Question de : M. Gwendal Rouillard
Morbihan (5e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Gwendal Rouillard attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur la directive européenne relative aux travailleurs détachés. L'Union européenne repose, depuis son origine, sur 4 grands principes généraux, dont la libre circulation des personnes et des travailleurs. La directive n° 96/71 a défini les conditions liées à cette liberté pour les employés détachés au sein d'un autre pays de la Communauté. Pour éviter les situations de dumping social, elle prévoit notamment une rémunération des salariés conforme à la législation du pays d'accueil, sauf à ce que les règles du pays d'origine soient plus favorables. Malgré tout, on constate dans la pratique que les normes encadrant le détachement de salariés sont souvent contournées, permettant l'usage d'une main-d'œuvre bon marché et plus malléable dans les pays de l'ouest. Le Comité économique et social européen a alerté la Commission sur ce phénomène et l'a invitée à s'emparer du sujet afin de promouvoir des conditions de travail minimales et dignes dans l'ensemble des États. Les vingt-sept étudient actuellement la question afin de trouver des solutions aux abus constatés dans la réalité mais l'existence de deux camps parmi eux n'a pas permis pour le moment d'aboutir à un compromis et à une amélioration de la législation européenne, chaque pays défendant ses intérêts. Tous les domaines d'activité sont concernés même si certains sont davantage touchés, comme le bâtiment où l'on estimait le nombre de travailleurs détachés à 250 000 personnes fin 2012 pour un total d'un million tous secteurs professionnels confondus. Il lui demande ainsi les moyens que la France met en œuvre pour favoriser une évolution de la législation européenne et l'émergence d'une Europe unie et protectrice de ses salariés et ses entreprises.

Réponse publiée le 14 janvier 2014

Après des mois de négociations difficiles, les ministres du travail de l'Union européenne ont trouvé lundi 9 décembre à Bruxelles un accord satisfaisant et ambitieux conforme à la position défendue avec constance par la France. Le gouvernement a toujours soutenu lors des négociations une position ferme pour renforcer les contrôles et le respect des règles de détachement, afin de lutter plus efficacement contre le dumping social. Deux avancées majeures étaient attendues, que l'accord trouvé garantit. Le gouvernement a obtenu, d'abord, que la liste des documents exigibles auprès des entreprises en cas de contrôle soit une liste ouverte. La France fixera donc par la loi nationale la liste des documents exigibles pour tous les travailleurs détachés en France. La directive permettra également d'imposer des règles dans les pays qui en étaient dépourvus. Pour favoriser la sécurité juridique de ce nouveau cadre, la Commission et les autres Etats devront être informés des documents exigibles dans chaque pays. Ensuite, le gouvernement a obtenu la responsabilisation des entreprises donneuses d'ordres du secteur du bâtiment et des travaux publics vis-à-vis de leurs sous-traitants, obligatoirement et dans tous les Etats, sans seuil d'application, sous la forme d'une responsabilité solidaire ou, le cas échéant, via un mécanisme de sanctions équivalentes du donneur d'ordre. Il sera désormais possible d'établir une chaîne de responsabilités pour lutter plus efficacement contre la fraude et plus largement contre les montages frauduleux. Cette directive protégera également les travailleurs détachés dont les droits seront davantage respectés, ainsi que les travailleurs français qui ne subiront pas une concurrence déloyale, tout comme les entreprises qui respectent les règles. Le gouvernement a ainsi démontré, par sa fermeté comme par sa capacité de négociation, que l'Europe peut avancer sur des propositions sociales ambitieuses. Ceci marque un progrès pour la défense de notre modèle social, pour la défense des travailleurs et pour le refus du dumping social. La plus extrême vigilance doit continuer à s'exercer sur le sujet car cet accord entre les Etats membres ne marque pas la fin de la procédure. Il est en effet nécessaire désormais que le Conseil et le Parlement européen parviennent à un texte. Le soutien des parlementaires européens à nos vues devrait y contribuer. Le gouvernement agit également au niveau national. Un plan de lutte contre les détournements de la directive sur le détachement des travailleurs a été présenté mercredi 27 novembre en Conseil des ministres : - le programme de contrôles de l'inspection du travail et des autres services compétents de l'État sera intensifié et ciblera les principaux secteurs où les dérives sont constatées ; - dans les principales branches concernées, l'engagement des partenaires sociaux aux côtés des administrations de contrôle sera matérialisé par des conventions de partenariat. Le travail entrepris avec plusieurs professions en 2013 sera étendu ; - l'arsenal législatif national sera complété pour davantage responsabiliser les maîtres d'ouvrage et les donneurs d'ordre quand ils recourent à des sous-traitants multiples et permettre aux organisations professionnelles et syndicales de se constituer parties civiles en cas de travail illégal. Le gouvernement continuera à porter cette ambition sociale pour l'Europe, notamment sur la question du salaire minimum. Dans ce cadre, la mise en place d'un salaire minimum dans tous les Etats membres est indispensable. Le gouvernement se félicite à cet égard de la mention dans l'accord de coalition de la mise en place d'un salaire minimum en Allemagne.

Données clés

Auteur : M. Gwendal Rouillard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Affaires européennes

Ministère répondant : Affaires européennes

Dates :
Question publiée le 3 décembre 2013
Réponse publiée le 14 janvier 2014

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