Rubrique > agriculture
Tête d'analyse > semences
Analyse > autoproduction. réglementation.
M. Jean-Claude Mathis attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les inquiétudes exprimées par la Coordination rurale concernant la proposition de loi adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon. En effet, la Coordination rurale, 2e syndicat agricole de France, craint que cette proposition de loi engendre de dangereuses conséquences pour les agriculteurs produisant des semences fermières, si elle était adoptée en l'état. Cette proposition de loi a pour objet de renforcer l'arsenal juridique existant de lutte contre la contrefaçon en renforçant les droits des obtenteurs de variétés végétales en matière d'indemnisation et également en leur permettant de saisir directement les services des douanes sur la base d'une simple présomption pour réaliser des saisies chez les contrefacteurs, qui compte tenu de la rédaction actuelle de la proposition de loi, pourraient être des agriculteurs. De plus, le pouvoir des douanes est accru en matière d'infiltration et il est même prévu la possibilité de détruire une récolte issue de semences fermières sur simple suspicion ! La Coordination rurale a saisi les sénateurs mais ces derniers ont considéré que la dérogation reconnue au profit des semences de ferme consacrée par la loi de 2011 empêchait qu'elles soient assimilées à des contrefaçons et qu'elles n'étaient dès lors pas concernées par la présente proposition. Pourtant, elles le sont bien. En effet, les certificats d'obtention végétale (COV) sont des droits protégés contre la contrefaçon comme le prévoit expressément l'article L. 623-25 du code de propriété intellectuelle (CPI). Donc tout exploitant qui userait d'une semence fermière sans autorisation du titulaire du COV peut être poursuivi pour contrefaçon. Certes, il existe une exception légale visée par l'article précité qui renvoie à l'article L. 623-24-1 du CPI permettant à un exploitant d'user de semences sans autorisation de l'obtenteur. Mais cette exception s'applique uniquement si deux conditions sont réunies à savoir, l'utilisation d'une des 21 espèces visées par le règlement (CE) n° 2100-94 et le paiement de royalties à l'obtenteur. Par conséquent, l'exploitant qui ressèmera une espèce ne faisant pas partie des 21 espèces « autorisées » (du soja par exemple) ou qui ressèmera une de ces 21 espèces sans payer les royalties afférentes - potentiellement alors même qu'aucun texte spécifique n'impose un tel paiement - entrera dans le champ d'application de cette proposition de loi. C'est pourquoi il lui demande d'exclure expressément les semences de ferme du projet de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon.