14ème législature

Question N° 37733
de M. Serge Bardy (Socialiste, républicain et citoyen - Maine-et-Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Transports, mer et pêche
Ministère attributaire > Transports, mer et pêche

Rubrique > aquaculture et pêche professionnelle

Tête d'analyse > gestion

Analyse > pêche en eaux profondes. IFREMER. données statistiques.

Question publiée au JO le : 24/09/2013 page : 9887
Réponse publiée au JO le : 02/09/2014 page : 7451
Date de changement d'attribution: 10/04/2014

Texte de la question

M. Serge Bardy attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur le nombre de chalutiers de fond œuvrant à plus de 400 mètres, 500 ou 600 mètres de profondeur. La proposition de la Commission européenne propose une interdiction du chalutage de fond en eaux profondes pour les navires ciblant les espèces profondes, celles-ci étant définies par une liste annexée au règlement actuel ainsi qu'au futur règlement. Le rapporteur du dossier à la commission PECH du Parlement européen, le socialiste grec M. Arsenis, a quant à lui proposé une interdiction du chalutage profond sur la base d'une profondeur de 400 mètres, ce qui présente des avantages certains quant à la mise en œuvre et au contrôle du règlement. Il est aujourd'hui intéressant (et nécessaire) de saisir le système d'informations halieutiques (SIH) de l'Ifremer pour que soient extraites les données précises du nombre de navires œuvrant au-delà de 400 mètres de profondeur. La proposition de la Commission européenne comme celle de M. Arsenis ne concernent que les engins suivants : chaluts de fond et filets maillants de fond. Cette requête ne concerne donc que ces méthodes de pêche. Il serait bon d'anticiper la discussion qui peut avoir lieu sur le seuil à retenir pour l'application de l'interdiction de ces méthodes de pêche dans le cadre d'une recherche de compromis au Parlement européen ou au Conseil. Il semble aussi important de connaître le nombre de navires (chaluts de fond et filets maillants de fond) pêchant au-delà de 500 m de profondeur et au-delà de 600 mètres de profondeur. Il serait également indispensable, pour pouvoir se faire une idée précise des activités de pêche, de connaître la composition des captures réalisées par les navires au-delà de ces différents seuils (liste des espèces commercialisées et des espèces rejetées) et de connaître le volume que représentent les différentes espèces dans les captures. Parce que les données du SIH sont anonymes, la réponse à ces questions ne posera donc aucun problème de confidentialité. Aussi, il lui demande de synthétiser les renseignements demandés ci-dessus et ceux qui existent par ailleurs déjà dans le SIH.

Texte de la réponse

Dans le cadre de la révision du régime de gestion de la pêche profonde, l'attention du secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie chargé des transports, de la mer et de la pêche est appelée sur la pêche profonde. Il existe depuis 2002 un régime d'encadrement de la pêche des espèces d'eau profonde adopté par l'Union européenne (UE). Ce régime d'encadrement de cette activité a mis en place des quotas de pêche, des limitations de l'effort de pêche, un renforcement des contrôles et un effort de collecte de données pour améliorer la connaissance des stocks halieutiques concernés. Cet encadrement a porté ses fruits s'agissant de la santé des stocks halieutiques. Les stocks de poissons de l'Atlantique nord-est sont évalués, selon un processus strict et rigoureux, par le Conseil international pour l'exploitation de la mer (CIEM), qui est l'organisme scientifique indépendant et compétent pour l'Atlantique nord-est. Il regroupe plus de 4 000 scientifiques provenant d'environ 300 instituts, avec environ 1 600 scientifiques participant annuellement aux travaux. Parmi plus d'une centaine de stocks évalués régulièrement, cet organisme dispose d'une compétence reconnue sur les espèces en eaux profondes. Les derniers avis du CIEM sur ces espèces datent de mai 2014 et sont encourageants, notamment pour le sabre noir, la lingue bleue et le grenadier de roche qui sont les trois principales espèces exploitées par les pêcheries françaises. Ils s'inscrivent dans la tendance positive des avis précédents de juin 2012 sur l'état de ces stocks. Plus généralement, la Commission européenne indiquait le 26 juin dernier au Conseil des ministres de la pêche de l'UE que : « une diminution de la surpêche a été enregistrée dans les eaux européennes de l'océan Atlantique, en mer du Nord et en mer Baltique ». Ainsi, 6 % des stocks étaient pêchés durablement en 2005, 28 % en 2010 et 59 % en 2014. Le CIEM a également de confirmé, le 11 décembre dernier, que le taux d'exploitation (la mortalité par pêche) pour l'ensemble des stocks de poissons a significativement baissé depuis dix ans dans les eaux de l'Atlantique nord-est. L'adoption en 2013 d'une nouvelle politique commune de la pêche permettra de conforter ces progrès afin de parvenir ou de rester à l'objectif de restauration des stocks permettant leur exploitation maximale durable, à savoir l'atteinte du rendement maximum durable (RMD). L'élimination progressive des rejets de poissons fait également partie des objectifs de cette nouvelle politique commune des pêches. Afin d'améliorer encore la gestion des pêcheries des stocks d'eau profonde, un renforcement de l'encadrement règlementaire est en cours de discussion, sur la base d'une proposition présentée par la Commission européenne en juillet 2012. Cette proposition comprend de nombreuses dispositions visant à renforcer l'encadrement de ces pêcheries, dont l'interdiction du chalut et des filets maillants profonds, et à améliorer la connaissance des stocks d'eau profonde. Le Parlement européen, qui est co-législateur avec le Conseil sur ce texte, a effectué un examen très approfondi de la proposition de la Commission européenne et a procédé à de nombreuses auditions. Par l'adoption du rapport de sa Commission pour la pêche le 4 novembre, à l'unanimité moins 4 abstentions, puis par son vote en séance plénière le 10 décembre, le Parlement européen a confirmé le principe de nombreuses propositions de la Commission, affirmant ainsi le besoin de renforcer la protection des écosystèmes marins vulnérables et d'augmenter les connaissances scientifiques. Mais il n'a pas souhaité retenir l'interdiction a priori du chalut profond et du filet maillant profond. Il a souhaité qu'une évaluation du règlement qui serait adopté soit effectuée 4 ans après son entrée en vigueur, sur la base de laquelle une nouvelle proposition pourrait si nécessaire être effectuée en intégrant des dispositions sur les engins. À l'instar du Parlement européen, le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche considère qu'il faut renforcer l'encadrement de la pêche profonde, dans le cadre d'une approche écosystémique, pour mieux protéger les écosystèmes marins vulnérables (EMV), tout en prenant en compte l'impact socio-économique de ces mesures. En effet, cette pêcherie est importante pour la Bretagne (ports de Lorient, Concarneau, Le Guilvinec) et le Nord-Pas-de-Calais (port de Boulogne-sur-Mer). Les navires qui seraient affectés par le règlement proposé, selon les termes de la profondeur et des captures, sont en nombre très important. Dans ce cadre, la volonté de transparence du Gouvernement a abouti à la publication des informations disponibles concernant la pêcherie profonde française sur le site internet du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie (http ://www. developpement-durable. gouv. fr/Reglementation-applicable-aux,40035. html) ainsi que sur le site de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (liens référencés sur le site du MEDDE). Par ailleurs, les apports de ces espèces constituent une part non négligeable du chiffre d'affaires des halles à marées concernées (24 % de la valeur des ventes totales à Lorient par exemple). De ce point de vue, accepter une mesure qui viserait à interdire purement et simplement l'utilisation de certains engins et notamment le chalut de fond serait problématique. En outre, une telle mesure n'est recommandée ni par les organisations internationales, ni par les conclusions du projet scientifique européen Deepfishman financé par la Commission européenne à hauteur de 3,7 millions d'euros, et qui a réuni 13 organismes scientifiques. Dans le droit fil de ces conclusions, le Gouvernement plaide pour un gel de l'empreinte écologique en limitant la pêche profonde aux zones actuellement pêchées et pour la mise en place, le cas échéant, de mesures de gestion spatiotemporelles (mesures d'évitement) pour protéger les éventuels écosystèmes marins vulnérables présents dans les zones de pêche. Le vote au Parlement européen a été une étape importante. Les discussions se déroulent désormais au sein du Conseil des ministres de l'UE. Dans ce cadre, les discussions techniques qui se sont tenues tout au long du premier semestre de 2014 ont montré que les positions de la France sur ce dossier étaient partagées par de nombreux autres États membres notamment concernant le gel de l'empreinte comme mécanisme alternatif et efficace de protection des EMV profonds. Le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche continuera dans les mois à venir à participer activement à ces travaux et à défendre une approche équilibrée et ambitieuse permettant de mieux connaitre et de mieux encadrer la pêche des stocks d'eau profonde.