14ème législature

Question N° 48116
de M. Jean-Louis Bricout (Socialiste, républicain et citoyen - Aisne )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Budget

Rubrique > agroalimentaire

Tête d'analyse > tabacs manufacturés

Analyse > trafics transfrontaliers. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 28/01/2014 page : 788
Réponse publiée au JO le : 11/02/2014 page : 1308
Date de changement d'attribution: 04/02/2014

Texte de la question

M. Jean-Louis Bricout attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le trafic illicite de tabac. De 2002 à 2012, les interceptions de tabac de contrebande par les douanes françaises ont fortement augmenté, passant de 173 à 371 tonnes. Par exemple, en mai 2012, un patrouilleur garde-côtes a arraisonné un yacht transportant 12 tonnes de cigarettes frauduleuses. Des organisations criminelles internationales contrôlent ce trafic qui s'avère le plus lucratif, car le tabac est un produit autorisé, au contraire des stupéfiants et des contrefaçons. Des filières chinoises, indo-pakistanaises et est-européennes se partagent les marchés parallèles, sans parler de la cyber délinquance en pleine expansion. Ces trafiquants profitent des disparités de taxation entre les pays. Ainsi, le paquet de Marlboro, qui est la marque la plus vendue au monde, coûte 0,80 € en Biélorussie, 4,00 € en Belgique, 6,80 € en France, 7,70 € au Royaume-uni et 10,90 € en Norvège. Ces écarts importants procurent une marge bénéficiaire énorme aux fraudeurs. En Europe occidentale, la consommation de tabac de contrebande est significative en Italie, en Espagne et en Grande-Bretagne, car ces pays ne sont pas pourvus d'un solide réseau de distribution officiel. La France bénéficie d'un régime privilégié, en ce sens que la vente au détail des tabacs manufacturés est soumise à un monopole et exclusivement réservée aux débitants et revendeurs qui ont ainsi un statut de préposés de l'administration. La qualité et la densité de notre réseau de buralistes expliquent les difficultés que les contrebandiers rencontrent à pénétrer le marché français et à s'y implanter durablement. Il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour renforcer le dispositif français de lutte contre le trafic illégal de cigarettes. Il souhaite également qu'il lui décrive les projets d'harmonisation et de consolidation des contrôles douaniers aux frontières de l'Union européenne. Il voudrait enfin savoir si un alourdissement des peines à l'encontre des trafiquants est à l'étude, dans la mesure où ceux-ci ne risquent qu'une amende n'excédant pas 750 € et une pénalité financière équivalente, au maximum, à cinq fois le montant des droits fraudés.

Texte de la réponse

La lutte contre le trafic de cigarettes constitue l'un des objectifs permanents et prioritaires de la politique du Gouvernement vis-à-vis du tabac. L'étude « modalités d'approvisionnement du tabac en France-évaluation des achats hors du réseau des buralistes » a estimé la contrebande (contrefaçons, achats sur la voie publique et sur Internet) à 5 % du marché de la vente de cigarettes en France. L'action des agents des douanes vise, à la fois, le démantèlement des organisations criminelles internationales et la lutte contre les trafics transfrontaliers ou sur Internet. Depuis 2010, les services douaniers saisissent en moyenne 390 tonnes de tabac illicites chaque année. L'action de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) et du service national de douane judiciaire (SNDJ) participe aux démantèlements des filières et organisations de fraude, y compris celles implantées à l'étranger. Ces deux services opérationnels s'appuient également sur le réseau des attachés douaniers à l'étranger qui facilitent la coopération pour lutter contre des groupes aux ramifications internationales. Les services douaniers réalisent des opérations répétées d'interception des produits de contrebande du tabac sur le territoire national, notamment à l'aide des nouvelles unités de maître-chien tabacs, abondées dès 2012 de quatre équipes supplémentaires. Des actions coordonnées transnationales sont régulièrement programmées dans les zones frontalières afin de mobiliser les forces opérationnelles dans les secteurs sensibles à la contrebande. Des actions de lutte contre la revente de tabacs sur la voie publique complètent ce dispositif. Une approche spécifique a été mise en place pour lutter contre l'offre illicite sur l'Internet. En relation avec ce média, la douane a déjà accentué sa capacité de détection, d'investigation et de contrôle : - le service « cyberdouane » lutte contre l'offre illégale en procédant à une veille permettant l'identification des sites ; cyberdouane est désormais en capacité au moyen de « coups d'achats » d'appliquer les dispositions de l'article 67 bis-1 du code des douanes qui autorise les agents des douanes à accomplir certains actes qui permettent l'acquisition de marchandises afin de constater des infractions douanières ; - les agents des services de contrôle du fret express ou postal ont procédé, quant à eux, en 2012 à l'interception de près de 30 tonnes de produits du tabac Le volet Internet a été récemment renforcé avec la mise en ligne d'une page d'avertissement et de dissuasion à destination de l'internaute sur le site Internet de la douane, insistant sur le caractère illégal de l'achat de tabac à distance. Parallèlement, des mesures novatrices de gel puis de suppression de sites de vente à distance des tabacs ont abouti. Au niveau européen, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) participe activement à des opérations douanières conjointes en partenariat avec l'office de lutte anti-fraude (OLAF), pour l'année 2013 elle a participé à une opération qui visait notamment à coordonner la lutte contre les trafics illicites de tabac. Elle soutient également le plan visant à renforcer la lutte contre le commerce illicite de tabac, soumis le 6 juin 2013 par la Commission au Conseil et au Parlement européen. Il s'agit de mieux coordonner les politiques et les instruments existants et d'améliorer la coopération entre les différents acteurs aux niveaux national et international ainsi qu'à l'échelle de l'Union européenne. La stratégie définie par Bruxelles propose des actions spécifiques dans quatre domaines clés afin de lutter efficacement contre le commerce illicite des produits du tabac : des mesures visant à réduire les incitations aux activités de contrebande, des mesures visant à améliorer la sécurité de la chaîne d'approvisionnement, un contrôle de l'application de la législation plus strict de la part des autorités fiscales et douanières et des sanctions plus lourdes à l'égard des activités de contrebande. A cet égard, il convient de souligner que la France s'est doté d'un arsenal juridique répressif particulièrement lourd. Ainsi, la contrebande est un délit douanier passible de dix ans de prison et d'une amende d'un montant pouvant aller jusqu'à cinq fois la valeur de la marchandise, en sus de la confiscation de la marchandise de fraude, de la confiscation du moyen de transport et de la confiscation des objets servant à masquer la fraude.