14ème législature

Question N° 51027
de M. Paul Molac (Écologiste - Morbihan )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Finances et comptes publics

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > économies d'énergie

Analyse > logements. travaux d'isolation. tiers-financement. mise en oeuvre.

Question publiée au JO le : 04/03/2014 page : 1965
Réponse publiée au JO le : 31/03/2015 page : 2528
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Paul Molac attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la mise en œuvre du tiers-financement pour la rénovation énergétique des logements privés et la législation relative au monopole bancaire. L'article 124 de la loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR), récemment votée par le Parlement, vient de donner en France une première base juridique au tiers-financement et aux organismes habilités à le pratiquer. Le tiers-financement a pour objet de dynamiser le marché de la rénovation énergétique du bâti, en particulier dans le secteur du logement privé, en permettant à un organisme habilité de proposer aux propriétaires une offre globale pour la rénovation de leurs biens intégrant une offre technique sur l'ensemble de la chaîne des travaux, depuis le diagnostic thermique jusqu'à la certification des travaux réalisés, et une offre de services pour le financement des travaux. Cette offre de services doit consister notamment à négocier des conditions d'emprunt auprès du système bancaire. Le tiers-financement est très attendu par les professionnels du bâtiment pour concrétiser les ambitions fixées par le Président de la République sur le chantier de la rénovation énergétique du bâti. Le potentiel en termes d'activités pour le secteur du bâtiment est considérable puisqu'il pourrait représenter un marché nouveau pour trente à quarante ans et une augmentation du niveau d'activités de ce secteur de l'ordre de 15 %. Des initiatives ont déjà vu le jour dans les territoires, portées par des collectivités territoriales, afin de mettre en œuvre ce nouveau modèle du tiers-financeur dans les meilleurs délais. Les plus avancées sont à l'actif de la société d'économie mixte Énergie posit'If en Île-de-France et de la société d'économie mixte Portage immobilier (SEMPI) sur le territoire intercommunal de Brest métropole océane. S'appuyant sur cette dernière expérience, la Bretagne souhaiterait mettre en œuvre rapidement le modèle du tiers-financement sur le territoire régional, dans le cadre du plan Bâtiment durable breton qui est co-construit avec l'État et les autres acteurs du territoire. Cependant, un récent courrier, daté du 12 février 2014, adressé à la SEM Énergie posit'If par la Banque de France, plus précisément par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) qui en dépend, soulève de graves questions quant à la mise en œuvre effective du tiers-financement en France. Dans ce courrier la Banque de France écrit : « au vu du rapport de la Caisse des dépôts et consignations sur le financement de la rénovation énergétique des logements privés remis le 27 juin 2013 à la ministre de l'égalité des territoires et du logement et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, il nous semble que le tiers-financement ne pourrait pas relever [de l']exception au monopole bancaire ». Et la Banque de France d'ajouter : « Il convient donc de réfléchir aux autres modalités qui pourraient être retenues pour mener à bien ce type d'activités ». Les banques privées ou mutualistes consultées font une lecture différente du tiers-financement et considèrent qu'il ne contredit nullement la législation en vigueur sur le monopole bancaire. Il n'en est pas moins vrai que le positionnement de la Banque de France le conduit à l'interroger sur les dispositions que le Gouvernement entend prendre afin que la mise en œuvre effective du modèle économique du tiers-financement ne soit pas retardée en France. Le redressement de notre économie et de nombreuses créations d'emplois en dépendent. Rien qu'en Bretagne, le potentiel de nouveaux emplois lié au chantier de la rénovation énergétique du bâti est évalué à 9 000.

Texte de la réponse

Le service de tiers-financement, tel que défini dans la loi ALUR, comprend à la fois un volet technique (conception du programme des travaux de rénovation thermique, estimation des économies d'énergie, etc.) et un volet financier (détermination du plan de financement, éventuellement offre de prêts). S'agissant du volet financier, et plus particulièrement de l'offre de prêts, les sociétés de tiers-financement peuvent actuellement intervenir selon plusieurs types de modalités. En l'état actuel du droit, l'offre de prêt peut être proposée directement par la société de tiers-financement, soit sous forme d'avances lorsqu'elle agit à titre gratuit (dans ce cas, la société de tiers-financement n'est soumise à aucune contrainte prudentielle), soit via une offre de crédit lorsqu'elle est agréée en tant qu'établissement de crédit ou société de financement (la société de tiers-financement est alors soumise à l'agrément octroyé par l'ACPR, défini à l'article L. 511-10 du code monétaire et financier). L'article 6 du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, qui devrait prochainement être adopté, est sur le point d'introduire une troisième modalité d'intervention pour les sociétés de tiers-financement dont l'actionnariat est majoritairement formé par les collectivités locales : celles-ci pourraient distribuer du crédit à titre onéreux en tant qu'entités bénéficiant d'une autorisation accordée par l'ACPR, qui ouvre droit à un régime prudentiel ad hoc dans le cadre de la dérogation au monopole bancaire inscrite à l'article L. 511-6 du code monétaire et financier. Enfin, la société de tiers-financement peut également intervenir comme intermédiaire, l'offre de prêt proposée émanant alors d'un établissement de crédit ou d'une société de financement. Dans ce cadre, la société de tiers-financement est soit agréée comme intermédiaire en opération de banque et de service de paiement (IOB), statut défini au I de l'article L. 519-1 du code monétaire et financier, soit elle agit exclusivement à titre gratuit (dans ce cas, elle n'est soumise à aucune contrainte réglementaire spécifique).