14ème législature

Question N° 42808
de M. Christian Estrosi (Union pour un Mouvement Populaire - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > impôts et taxes

Tête d'analyse > évasion fiscale

Analyse > rapport. propositions.

Question publiée au JO le : 19/11/2013 page : 11952
Réponse publiée au JO le : 07/01/2014 page : 169

Texte de la question

M. Christian Estrosi interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la proposition formulée dans le rapport intitulé « Évasion des capitaux et finance : mieux connaître pour mieux combattre » de la commission d'enquête sénatoriale sur le rôle des banques et acteurs financiers dans l'évasion des ressources financières consistant à étendre l'obligation de déclaration de soupçon à Tracfin aux employés des personnes assujetties. Il lui demande son avis sur cette proposition et le cas échéant dans quels délais elle pourrait être mise en œuvre.

Texte de la réponse

La progression constante, ces dernières années, du nombre de déclarations de soupçon adressées au traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) par les professionnels assujettis au dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LAB/FT) témoigne de ce que le système français, depuis sa mise en place en 1990, a progressivement trouvé des modalités de fonctionnement et un équilibre satisfaisants (18 000 déclarations de soupçon adressées à TRACFIN en 2009, 27 000 en 2013). Au 1er décembre 2013, 17 catégories de professionnels, du secteur financier comme non financier, mentionnées à l'article L. 561-2 du code monétaire et financier, sont tenues d'exercer des obligations de vigilances particulières sur les flux financiers dont elles ont à connaître, et d'adresser des déclarations de soupçon à TRACFIN en cas de doute sur l'origine des capitaux. Ce sont ainsi plus de 180 000 personnes physiques et morales qui sont assujetties sur le territoire national au dispositif LAB/FT. Dans ce cadre, il est prévu que les professionnels du chiffre et du droit visés à l'article L. 561-2 du code monétaire et financier (12° et 13° ) s'acquittent personnellement de l'obligation de déclaration (tels les commissaires aux comptes, les experts comptables, les notaires, les huissiers de justice, etc.). En revanche, les autres professionnels (établissements de crédit, de paiement, entreprises d'assurance, mutuelles, etc.) doivent communiquer à TRACFIN l'identité de leurs dirigeants ou préposés habilités à procéder aux déclarations de soupçon. La responsabilité du contenu d'une déclaration de soupçon et des réponses aux demandes de TRACFIN incombe donc à des personnes situées à un niveau hiérarchique élevé dans l'établissement concerné (dirigeants ou préposés). Ce système apparaît ainsi protecteur des employés des personnes assujetties qui, s'ils doivent exercer des obligations de vigilance dans les relations d'affaire avec les clients, ne sont ni déclarants ni correspondants auprès de TRACFIN, et ne voient donc pas leur responsabilité directement engagée en cas de défaillance éventuelle au regard du dispositif LAB/FT, de la personne morale à laquelle ils appartiennent. Pour autant, les hypothèses de dysfonctionnements internes aux établissements ou de conflits d'intérêts (par exemple, des doutes qui existeraient sur un dirigeant ou un préposé de la personne morale assujettie) ne doivent pas être négligées. L'article R. 561-23 du code monétaire et financier permet d'ores et déjà à tout dirigeant ou préposé d'une personne morale assujettie au dispositif LAB/FT, de prendre l'initiative de déclarer lui-même à TRACFIN une opération lui paraissant devoir l'être, sous réserve que cette déclaration soit ensuite confirmée, dans les meilleurs délais, par la personne habilitée. Mais cette dérogation est limitée aux cas d'urgence. Les situations particulières évoquées ci-dessus pourraient dès lors justifier une adaptation des dispositions relatives aux personnes habilitées à effectuer une déclaration de soupçon pour permettre, de façon strictement encadrée et limitée, et au-delà de la situation d'urgence, aux employés des professionnels concernés, d'adresser directement une telle déclaration. Le dispositif LAB/FT actuel s'appuie sur la directive n° 2005/60/CE du 26 octobre 2005 (appelée « troisième directive anti-blanchiment »), transposée en France par l'ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009, et repose sur une vision européenne harmonisée du fonctionnement d'une cellule de renseignement financier. Il serait donc préférable qu'un élargissement du dispositif soit préalablement adopté au niveau européen. Cependant, la France pourrait examiner l'opportunité de préciser son cadre législatif dans le domaine de la déclaration de soupçon au moment des travaux de transposition de la quatrième directive anti-blanchiment dont les négociations sont en cours de finalisation au niveau européen.