14ème législature

Question N° 434
de M. Jean-Jacques Candelier (Gauche démocrate et républicaine - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > travail

Tête d'analyse > grèves

Analyse > service minimum. réquisition.

Question publiée au JO le : 03/07/2012 page : 4277
Réponse publiée au JO le : 09/10/2012 page : 5557
Date de changement d'attribution: 28/08/2012

Texte de la question

M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur un avis de l'Organisation internationale du travail (OIT) quant à l'application d'un dispositif de réquisition des salariés. Au moment du mouvement contre la réforme des retraites, le Gouvernement s'était appuyé sur l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales pour contraindre, par arrêté préfectoral, certains salariés en grève dans les dépôts pétroliers à reprendre le travail. L'exécutif mettait en avant le maintien de l'ordre et de la sécurité publique. La CGT, dénonçant une lecture trop permissive du droit débouchant sur une atteinte au droit de grève, avait en février porté l'affaire devant l'OIT. Au terme d'un débat juridique subtil et complexe, autour notamment de la définition des services dits « essentiels » qui ouvrent droit à des réquisitions (santé, police, etc.), le comité de liberté syndicale de l'OIT, dans un avis adopté le 17 novembre, demande au Gouvernement « de privilégier à l'avenir, devant une situation de paralysie d'un service non essentiel mais qui justifierait l'imposition d'un service minimum de fonctionnement, la participation des organisations de travailleurs et d'employeurs concernées à cet exercice, et de ne pas recourir à l'imposition de la mesure par voie unilatérale ». Il lui demande ainsi s'il compte donc arrêter toute utilisation discrétionnaire des réquisitions dans les secteurs non-essentiels.

Texte de la réponse

A la suite de la plainte de la Confédération générale du travail (CGT) contre le gouvernement français, dénonçant les réquisitions de personnels dans le secteur pétrolier lors d'un mouvement de protestation d'octobre 2010 contre la réforme des retraites, et après avoir pris en considération les observations du gouvernement français fournies le 3 juin 2011, le Comité de la liberté syndicale de l'organisation internationale du travail a adressé le 17 novembre 2011 une recommandation au Gouvernement. Selon l'analyse du Comité, les installations pétrolières ou encore la production, le transport et la distribution de combustibles ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire des services dont l'interruption met en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne et dans lesquels le droit de grève peut être restreint, voire interdit. Par suite, le Comité a demandé « de privilégier à l'avenir, devant une situation de paralysie d'un service non essentiel mais qui justifierait l'imposition d'un service minimum de fonctionnement, la participation des organisations de travailleurs et d'employeurs concernées à cet exercice, et de ne pas recourir à l'imposition de la mesure par voie unilatérale ». Le Gouvernement, qui doit veiller au respect du droit de grève d'une part et au maintien de l'ordre public d'autre part, deux principes à valeur constitutionnelle, s'emploie à l'instauration d'un dialogue social de qualité de nature à prévenir les conflits sociaux et l'adoption de mesures unilatérales. Telles sont les orientations qui sont données aux préfets. D'ailleurs, le recours à la réquisition, ouvert par le 4° de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, ne peut être mis en oeuvre qu'à titre exceptionnel, en cas d'urgence, si des conditions d'atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la salubrité publiques et si les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient le pouvoir de police. La réquisition, en dernier recours et non pas discrétionnaire, est donc subordonnée à la nécessité du maintien de l'ordre public, au principe de proportion (durée de la réquisition et effectifs requis, du reste de préférence parmi les volontaires, limités) et à l'absence de solution alternative. Le respect de l'ensemble de ces conditions fait l'objet d'un contrôle juridictionnel strict. Les réquisitions qui ont été ponctuellement effectuées en octobre 2010 ont concerné des secteurs géographiques et professionnels extrêmement limités afin de limiter les troubles graves à l'ordre public résultant d'une grève prolongée des salariés. Leur bien-fondé et leur légalité ont été validés par les juridictions administratives. Depuis cette période, la France n'a pas connu une nouvelle situation de paralysie d'un service non essentiel selon la terminologie précitée et n'a pas eu, dès lors, à mettre en oeuvre la recommandation émise par le Comité de la liberté syndicale.