14ème législature

Question N° 39937
de Mme Danielle Auroi (Écologiste - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > consommation

Tête d'analyse > sécurité des produits

Analyse > textiles.

Question publiée au JO le : 15/10/2013 page : 10684
Réponse publiée au JO le : 02/02/2016 page : 959
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

Mme Danielle Auroi attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les produits chimiques contenus dans les produits vestimentaires ou utilisés dans le cadre de leur fabrication. Une étude réalisée par une organisation non gouvernementale au cours de l'année 2012 a montré que de nombreux vêtements de grandes marques commercialisées en France contenaient des produits interdits par l'Union européenne dans les processus de fabrication. Ces produits sont utilisés dans des pays à la réglementation environnementale plus laxiste par des firmes qui commercialisent leurs produits dans les pays de l'Union européenne, contournant ainsi la législation européenne, et ces produits ont des conséquences pour l'environnement et pour la santé publique. Ainsi, l'étude a montré que des colorants azoïques se retrouvaient dans les vêtements et pouvaient être inhalés, ingérés ou incorporés. Ces colorants libèrent des amines susceptibles de provoquer des formes d'hyperactivité, de maladies métaboliques ou de cancer. De même, des éthoxylates de noxylphénol sont utilisés dans ces pays par des grandes marques vestimentaires. Ces composants se dégradent en nonylphénol, un perturbateur endocrinien déversé dans les eaux usées et s'accumulant sur les algues. Le nonylphénol atteint ensuite les poissons qui peuvent être consommés par l'homme, causant des cas de troubles de la fertilité. L'utilisation de ces produits pose une nouvelle fois la question de la responsabilité des sociétés implantées en Europe vis-à-vis de leurs filiales et de leurs sous-traitants, et des conséquences de ces activités dans les pays de fabrication comme chez les salariés et les consommateurs en France. Elle souhaite donc connaître les actions du Gouvernement afin que ce type de produits, perturbateurs endocriniens et agents cancérogènes identifiés, ne soient plus utilisés dans la fabrication de prêt-à-porter, ni dans aucun autre secteur dans lequel ils peuvent porter atteinte à la santé publique.

Texte de la réponse

Une organisation non gouvernementale a rendu public, en novembre 2012, un rapport réalisé dans 29 pays, sur 141 produits textiles fabriqués notamment en Chine, au Vietnam, en Malaisie et aux Philippines. Ces produits ont été soumis à des analyses ; parmi les substances dangereuses, ont été détectés des colorants azoïques, des éthoxylates de nonylphénol, qui se dégradent en nonylphénol, et des phtalates. Les professionnels responsables de la mise sur le marché de produits textiles sont soumis à une obligation générale de sécurité, telle que prévue à l'article L.221-1 du code de la consommation aux termes duquel « les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ». Plus spécifiquement en matière de produits chimiques, ils sont soumis au respect du règlement européen no 1907/2006 (dit Règlement REACH) concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances. En particulier, la restriction no 43 de l'Annexe XVII de ce règlement interdit l'utilisation des colorants azoïques, cancérogènes, dans les articles en tissu et en cuir en contact avec le corps humain. En raison de leur caractère extrêmement préoccupant pour l'environnement et perturbateur endocrinien, le nonylphénol et les éthoxylates de nonylphénol font l'objet d'une restriction analogue. S'agissant des colorants azoïques et des autres substances (comme des allergisants tels que le diméthylfumarate, le nickel) faisant aussi l'objet d'une restriction réglementaire au titre de REACH, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) mène très régulièrement des contrôles au niveau des articles textiles et en cuir (une enquête d'ampleur nationale par an), afin de vérifier la bonne application de la règlementation. Ces contrôles, menés en coopération avec les services de la direction générale des douanes et droits indirects, portent notamment sur les moyens mis en œuvre par les professionnels pour s'assurer de la conformité de leurs produits (rapports d'analyses effectuées selon des méthodes définies, attestations des fournisseurs certifiant que les articles livrés ne sont pas teints à l'aide de colorants azoïques interdits) et impliquent, par ailleurs, des prélèvements d'articles pour analyses chimiques. Les résultats de ces contrôles indiquent que les manquements à la réglementation sont marginaux. Ainsi depuis 2011, après l'émergence de nombreux cas d'allergie dus au diméthylfumarate (DMFu) les années précédentes, et alors que les prélèvements ont ciblé des produits suspectés d'être non conformes, un seul cas de présence de cette substance a été signalé parmi plusieurs centaines de prélèvements effectués. Par ailleurs, ces derniers démontrent que la présence de colorants azoïques demeure relativement rare (de l'ordre de 2% des produits testés). Sur l'exercice 2013, l'enquête nationale sur les articles textiles, ayant conduit à prélever plus de 150 vêtements (adultes et enfants), démontre la même tendance : les analyses en laboratoire n'ont pas permis de détecter des non-conformités au règlement REACH en matière de colorants azoïques, de DMFu ou de nickel. Ces résultats ont été confirmés en 2014. En outre, sur la base des plaintes de consommateurs dont elle a eu la connaissance, la DGCCRF a réalisé en 2012 deux enquêtes ayant donné lieu à des tests relatifs à la présence de chrome VI dans des articles en cuir, l'une sur les articles chaussants, l'autre sur les gants de jardinage. En raison de la présence excessive de chrome VI, désormais inscrit à l'annexe XVII du règlement REACH, susceptible d'entraîner des réactions cutanées chez les consommateurs, ces enquêtes ont conduit au retrait de produits vestimentaires. Enfin, à la suite de l'effondrement de l'usine textile de Rana Plaza au Bangladesh en 2013 et à de nombreux autres sinistres dans la filière textile (accidents, incendies, pollution, maltraitance des travailleurs), le Gouvernement avait saisi le point de contact national (structure tripartite composée des syndicats, des entreprises et de l'administration) pour la mise en oeuvre des principes directeurs de l'organisation de coopération et de développement économiques pour la filière textile-habillement. Le rapport qui a été produit dans ce contexte a été rendu public le 2 décembre 2013 et fait plusieurs recommandations concernant la prise en compte des risques dans le secteur du textile. D'une façon générale, il est constaté que la mobilisation des industriels du textile sur les dangers des colorants se renforce. A titre d'exemple, les entreprises adhérentes au programme « fibre citoyenne » s'engagent à respecter des critères environnementaux sur l'ensemble des filières de production et à respecter impérativement, quel que soit le lieu de l'activité de l'entreprise ou de ses fournisseurs, la réglementation en vigueur.