14ème législature

Question N° 38972
de M. Antoine Herth (Union pour un Mouvement Populaire - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > plans de prévention des risques

Analyse > contenu. conséquences. riverains.

Question publiée au JO le : 01/10/2013 page : 10268
Réponse publiée au JO le : 14/01/2014 page : 455

Texte de la question

M. Antoine Herth attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur le problème posé par l'impact des mesures pouvant être contenues dans un plan de prévention des risques naturels (PPRN). Si la finalité d'un PPRN, à savoir assurer la sûreté des habitants concernés face aux risques d'une catastrophe naturelle potentielle, est en soi parfaitement louable et légitime, il n'en demeure pas moins que les mesures qu'il contient impactent fondamentalement le quotidien des habitants concernés. D'une part, les prescriptions contenues dans un PPRN affectent directement la valeur de leurs biens immobiliers et, d'autre part, elles peuvent aussi, le cas échéant, imposer des travaux aux propriétaires. Ces conséquences pour les habitants sont certes variables selon le zonage défini par le PPRN, mais sont particulièrement lourdes lorsque le bien immobilier est situé dans une zone où le risque naturel est supposé élevé. Elles sont d'autant moins bien acceptées par les habitants concernés que ces derniers souffrent d'un cruel manque d'information. De nombreux habitants apprennent ainsi seulement l'existence du risque naturel auquel ils sont exposés lors de l'enquête publique précédant la mise en place du PPRN. Dans le cas du risque inondation, par exemple, il est fréquent que de nombreux habitants s'interrogent sur la légitimité d'un PPRN : alors même qu'ils habitent depuis plusieurs décennies dans des zones à risque élevé au regard du PPRN, ils n'ont jamais été victimes d'inondation et la « mémoire collective » ne garde souvent aucune trace d'une éventuelle catastrophe de grande ampleur. De même, cette situation est d'autant plus mal vécue par les habitants concernés que la perte de valeur du bien immobilier est immédiate : un propriétaire ayant par exemple construit sa maison quelques mois avant la mise en place du PPRN voit la valeur de sa maison instantanément dépréciée. Face à ce problème, qui concerne potentiellement plusieurs millions de nos concitoyens, il souhaiterait qu'il lui rappelle les mesures d'indemnisation prévues par les textes et les modalités concrètes de leur mise en œuvre, tant en ce qui concerne la prise en compte du risque auquel un bien immobilier est soumis dans l'estimation de sa valeur locative servant de base au calcul des taxes locales, qu'en ce qui concerne les modalités d'intervention du fonds de prévention des risques majeurs (« fonds Barnier »). Sur ce dernier point, il souhaiterait qu'il lui précise s'il ne serait pas envisageable d'étendre le champ d'intervention de ce fonds, afin qu'il puisse, par exemple lors d'une transaction immobilière concernant ce bien immobilier, compenser la perte de valeur du bien en question. Il souhaiterait, enfin, qu'il lui précise les mesures qu'il compte prendre pour améliorer l'information de nos concitoyens sur les risques potentiels auxquels ils sont exposés. À cet égard, plusieurs documents non opposables légalement existent, dont des cartes, notamment sur des sites internet officiels, mais ne sont pas connus du grand public. Si l'obligation de recourir à une enquête publique constitue en soi une avancée fondamentale et appréciable, force est cependant de constater qu'elle intervient à un stade et dans des délais brefs qui ne permettent que difficilement aux populations de s'approprier pleinement les enjeux du problème.

Texte de la réponse

Il résulte des articles L. 562-1 à L. 562-9 du code de l'environnement que le plan de prévention des risques naturels a pour objet d'établir des règles de prévention, d'urbanisme et de construction selon la nature et l'intensité des risques naturels, afin de maîtriser l'urbanisation dans les zones à risques et de réduire la vulnérabilité des populations et des biens existants. Il vaut servitude d'utilité publique et il est annexé au plan local d'urbanisme des communes concernées. Le plan de prévention des risques naturels (PPRN) constitue la contrepartie du système d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles mis en place par la loi du 13 juillet 1982 (article L. 125-1 et suivants du code des assurances) et fondé sur le principe de la solidarité nationale. La garantie des catastrophes naturelles est ainsi obligatoirement accordée dans les contrats d'assurance de dommages, et ce quelque soit l'intensité du risque naturel auquel est exposée l'habitation. En contrepartie de ce système d'indemnisation basé sur la solidarité nationale, l'État a la responsabilité d'élaborer des PPRN afin de réduire la vulnérabilité des biens et des personnes face aux risques naturels. Les modalités de la concertation et de l'association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés sont précisées dans l'arrêté préfectoral de prescription du PPRN, conformément aux articles L. 562-3 et R. 562-2 du code de l'environnement. La concertation et l'association des collectivités et des établissements publics de coopération intercommunale concernés doivent donc être organisées tout au long de la procédure d'élaboration du PPRN. Selon l'article R. 562-7 du code de l'environnement, le projet de PPRN est soumis à l'avis des conseils municipaux des communes et des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour l'élaboration des documents d'urbanisme dont le territoire est couvert, en tout ou partie, par le PPRN. Enfin, conformément à l'article R. 562-8 du code de l'environnement, le projet de PPRN est soumis par le préfet à une enquête publique, les avis des conseils municipaux et des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale compétents étant consignés ou annexés aux registres d'enquête. De plus, les maires des communes sur le territoire desquelles le PPRN doit s'appliquer sont entendus par le commissaire enquêteur ou par la Commission d'enquête, une fois consigné ou annexé aux registres d'enquête l'avis des conseils municipaux. En complément de ces mesures d'association obligatoires, le préfet peut prévoir des modalités complémentaires d'association des élus et de la population concernés, par exemple sous la forme de réunions publiques d'informations et, ce dès avant le lancement de l'enquête publique. Le PPRN précise, sur la base de l'évaluation des risques, les règles s'appliquant sur le territoire exposé aux risques. Il définit les conditions de réalisation de tout projet, les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui incombent aux particuliers ou aux collectivités, mais aussi les mesures applicables aux biens et activités existants. Les dispositions réglementaires ont pour objectifs d'une part d'améliorer la sécurité des personnes, d'autre part de réduire la vulnérabilité des biens et des activités. Si le PPRN peut donc définir des mesures de réduction de la vulnérabilité des biens existants, seules pourront être rendues obligatoires celles dont le coût reste inférieur à 10 % de la valeur vénale ou estimée de ces biens, conformément à l'article R. 562-5 du code de l'environnement, afin de ne pas créer de charge financière disproportionnée pour la personne à qui incombe la mesure. Par ailleurs, l'éventuelle dépréciation de la valeur vénale d'un bien résulte plus de son exposition à un risque naturel que de sa localisation sur un document administratif qui traduit le risque et rend la zone inconstructible dans un PPRN pour ne pas aggraver le nombre de biens et de personnes exposés. Selon la jurisprudence constitutionnelle et administrative, les servitudes d'utilité publique ne peuvent ouvrir droit à indemnisation, en l'absence de toute disposition législative expresse, que dans le cas où il en découlerait pour les personnes concernées une charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi, au titre de la rupture de l'égalité devant les charges publiques. S'agissant du PPRN, la jurisprudence existante tend à considérer que le préjudice résultant de la dépréciation éventuelle des biens suite à l'approbation du PPRN, ne fait pas supporter à ces propriétaires une charge anormale et spéciale, compte tenu de l'objectif d'intérêt général poursuivi par le PPRN, qui est celui de la sécurité des personnes et des biens.