14ème législature

Question N° 4302
de Mme Barbara Pompili (Écologiste - Somme )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > système pénitentiaire

Tête d'analyse > détenus

Analyse > placements extérieurs. suivi. financement.

Question publiée au JO le : 11/09/2012 page : 4984
Réponse publiée au JO le : 25/12/2012 page : 7917

Texte de la question

Mme Barbara Pompili attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation du secteur associatif socio-judiciaire, notamment les associations de placement extérieur. L'administration pénitentiaire semble s'engager dans une réforme du mode de financement en optant pour la passation de marchés publics. Le caractère éminemment social de l'activité de placement extérieur repose sur des éléments fondamentaux (relation partenariale forte, souplesse de la mesure, notion de parcours...) qui pourraient être remis en cause par le recours à la commande publique. Ce dernier risquant de toute évidence d'exclure les associations, qui pourtant sont les premières à avoir identifié le besoin et créé des réponses innovantes, et ne sauraient être réduites à un simple rôle de prestataires de services. Elle souhaite donc lui demander si le principe de subvention demeure la règle et s'il est prévu de clarifier le cadre des modes de financement de ces associations.

Texte de la réponse

Par sa circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012, la garde des sceaux, ministre de la justice, a montré l'attachement qu'elle portait au développement des aménagements de peines, et notamment à cette mesure d'accompagnement global que constitue le placement à l'extérieur. Cette mesure comprend en effet un hébergement, en général dans un foyer du type centre d'hébergement de réinsertion sociale (CHRS), parfois dans un établissement spécialement conçu qui n'accueille que des condamnés, et un encadrement socio-éducatif mis en oeuvre par les travailleurs sociaux de l'association gestionnaire, en lien avec le SPIP. Elle a pour objet de favoriser l'insertion sociale, comprend une aide à la recherche d'emploi, propose parfois un emploi, et permet une incitation aux soins selon les cas, et ce, hors détention. C'est la raison pour laquelle la garde des sceaux a tenu à maintenir le budget alloué au financement des placements à l'extérieur en 2013. Actuellement, l'administration, au niveau local (direction interrégionale ou directeur départemental), conventionne avec des organismes, sur la base d'un nombre de places et d'un prix de journée, qui s'ajoute souvent à une dotation globale de fonctionnement quand il s'agit de centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). Ces prestations et leur coût ont été définis sur la base d'un travail sur les « cahiers des charges » effectués ces dernières années avec les deux grandes fédérations d'associations qui mettent en oeuvre ces mesures : Citoyen et Justice, d'une part, et la Fédération nationales des associations de réinsertion sociale (FNARS) d'autre part. En l'état du recensement, sur 151 organismes conventionnés, tous sont des associations, dont une est une émanation du groupe SODEXO et un seul n'est pas une association, la société GEPSA. Tous deux sont cocontractants de l'administration pénitentiaire dans les établissements pénitentiaires en gestion déléguée. Jusqu'à présent, le financement de ces mesures était donc réalisé de façon « classique », sur la base de conventions avec les associations. En décembre 2011, le ministère de l'économie et des finances a toutefois fait savoir à l'administration pénitentiaire que « les activités des associations socio-judiciaires dans le cadre du placement à l'extérieur de détenus » relevaient du code des marchés publics, estimant que ces associations sont des « opérateurs économiques publics ou privés », organismes obligatoirement soumis au code des marchés publics, sur la base d'une jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes et du conseil d'état relative à la définition de ces opérateurs, résultant de la directive du 31 mars 2004 « relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ». Les associations et fédérations d'associations - seuls opérateurs qui aujourd'hui mettent en oeuvre les placements à l'extérieur - contestent cette interprétation de la jurisprudence, et juridiquement, estiment que cette activité ne relève pas obligatoirement du code des marchés public. Le précédent garde des sceaux avait néanmoins demandé à l'administration pénitentiaire de travailler à la mise en oeuvre d'appels à projets conformément au code des marchés publics. Une seule expérimentation a été menée, dans l'Isère, qui a été interrompue du fait de difficultés extérieures à cette problématique. A la demande de la garde des sceaux, ministre de la justice, les services de l'administration pénitentiaire procèdent à une nouvelle étude des modes de financements possibles de cette mesure. Elle souhaite notamment que les avantages et les inconvénients de chacune des modalités de financement soient identifiés. En effet, la mesure de placement à l'extérieur a été historiquement portée par le secteur associatif qui a développé une expertise importante en la matière. En outre, l'intervention de ces associations sur l'ensemble du champ de la prise en charge tant de publics concernés par des procédures judiciaires que de publics relevant de dispositifs de droit commun concourt à la mise en oeuvre de compétences professionnelles élargies. La mixité des publics dans nombre des établissements est aussi un facteur favorisant l'insertion par le retour au droit commun. Enfin, de façon générale, la présence d'associations concourant à la mission de service public de la justice sur le champ de l'exécution des peines est le gage du maintien d'une intervention citoyenne, parfois bénévole, que la ministre estime essentielle à notre société. La question de la récidive et de la réinsertion des condamnés qui se sont acquittés de leur dette ne doit pas être du ressort de la seule administration et de prestataires de services du secteur privé. Dans l'hypothèse où la procédure de marché public serait juridiquement incontournable, la garde des sceaux a demandé à ses services de travailler aux conditions de sa mise en oeuvre, et notamment aux contenus des appels d'offres. En effet, les critères de sélection des offres étant élaborés par le pouvoir adjudicateur, la compétence des prestataires en matière de suivi et d'accompagnement des personnes devrait être particulièrement valorisée. Les associations pourraient alors faire valoir leur savoir-faire spécifique au sein de leurs offres.