14ème législature

Question N° 50462
de Mme Sandrine Hurel (Socialiste, républicain et citoyen - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > assurance maladie maternité : généralités

Tête d'analyse > dossier médical personnel

Analyse > coût. extension.

Question publiée au JO le : 25/02/2014 page : 1678
Réponse publiée au JO le : 21/10/2014 page : 8783
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de signalement: 10/06/2014

Texte de la question

Mme Sandrine Hurel appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les nécessaires évolutions à apporter au dossier médical personnel (DMP). Le DMP a été initié en 2004 avec l'objectif d'améliorer et de sécuriser la prise en charge des patients par leurs différents médecins et professionnels de la santé. Ce dispositif devait également permettre la réalisation de substantielles économies grâce à la simplification des démarches administratives et l'optimisation des prestations de santé. Dix plus tard, le bilan du DMP est tout inverse, puisque moins de 500 000 dossiers ont été ouverts, avec un coût qui atteindrait 500 millions d'euros pour l'assurance maladie selon un document du Conseil national de la qualité et de la coordination des soins, rendu public en janvier 2014. Si le DMP est un outil dont l'utilité semble avérée, il est néanmoins urgent de revoir complétement sa gouvernance et son financement qui ont manifestement échoué. Elle a d'ailleurs annoncé lors de l'examen du budget de la sécurité sociale pour 2014 un projet de DMP de 2e génération. Elle lui demande quelles estimations officielles elle est en mesure de communiquer sur le coût effectif du DMP depuis 2004, quelles pistes de réflexion sont à l'étude pour réformer cet outil et comment elle compte s'assurer qu'il ne connaisse pas les dérives de son prédécesseur.

Texte de la réponse

Le dossier médical personnel (DMP) a été créé par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, complétée par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, pour « favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins, gages d'un bon niveau de santé » (articles L.1111-14 à L.1111-24 du code de la santé publique). La généralisation d'un dossier médical informatisé personnel et donc « du patient » n'a pas abouti malgré les enjeux et les besoins avérés en matière de coordination des soins et de partage d'information entre professionnels de santé. Bien qu'aujourd'hui le DMP soit totalement opérationnel sur le plan technique, ses usages ne se sont pas développés. A ce jour, près de 500 000 DMP ont été ouverts, pour moitié dans les régions pilotes et essentiellement par les établissements de santé (près de 500 établissements se sont investis dans le projet, ainsi que près de 6000 professionnels de santé). L'alimentation en informations médicales de ces DMP est très limitée, près de la moitié d'entre eux sont vides ou ne comportent qu'un seul document. La Cour des comptes a produit en juillet 2012, pour la commission des finances de l'Assemblée nationale, un rapport sur le coût du DMP qu'elle estime à 210 M€ depuis son lancement. Considérant notamment les analyses et les recommandations de la Cour des comptes, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, tout en constatant les difficultés rencontrées dans le déploiement du DMP, liées principalement au fait que les professionnels de santé ne se sont pas appropriés ce dossier partagé, n'a pas retenu l'option d'un arrêt du projet, mais celle de réorienter le DMP dans le cadre d'une gouvernance profondément revue, associant les professionnels et les patients à la détermination des objectifs à atteindre, ainsi qu'à la conception du « DMP2 ». Dans cette perspective, la ministre a chargé le secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales, en mars 2013, de définir les éléments d'une stratégie de réorientation du DMP, en le recentrant sur la coordination des soins « par et pour les professionnels », en articulation avec les projets en cours (volet médical de synthèse, dossier pharmaceutique, dossier de cancérologie communicant, messagerie sécurisée santé, territoire et hôpital numérique...). L'objectif est de changer les modalités de déploiement du DMP en les orientant en soutien de la stratégie nationale de santé et en veillant à une bonne intégration avec les pratiques et les outils des professionnels. Il importe, enfin, d'assurer une synergie entre l'Etat, l'assurance maladie et les autres acteurs. Sous l'égide du secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales, la délégation à la stratégie des systèmes d'information de santé (DSSIS) a conduit d'avril à juin 2013 des travaux pour élaborer des propositions d'orientations stratégiques. Pour mener à bien cette démarche, la DSSIS s'est appuyée sur un « groupe projet » associant notamment des représentants des patients, des médecins et des pharmaciens, des établissements de santé et des ARS. Un assez large consensus a pu se dégager sur des orientations pragmatiques repositionnant le DMP dans un système d'information de santé urbanisé, comme un outil de la coordination des soins complémentaire à la messagerie sécurisée santé. Cette nouvelle approche pour un « DMP2 » renonce à l'objectif irréaliste de disposer d'un dossier qui réunirait sur un support unique l'ensemble des informations médicales de chaque Français. Ces travaux ont permis de définir des populations à cibler dans une première phase (sans exclure l'ouverture d'un DMP pour toute personne qui en aurait besoin) ; de préciser un socle d'informations à mobiliser en priorité pour l'échange et le partage entre professionnels de santé afin de sécuriser la prise en charge du patient ; de revoir totalement les conditions et modalités d'ouverture du DMP. Par ailleurs, des propositions pour une nouvelle gouvernance du DMP ont été formulées, en préconisant une association étroite des représentants des professionnels de santé et des patients, et en recherchant la clarification des responsabilités respectives de l'Etat et de l'assurance maladie. Les orientations définies pour refonder le cadre de mise en oeuvre du DMP de nouvelle génération ont été intégrées dans l'article 24 du projet de loi de santé qui modifie un certain nombre de dispositions des articles L.1111-14 à L.1111-24 du code de la santé publique relatifs au DMP. Le DMP est désormais nommé « dossier médical partagé » et les objectifs poursuivis par la réforme consistent principalement à : - faire du DMP un outil de référence comme support de la prise en charge coordonnée, principalement pour les personnes âgées et les malades atteints de pathologies chroniques ; - définir les obligations des professionnels de santé à verser les documents médicaux dans le DMP et de ce fait favoriser ses usages ; - confier la maîtrise d'ouvrage du système d'information DMP à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Cette évolution ne revient en aucun cas sur les droits des patients, notamment la possibilité de consentir à son ouverture et d'accéder directement à son contenu. Le DMP est donc un outil de partage entre les professionnels permettant au patient d'être acteur de sa prise en charge. La responsabilité de la mise en oeuvre du DMP, jusqu'ici relevant de l'ASIP Santé, est confiée par la loi à l'assurance maladie (CNAMTS) car, à ce stade du développement de l'outil, elle est la mieux à même d'en assurer le déploiement effectif en liaison étroite avec les professionnels de santé libéraux, et en cohérence avec les divers téléservices qu'elle produit. Cette mission ne lui donnera aucune possibilité d'intervenir sur les données contenues dans les DMP qui continueront d'être conservées chez un tiers hébergeur agréé de données de santé. Les actions de déploiement à destination des établissements de santé seront conduites par le ministère chargé de la santé avec le concours de la CNAMTS, l'Etat gardant le pilotage stratégique du DMP2. Enfin, l'article 24 du projet de projet de loi de santé précise les conditions de création d'un DMP, ainsi que les documents ayant vocation à être versés dans le DMP. Il précise également le rôle central du médecin traitant et notamment sa capacité à accéder à l'intégralité du DMP de ses patients. Les modalités de mise en oeuvre du DMP feront l'objet d'un décret en Conseil d'Etat après avis de la CNIL.