14ème législature

Question N° 50110
de M. Marc Le Fur (Union pour un Mouvement Populaire - Côtes-d'Armor )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > mer et littoral

Tête d'analyse > aménagement du littoral

Analyse > loi n° 86-2 du 3 janvier 1986. rapport parlementaire. propositions.

Question publiée au JO le : 18/02/2014 page : 1472
Réponse publiée au JO le : 05/08/2014 page : 6707
Date de changement d'attribution: 03/04/2014

Texte de la question

M. Marc Le Fur attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la loi Littoral et les propositions du rapport de la commission du développement durable du Sénat sur son application. Les auteurs du rapport rappellent que la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (loi Littoral) a été instaurée pour préserver la qualité des paysages et de l'environnement littoral. Ils soulignent que cette loi d'aménagement ne cherche pas pour autant à limiter le développement des territoires littoraux et qu' elle promeut les principes de gestion équilibrée et de développement durable et maîtrisé de ces espaces. Il apparaît toutefois que les collectivités locales ayant une façade littorale rencontrent ainsi des difficultés pour aménager leur territoire. En effet, les élus locaux, qui cherchent à organiser le développement, à la fois pour les populations résidentes et pour mieux accueillir les flux touristiques, sont confrontés à une application abstraite, instable et hétérogène des dispositions de la loi. Ces élus ont ainsi perdu le pouvoir d'impulser une vision sur le bord de mer et au lieu d'être une zone d'aménagement du territoire, le littoral est devenu le terrain d'une confrontation juridictionnelle entre des intérêts divergents. Il en résulte que de nombreuses personnes sont confrontées à des situations financières et juridiques inextricables, aux conséquences parfois dramatiques. Les auteurs du rapport suggèrent par conséquent de renforcer le volet économique de la loi Littoral et d'élargir la gamme d'intervention du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL) en introduisant des servitudes environnementales comme outil alternatif à l'acquisition foncière. Il lui demande si le Gouvernement entend donner une suite concrète à cette proposition.

Texte de la réponse

La France s'est dotée en 1975 d'un dispositif original en créant le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL). La politique de sauvegarde foncière menée par cet établissement public de l'État est relayée, au niveau local, par les collectivités territoriales, des associations ou d'autres opérateurs publics, qui assurent la gestion de ses sites. Depuis presque quarante ans, ils oeuvrent ensemble pour préserver ces espaces naturels et permettre à tous les français d'accéder à plus de 155 000 hectares protégés sur le littoral et autour des grands lacs. Le CELRL dispose de plusieurs leviers de maîtrise foncière : l'acquisition, l'expropriation, l'affectation de domaine public, la préemption, les dons, legs et dations. Alors qu'il dispose déjà d'une gamme d'intervention importante, l'institution d'une servitude environnementale, à laquelle le Conservatoire pourrait avoir recours, a été recommandée par la Cour des comptes. Le rapport de la commission du développement durable du Sénat sur l'application de la « loi littoral », en mentionnant par exemple l'introduction d'une « servitude non aedificandi », s'en fait l'écho. Le CELRL a d'ailleurs déjà expérimenté ce type de servitude au profit de ses terrains. Elle s'avère peu adaptée en raison du cadre juridique actuel de ces servitudes (nécessité d'un lien direct et certain entre le « fonds dominant » qui bénéficie de la charge pesant sur le « fonds servant ») qui se limitent en outre à instaurer des obligations passives (interdiction de construire notamment). Elles ne contribuent donc pas à une gestion écologique active des espaces naturels. Le Conseil économique, social et environnemental a dès lors préconisé d'étudier plutôt la possibilité pour les citoyens de s'engager volontairement en faveur de la biodiversité sur leur propriété, objectif repris lors du séminaire sur les outils fonciers complémentaires à l'acquisition organisé au ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie le 26 juin 2012. C'est dans cette logique qu'il a été proposé, dans le projet de loi sur la biodiversité récemment examiné par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale, de créer « l'obligation réelle environnementale ». Son objectif est de permettre à un propriétaire foncier de passer un contrat avec un établissement public ou une personne morale afin de faire naître des obligations transmissibles aux preneurs successifs jusqu'à expiration du contrat. Les outils conventionnels peuvent en effet favoriser une gestion écologique dans des zones qu'un propriétaire ne souhaite pas céder dans l'immédiat et sur lesquelles il est prêt à adopter ou conserver des modes de gestion favorables à la biodiversité, dans une perspective éventuelle d'acquisition ultérieure. Qu'il s'agisse de servitudes ou d'obligations réelles, elles ne peuvent pas, en revanche, se substituer systématiquement à une maîtrise foncière publique, d'autant qu'elles sont susceptibles de se révéler coûteuses sur le très long terme. L'acquisition des espaces naturels demeure donc, en particulier sur le littoral, un levier d'action efficace et indispensable pour éviter durablement l'artificialisation des territoires.