14ème législature

Question N° 48812
de M. Jean-Pierre Decool (Union pour un Mouvement Populaire - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > manifestations

Analyse > groupes féministes. provocations. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 04/02/2014 page : 997
Réponse publiée au JO le : 23/09/2014 page : 8089
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 13/05/2014

Texte de la question

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'opacité de la structure du mouvement Femen, son origine, son mode de financement, ses motivation profondes. Au lendemain d'une action exhibitionniste sur la place Saint-Pierre au Vatican, une militante s'est adonnée à un spectacle simulant un avortement à base de foie de veau sur l'autel de l'église de la Madeleine à Paris, provoquant le dépôt d'une plainte du curé de cette église. Cela témoigne du caractère intimement provocateur, irrespectueux des croyances de chacun, des actions menées par le mouvement. Au-delà du caractère condamnable de leurs actions, se pose la question du financement de ce mouvement et de l'opacité de sa structure. Peu de renseignements sont disponibles sur l'origine des fonds finançant le mouvement. Ces renseignements semblent pourtant nécessaires à l'heure où le mouvement doit faire face à d'importants frais de justice. Par ailleurs, le statut de bénévole des activistes du mouvement a lui aussi été remis en cause par une journaliste infiltrée. Des informations circulant sur le prêt de locaux appartenant aux collectivités locales françaises, et notamment la mairie de Pairs, nécessitent certaines explications si elles s'avèrent exactes. Dès lors, dans un souci de transparence vis-à-vis des Français et de la représentation nationale, il lui demande de bien vouloir apporter des éclaircissements sur les modes de financement du mouvement, la nature des revenus de leurs membres, et s'il juge acceptable les troubles à l'ordre public causés par le mouvement agissant au mépris des croyances intimes de chacun.

Texte de la réponse

Dans sa décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel a érigé la liberté d'association au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et solennellement réaffirmés par le préambule de la Constitution. Toutefois, certaines associations peuvent faire l'objet d'une dissolution administrative ou judiciaire en fonction de leur activité ou de leur objet contraire aux lois ou valeurs de la République. Ainsi, dans le cadre d'une procédure judiciaire, les associations fondées sur une cause ou en vue d'un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes moeurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement, peuvent être dissoutes en application des dispositions des articles 3 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. En outre, selon l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, peuvent être administrativement dissous, par décret en Conseil des ministres, des groupements de fait ou des associations : - 1° Qui provoqueraient à des manifestations armées dans la rue ; - 2° Ou qui, en dehors des sociétés de préparation au service militaire agréées par le Gouvernement, des sociétés d'éducation physique et de sport, présenteraient, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ; - 3° Ou qui auraient pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national ou d'attenter par la force à la forme républicaine du Gouvernement ; - 4° Ou dont l'activité tendrait à faire échec aux mesures concernant le rétablissement de la légalité républicaine ; - 5° Ou qui auraient pour but soit de rassembler des individus ayant fait l'objet de condamnation du chef de collaboration avec l'ennemi, soit d'exalter cette collaboration ; - 6° Ou qui, soit provoqueraient à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propageraient des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ; - 7° Ou qui se livreraient, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l'étranger. L'association Femen France est légalement déclarée à la préfecture de police et ne présente pas un objet illicite ou contraire aux bonnes moeurs. En outre, elle n'a pas reçu de financement provenant du Gouvernement (annexe au projet de loi de finances pour 2014 « effort financier de l'Etat en faveur des associations »). La liberté d'expression s'étend aux opinions qui peuvent choquer une partie de la population (CEDH, 15 janvier 2009, association Radko et paunkovski c/ l'Ex-République Yougoslave de Macédoine, n° 74 651/01). Les militantes Femen bénéficient donc de la liberté d'expression tant que leurs propos ou actions ne tombent pas sous le coup d'une incrimination pénale. Ainsi, la profanation d'une Eglise durant la période précédant les fêtes de Noël 2013 par une activiste de cette association a fait l'objet de poursuites pénales, comme l'a rappelé la garde des sceaux, ministre de la justice dans sa réponse à la question écrite n° 47612. Le ministre de l'intérieur, garant du libre exercice des cultes, poursuit avec fermeté, dans le cadre établi par la loi, les atteintes à cette liberté fondamentale en vue de déférer leurs auteurs à la justice. Toutefois, bien que parfois pénalement répréhensibles, les actes des militantes Femen ne caractérisent pas pour l'heure l'un des graves troubles à l'ordre public justifiant une dissolution administrative. La situation de cette association pourra être réexaminée à l'aune de nouveaux éléments.