Question de : M. Richard Ferrand
Finistère (6e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Richard Ferrand attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question du boycott des produits en provenance des colonies de l'État d'Israël, et commercialisés en France. Alors que l'Union européenne considère toutes les colonies israéliennes des territoires occupés comme illégales au regard du droit international, et que certains États comme le Royaume-uni ou le Danemark ont imposé un double étiquetage des produits issus d'entreprises israéliennes implantées sur les territoires palestiniens, la France reste le seul État à pénaliser le boycott des produits israéliens issus des colonies. En effet, la jurisprudence française condamne ce mode de contestation au même titre qu'une discrimination, de même que l'appel au boycott. Ainsi, chaque année en France, des militants opposés à la colonisation des territoires palestiniens sont traduits devant les tribunaux. Aussi, après observation du traitement réservé à des affaires similaires chez nos voisins européens, il lui demande si le Gouvernement entend mener une réflexion sur les poursuites judiciaires, qui semblent de moins en moins justifiables, engagées contre ces militants.

Réponse publiée le 25 novembre 2014

Depuis le mois de mars 2009, plusieurs opérations appelant au boycott de produits israéliens ont été menées sur le territoire national. Le directeur de affaires criminelles et des grâces a diffusé une dépêche le 12 février 2010 aux procureurs généraux près les cours d'appel appelant « à une réponse cohérente et ferme à ces agissements » (circulaire dite Alliot-Marie). Elle a été confirmée et précisée par une dépêche en date du 15 mai 2012. Des parlementaires, de tous horizons, des associations et des intellectuels demandent le retrait de la circulaire du 12 février 2010. La Garde des Sceaux a organisé à la Chancellerie deux réunions de travail les 17 décembre et 6 mars 2013 avec les parlementaires et les responsables associatifs, en présence des services. A cette occasion, le directeur des affaires criminelles et des grâces a présenté l'état du droit en la matière. Il en ressort que les suites pénales données à ces affaires sont peu nombreuses. Les participants à ces réunions ont souligné la nécessité de mettre en commun toutes les réflexions et analyses sur le sujet et exprimé la volonté de créer les conditions d'un débat public serein, sur le bien-fondé de la pénalisation des appels au boycott, sans donner l'impression de réduire notre vigilance dans la lutte contre l'antisémitisme. La ministre insiste sur ce point. Toutes les personnes qui l'ont interpellé sur la circulaire Alliot-Marie sont par ailleurs très investies dans le combat contre l'antisémitisme et le racisme. Ce combat est plus que jamais d'actualité. En raison de la situation internationale en Israël et dans les territoires palestiniens, les tensions en France sont devenues extrêmement fortes ces derniers mois, pouvant conduire à une recrudescence des actes à caractère raciste, xénophobe ou antisémite. Face à ces actes intolérables qui déshonorent notre République, le gouvernement entend faire preuve d'une fermeté absolue. Par circulaire en date du 30 juillet 2014, le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve a demandé aux préfets de signaler systématiquement à l'autorité judiciaire les actes racistes, antisémites et antimusulmans. La Garde des Sceaux a adressé aux procureurs le 4 aout dernier une circulaire destinée à renforcer la mobilisation des parquets et rappeler l'importance de la réponse judiciaire à apporter à de tels actes. Cette circulaire s'inscrit dans le prolongement de la circulaire du 17 juin 2012 portant sur le même sujet. Dans ce contexte, la ministre considère qu'il faut dépasser le cadre partisan du débat actuel sur la pénalisation des appels au boycott de produits israéliens. Elle a sollicité des personnalités à la stature intellectuelle et morale incontestées pour lui faire des propositions en la matière. Elle a réuni le 13 mai dernier au ministère un « conseil des sages » composé de la sociologue Dominique Schnapper, du philosophe Olivier Abel, du magistrat Pierre Lyon Caen, de l'ambassadeur Yves Aubin de la Messuzière et du professeur au Collège de France, Henry Laurens. Ces personnalités sont libres de contacter et d'échanger avec les personnes et organismes de leur choix, afin de mieux apprécier les attentes de ces derniers et, surtout, assurer l'expression de la diversité des points de vue et enrichir la réflexion collective sur le sujet.

Données clés

Auteur : M. Richard Ferrand

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 25 février 2014
Réponse publiée le 25 novembre 2014

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