14ème législature

Question N° 46686
de M. François Loncle (Socialiste, républicain et citoyen - Eure )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie sociale et solidaire et consommation
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > eau

Tête d'analyse > tarifs

Analyse > disparités.

Question publiée au JO le : 24/12/2013 page : 13383
Réponse publiée au JO le : 27/05/2014 page : 4301
Date de changement d'attribution: 03/04/2014
Date de renouvellement: 01/04/2014

Texte de la question

M. François Loncle appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, sur les fortes disparités du prix de l'eau courante en France. Une récente enquête conduite par une association de consommateurs a démontré que, en ce domaine, les Français ne sont pas égaux. Au niveau national, le prix moyen du mètre cube d'eau potable s'établit à 4,15 euros, mais les différences sont grandes d'un département à l'autre. Si un Vosgien paie 2,47 euros, un Ardéchois doit, lui, s'acquitter de 5,50 euros. Un habitant du Tarn-et-Garonne est encore plus pénalisé puisque le mètre cube d'eau lui revient, en moyenne, à 5,72 euros. Mais des inégalités s'observent à l'intérieur d'un même département. Par exemple, en Côte-d'Or, l'écart entre les localités les plus chères et les moins chères se situe à 4,47 euros. On peut également se demander pourquoi un Suresnois doit débourser 4,24 euros, alors que son voisin parisien ne règle que 3,01 euros. D'une manière générale, le prix est inversement proportionnel à la taille des communes. Les habitants des agglomérations dépensent sensiblement moins que les villageois. Il est foncièrement injuste que la France rurale soit plus sévèrement astreinte que la France urbaine. Ainsi, les 117 000 Bisontins versent 2,42 euros pour un mètre cube d'eau, tandis que les 231 résidents de Montmachoux (Seine-et-Marne), qui détiennent le record national, déboursent 9,86 euros. Il lui demande de développer sa stratégie pour harmoniser les prix au niveau national. Il souhaite qu'il intervienne auprès des grandes entreprises privées de distribution d'eau pour obtenir une baisse des coûts et une clarification des grilles tarifaires et des modes de facturation qui apparaissent complexes et opaques. Il voudrait savoir s'il ne serait pas préférable de privilégier le système des régies municipales, dans la mesure où les communes gérant directement l'approvisionnement en eau offrent, en général, des tarifs inférieurs, comme Paris où le prix a diminué de 8 % depuis trois ans. Il aimerait connaître son avis sur l'institution d'un prix unique du mètre cube d'eau, par souci d'équité et de solidarité.

Texte de la réponse

L'observatoire des services publics d'eau et d'assainissement permet à chaque citoyen de comparer à tout moment le prix et la qualité de son service avec d'autres services de son département ou du territoire national. Il est consultable sur internet (www. services. eaufrance. fr). D'après ce site de référence nationale, le prix moyen de l'eau et d'assainissement collectif est de 3,79 € TTC/m3, soit 38 € par mois pour une consommation de référence de 120 m3. Il convient cependant de souligner que ce prix varie en fonction des caractéristiques du territoire, par exemple la densité du réseau, la technique de traitement, la qualité de l'eau brute utilisée pour l'approvisionnement en eau potable. Il est donc important de veiller à une comparaison des prix entre services ayant des caractéristiques similaires. La mise en place d'un tarif unique n'est de ce fait pas une piste étudiée à ce jour. Tout d'abord, l'organisation des services publics d'eau et d'assainissement est une compétence des communes et de leurs groupements, qui ont ainsi en charge la construction et la gestion des infrastructures et définissent le mode de gestion des services et la tarification de l'eau. L'instauration d'un tarif unique viendrait contredire ce principe de libre administration. Néanmoins, des solidarités entre les services ont d'ores et déjà été instituées pour la gestion de la ressource en eau et la protection des milieux aquatiques contre les pollutions afin de limiter les disparités tarifaires. Au niveau du grand bassin hydrographique, les agences de l'eau apportent leur appui à la réalisation d'ouvrages structurants pour l'alimentation en eau potable et l'épuration des eaux usées. Cette solidarité est complétée par des aides spécifiques pour les communes rurales, afin de compenser des coûts d'infrastructure plus importants au mètre cube d'eau distribué compte tenu de la plus faible densité des populations desservies. Les agences de l'eau ont ainsi attribué aux communes rurales des compléments d'aide à hauteur d'un milliard d'euros sur les années 2007 à 2012. Au plan local, le développement de l'intercommunalité contribue également à cette solidarité en élargissant les assiettes de facturation, mais également en permettant le dialogue et la concertation entre les représentants des agglomérations utilisatrices de l'eau et des communes rurales où sont situées les ressources en eau. Malgré ces regroupements, la distribution d'eau et l'assainissement restent actuellement organisés par 35 000 services. C'est pourquoi l'amélioration de l'efficacité du service public d'eau et d'assainissement fait l'objet d'une mesure de la feuille de route pour la transition écologique construite à l'occasion de la conférence environnementale de septembre dernier. Il est en effet primordial d'optimiser les moyens et les coûts des services publics d'eau et d'assainissement en rationalisant leur organisation, notamment dans le cadre des projets de loi de l'acte III de la décentralisation. Les plus petites communes peuvent également contribuer par leur budget propre au financement des investissements qui, en raison de leur importance et au regard du nombre d'usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs. Par ailleurs, les collectivités sont libres de choisir le mode de gestion (régie ou délégation) des services publics dont elles sont responsables. La comparaison entre les prix des services en régie et ceux en délégation doit être étudiée à la lumière des conditions d'exploitation de ces services. En effet, si effectivement les opérateurs privés ont des charges spécifiques (impôts sur les sociétés, dépenses de recherche et développement) que ne supportent pas les services en gestion directe, ils sont souvent mobilisés lorsque la production d'eau potable ou l'assainissement sont rendus complexes du fait d'une eau brute de mauvaise qualité ou d'une exigence importante vis-à-vis de la qualité de rejet. De plus, les délégataires mobilisent en général des moyens humains et financiers importants afin d'atteindre les rendements demandés par les collectivités. Pour aller plus loin, concernant la tarification des services en délégation, la récente synthèse de l'observatoire « loi Sapin » a mis en évidence que la remise en concurrence des contrats induit une baisse du tarif revenant à l'opérateur délégataire au regard du tarif en vigueur dans le précédent contrat. Cette baisse de la part du tarif revenant à l'opérateur délégataire n'est cependant pas intégralement perceptible par l'abonné. La collectivité augmente en effet généralement la part lui revenant afin de financer ou de provisionner en vue des investissements qui sont à sa charge : par exemple, le renouvellement des infrastructures, la mise aux normes d'installations, etc. Globalement, les remises en concurrence des contrats de délégation de service public permettent aux collectivités de faire légèrement baisser les tarifs tout en augmentant les moyens qu'elles pourront consacrer au renouvellement et à l'amélioration du service, et ainsi contribuer à leur durabilité. Ce résultat s'explique en partie par l'exigence de transparence voulue par la « loi Sapin », qui favorise la concurrence. En conclusion, le prix de l'eau, fixé à l'échelle des collectivités locales responsables des services publics d'eau et d'assainissement, traduit le coût d'un service rendu, qui varie en fonction des conditions d'exercice du service (contexte géophysique, économique et financier) et des exigences de performance de la collectivité organisatrice (qualité et durabilité du service).