14ème législature

Question N° 45775
de M. Benoist Apparu (Union pour un Mouvement Populaire - Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > professions judiciaires et juridiques

Tête d'analyse > experts

Analyse > régime fiscal.

Question publiée au JO le : 10/12/2013 page : 12812
Réponse publiée au JO le : 04/02/2014 page : 1074

Texte de la question

M. Benoist Apparu appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le régime fiscal de TVA des experts psychiatres judiciaires. En effet, l'ANPEJ (Association nationale des psychiatres experts judiciaires) s'inquiète des conséquences statutaires pour les experts psychiatres judiciaires de l'application des mesures immédiates d'harmonisation européenne. À partir du 1er janvier 2014, toutes les expertises médicales judiciaires seront assujetties à la TVA. Les experts psychiatres se trouveront alors dans une position d'assujettissement à la TVA tout en relevant, d'après les textes réglementaires de cotisations sociales, du régime général d'assurance-maladie. Alors considérés pour les cotisations sociales comme des salariés en tant que collaborateurs occasionnels du service public, les experts psychiatres sont considérés par le ministère du budget comme ayant une activité libérale, avec assujettissement à la TVA. De surcroît, dans le champ pénal, pratique majoritaire des experts psychiatres judiciaires, le lien de subordination n'est pas reconnu par l'autorité ministérielle. Lorsqu'un expert psychiatre est requis, il ne peut s'opposer à la réquisition sous peine de sanctions pénales. La tarification des expertises psychiatriques est réglementaire, sans possibilité du choix de la personne à examiner, du lieu d'examen et dans des délais fixés par l'autorité judiciaire : tous ces éléments sont constitutifs d'un lien de subordination. Bien qu'un échange entre l'ANPEJ et le cabinet de Mme la garde des sceaux ait eu lieu afin de régulariser l'imbroglio fiscal des experts psychiatres, les professionnels restent à ce jour sans réponse claire. Dans ce cadre il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet.

Texte de la réponse

L'article 256 A du code général des impôts (CGI) prévoit que sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) les personnes effectuant une activité économique de manière indépendante quels que soient leur statut juridique, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. Or il ressort des conditions dans lesquelles les experts psychiatres collaborateurs occasionnels du service public exercent les missions qui leurs sont confiées, et notamment de la nécessaire impartialité à laquelle ils sont nécessairement tenus, qu'ils interviennent de manière indépendante au sens de ces dispositions. A cet égard, les sanctions pénales auxquelles ils s'exposent s'ils ne procèdent pas aux expertises judiciaires pour lesquelles ils sont requis ne traduisent pas l'exercice d'un pouvoir disciplinaire caractéristique d'un lien de subordination. Par ailleurs, le fait qu'ils soient, en matière sociale, rattachés au régime général de sécurité sociale est inopérant au regard de la qualification fiscale. Aussi, dès lors qu'ils exercent de manière indépendante une activité économique de prestataire de services contre rémunération, ces experts judiciaires ont bien la qualité d'assujettis à la TVA. Par ailleurs, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) seules les prestations ayant une finalité thérapeutique entendue comme visant à protéger, maintenir ou rétablir la santé des personnes sont éligibles au bénéfice de l'exonération prévue par la directive TVA pour les soins à la personne. Ainsi, quand bien même elle ferait appel aux compétences médicales, une prestation d'expertise médicale dont la finalité principale est de permettre à un tiers de prendre une décision produisant des effets juridiques à l'égard de la personne concernée ou d'autres personnes ne constitue pas une prestation de soins à la personne susceptible de rentrer dans le champ de cette exonération. Dès lors, les prestations d'expertises psychiatriques qui sont délivrées par des assujettis agissant en tant que tels ne peuvent bénéficier de l'exonération prévue par l'article 261-4-4° du CGI qui transpose la disposition de la directive dont le juge a ainsi déterminé la portée. Par conséquent, sauf à réaliser un chiffre d'affaires inférieur au seuil annuel de la franchise en base prévu par l'article 293 B du CGI, qui s'établit à 32 600 € pour les prestations de services, ces expertises psychiatriques sont soumises à la TVA. Afin de disposer d'une analyse complète et interministérielle sur ce dossier, le Gouvernement désignera prochainement une mission chargée d'examiner la situation actuelle et de faire des propositions.