14ème législature

Question N° 49451
de M. Gabriel Serville (Gauche démocrate et républicaine - Guyane )
Question écrite
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > DOM-ROM : Guadeloupe

Analyse > politique économique. approvisionnement pétrolier.

Question publiée au JO le : 11/02/2014 page : 1223
Réponse publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2559
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Gabriel Serville interroge M. le ministre des outre-mer sur la situation de crise de l'approvisionnement que traverse la Guyane depuis décembre 2013, la troisième déjà en moins de douze mois. Le conflit qui oppose aujourd'hui les distributeurs de produits pétroliers, les compagnies pétrolières et le Gouvernement a, une nouvelle fois, pour victime directe la population guyanaise. Celle-ci est de nouveau prise en otage et se retrouve paralysée, alors même que l'économie régionale tente de se remettre des conflits relatifs à l'approvisionnement pétrolier de 2013. Voilà pourquoi il l'interroge sur l'opportunité de suivre l'exemple de Saint-Barthélemy en demandant une dérogation aux normes européennes au titre de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Cela permettrait un approvisionnement sur les marchés régionaux que sont Trinidad et Tobago et le Venezuela et donc une baisse des prix à la pompe bénéfique aux consommateurs guyanais. Il lui demande aussi de bien vouloir l'éclairer sur les perspectives d'un approvisionnement chez le voisin surinamais dont la société d'État Staatsolie vient d'annoncer sa capacité à produire du carburant aux normes européennes en vigueur d'ici la fin 2014. Contrairement à la plupart des régions hexagonales la Guyane souffre d'une dépendance totale aux produits pétroliers dont l'importation et la distribution sont assurées par un consortium jouissant d'une situation de monopole de rente particulièrement néfaste non seulement à l'économie locale, mais aussi à l'ensemble de la société guyanaise.

Texte de la réponse

La question des dérogations aux normes européennes, qui ne mettent pas en cause la santé ou la sécurité du consommateur, est une des préoccupations permanentes du Gouvernement. Des demandes en ce sens sont régulièrement portées par les autorités françaises auprès de la Commission européenne. La question d'une dérogation éventuelle aux règles de l'UE pour l'approvisionnement en carburants a déjà fait l'objet d'une proposition d'amendement par le sénateur de Guyane, Georges Patient, lors de l'examen par le Sénat du projet de loi sur la vie chère. Cet amendement avait été rejeté en séance. Le droit européen applicable, en l'occurrence la directive 98/70/CE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 12/10/98 concernant la qualité de l'essence et des carburants diesel, introduit des spécifications environnementales applicables aux carburants pour réduire les émissions polluantes des véhicules. Il en découle une interdiction de la commercialisation de l'essence plombée et une obligation de disponibilité de carburants sans soufre dans le territoire de l'Union. Cette directive autorise cependant les États membres à prévoir, pour les RUP, des dispositions spécifiques pour l'introduction d'essence ou de gasoil d'une teneur en soufre maximale de 10 mg/kg (art.3 et 4). Cette teneur est toutefois insuffisante pour permettre à la Guyane, en particulier, de s'approvisionner à moindre coût, au Venezuela ou au Suriname notamment. Une dérogation doit donc faire l'objet d'une demande spécifique auprès de la Commission puis d'un examen au Conseil et au Parlement européen en codécision. Une première demande de dérogation, introduite par la France le 11 mai 2009, se fondait sur l'article 299-2 (devenu 349 avec le traité de Lisbonne) du traité qui autorisait des dérogations aux normes européennes en tenant compte des « conditions d'approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité (...) ». La Commission a refusé la dérogation par courrier du 22/12/2009 au motif de la longueur de la procédure (codécision Conseil-Parlement) et n'a soulevé aucun autre motif pour fonder ce refus. Il est donc très vraisemblable qu'une nouvelle demande de la France soit également rejetée par la Commission. Le rejet est d'autant plus probable que du carburant aux normes UE devrait être disponible dans la zone Amérique centrale - Caraïbe en 2015 en principe. Or, c'est un délai juste suffisant si une modification de la directive devait être proposée par la Commission puis examinée et adoptée par le Conseil et le Parlement européen. Par ailleurs, il n'a pas été à ce stade établi qu'un marché de taille suffisante puisse permettre à des producteurs de la zone de mettre à disposition des consommateurs guyanais un carburant aux normes à un prix réellement plus compétitif que celui actuellement issu du processus de raffinage et d'importation de la SARA (dont les coûts de transport mutualisés avec les Antilles sont à l'avantage des consommateurs de Guyane). Soucieux de lutter contre la vie chère, le Gouvernement a mis en oeuvre une réforme des modalités de fixation des prix des carburants outre-mer en 2014, à l'appréciation desquelles il veille scrupuleusement.