citoyen - Lot )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Finances et comptes publics
Ministère attributaire > Finances et comptes publics

Rubrique > impôts et taxes

Tête d'analyse > fraude fiscale

Analyse > optimisation fiscale. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 18/02/2016
Réponse publiée au JO le : 18/02/2016 page : 1357

Texte de la question

Texte de la réponse

OPTIMISATION FISCALE


M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Jean Launay. Monsieur le ministre des finances, depuis 2012, notre majorité est engagée dans un combat important contre l'optimisation fiscale des multinationales. Ce combat, la France le mène dans toutes les instances internationales où elle siège ; elle est en train de le remporter.

Au mois d'octobre 2015, déjà, nous avions obtenu une grande victoire à l'OCDE. La fin de la récréation avait été sifflée, avec le remplacement de la concurrence entre États par la coopération fiscale. Fin janvier 2016, ce fut au tour de la Commission européenne de dévoiler un plan ambitieux visant à contraindre chaque multinationale à dévoiler ses résultats et ses charges, pays par pays. Comme l'a justement indiqué Pierre Moscovici, le commissaire en charge du dossier, l'optimisation abusive – qui n'est rien d'autre qu'une forme d'évasion – « prive les États de 50 à 70 milliards d'euros chaque année. »

Mme Karine Berger. Tout à fait !

M. Jean Launay. Ces pratiques doivent vivre leurs dernières heures.

Notre collègue Pascal Terrasse vient de remettre un rapport au Premier ministre, consacré à l'économie collaborative, dans lequel il rappelle que les plateformes doivent contribuer, à leur juste mesure, à la solidarité nationale. Si la question de la fiscalité des nouvelles activités économiques se pose pour les plateformes, une question plus générale se pose pour les grands groupes : celle de l'optimisation fiscale dont certains sont devenus experts. La question n'est pas tant de faire payer des impôts à des entreprises qui se développent brillamment, que de savoir comment financer la vie quotidienne des Français, si les sources de financement sont déviées avant même l'entrée dans notre pays.

Oui, la gauche gouverne, oui, la lutte contre les abus de la finance et contre l'impunité fiscale est ouverte, oui, la voix de la France a été entendue. À ce stade du processus, que pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, de la lutte contre l'optimisation fiscale, et de ses résultats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député, vous dénoncez l'optimisation fiscale : chacun voit bien de quoi il s'agit. Des entreprises organisent, de manière souvent très complexe, un système qui leur permet non pas de payer moins d'impôts, mais de ne plus payer d'impôts nulle part, ni en France, ni ailleurs en Europe, ni même dans le monde ! Cette situation est insupportable.

Tout d'abord, elle est insupportable moralement : quand on a à payer des impôts, il faut payer ses impôts ! Ensuite, elle est insupportable économiquement, car cela crée des distorsions de concurrence entre les entreprises que je qualifierais d'honnêtes, qui payent des impôts en fonction de leurs bénéfices, et celles qui font tout pour éviter d'en payer. Enfin, ce n'est pas admissible aujourd'hui car tous les pays demandent des efforts à l'ensemble des contribuables pour lutter contre les déficits publics.

M. Bernard Accoyer. Qu'en est-il de l'optimisation façon Thévenoud ou Cahuzac ?

M. Michel Sapin, ministre. Vous l'avez souligné : depuis 2012, les gouvernements successifs de la France, avec l'appui constant de la majorité à l'Assemblée nationale, ont lutté pour mettre fin à cette optimisation, à tous les niveaux : mondial, européen, national. C'est d'abord au niveau du G20 que nous avons agi, lors du sommet de Los Cabos, qui a abouti au sommet d'Antalya, qui a eu lieu à la fin de l'année dernière. Tous les grands pays du monde ont ainsi adopté un corpus de principes pour lutter contre l'optimisation fiscale.

Au niveau national, dans la loi de finances pour 2015, nous avons adopté ce que l'on appelle le reporting pays par pays, c'est-à-dire la transparence de la situation des entreprises dans chacun des pays concernés, pour permettre aux administrations fiscales de faire leur travail. Nous sommes l'un des premiers pays à l'avoir fait.

M. Yves Censi et M. Bernard Accoyer. Cela n'a rien à voir avec l'optimisation fiscale ! Vous confondez !

M. Michel Sapin, ministre. À présent, c'est évidemment au niveau européen que nous agissons, car contre l'optimisation fiscale, il est inutile de se battre dans un seul pays. Vous avez souligné la qualité du travail accompli par Pierre Moscovici, commissaire européen chargé de ces questions. Il a déposé un certain nombre de propositions : je souhaite qu'avant la fin du premier semestre, nous les ayons toutes adoptées, afin que l'Europe se batte contre l'optimisation fiscale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)