14ème législature

Question N° 51242
de M. André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > pharmacie et médicaments

Tête d'analyse > médicaments

Analyse > mises sur le marché. service médical rendu. effets indésirables.

Question publiée au JO le : 04/03/2014 page : 1939
Réponse publiée au JO le : 02/02/2016 page : 963
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. André Chassaigne attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les informations communiquées par une revue médicale et la demande de retrait du marché de la dompéridone, molécule classée neuroleptique, utilisée contre certains troubles gastriques. En effet, s'appuyant sur de nouvelles statistiques, la revue médicale « Prescrire » affirme que la dompéridone, utilisée depuis 1980 et commercialisée sous le nom de Motilium, aurait une efficacité limitée alors qu'elle augmenterait le risque de troubles du rythme cardiaque et de morts subites. Ainsi, en extrapolant les résultats du rapprochement entre les données collectées par l'assurance maladie et la fréquence des morts subites, « Prescrire » estime que le nombre de morts subites en France, liées à la dompéridone, pourrait s'élever en 2012 entre 25 et 120 ! Parallèlement, depuis 2005, plusieurs études épidémiologiques étrangères ont démontré que ces morts subites d'origine cardiaque sont de 1,6 à 3,7 fois plus fréquentes en cas d'exposition à cette molécule. Même l'Agence française du médicament et le principal fabriquant ont informé en 2011 les médecins et les pharmaciens de ce risque de mort subite. De son côté, l'Agence européenne du médicament doit se prononcer sur le devenir de cette molécule en mars 2014. Toutefois, il est possible qu'elle se limite à préconiser des baisses de posologies ou de durée de traitement, reportant de fait la responsabilité du fabricant vers les médecins et le personnel soignant. Enfin, en cas de trouble pouvant motiver la prescription de la domperidone, « Prescrire » propose des mesures alternatives, comme le changement d'alimentation ou l'emploi d'autres molécules. En conséquence, il lui demande son avis sur les informations communiquées et sur les propositions de cette revue médicale à propos de la dompéridone, molécule suspectée d'avoir des effets secondaires particulièrement graves.

Texte de la réponse

La dompéridone est commercialisée en France sous les noms de MOTILIUM, PERIDYS et leurs génériques depuis 1980. Cette molécule est indiquée chez l'adulte pour le soulagement des symptômes de type nausées et vomissements, sensations de distension épigastrique, gêne au niveau supérieur de l'abdomen et régurgitations gastriques et chez l'enfant pour le soulagement des symptômes de type nausées et vomissements. Le risque cardiaque des médicaments contenant de la dompéridone fait l'objet d'un suivi depuis plusieurs années aux niveaux national et européen. Dès août 2004, le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de ces médicaments a été mis à jour. En 2008, des informations complémentaires sur le risque cardiaque ont été ajoutées dans ces RCP. En 2010, deux nouvelles études épidémiologiques ont été publiées dans la littérature scientifique concernant le risque d'arythmie ventriculaire ou de mort subite et une possible association avec la dompéridone. Une faible association avec des morts subites a été mise en évidence. Il a été conclu que la dompéridone peut, notamment à des doses élevées (>30 mg/jour) ou chez les patients de plus de 60 ans, être associée à un risque plus élevé d'arythmie ventriculaire grave ou de mort subite. Une information adressée par courrier aux professionnels de santé et relayée sur le site internet de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) (www.ansm.sante.fr) en décembre 2011 les a sensibilisés sur ce risque. C'est dans ce contexte qu'en raison de la persistance des effets indésirables, le comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) siégeant auprès de l'agence européenne des médicaments (EMA) a initié une réévaluation européenne du rapport bénéfice/risque des spécialités à base de dompéridone. Cette réévaluation, qui s'est achevée en juillet 2014, a confirmé le risque d'effets indésirables cardiaques graves associés à l'utilisation de dompéridone. Le risque est plus élevé chez les patients âgés de plus de 60 ans et chez ceux traités par une dose quotidienne de plus de 30 mg. Sur la base de ces données disponibles, il a toutefois été considéré par les autorités européennes que le rapport bénéfice/risque de la dompéridone demeurait positif sous réserve de restreindre l'indication, la dose et la durée de traitement. Ainsi, par décision de la Commission européenne en date du 31 octobre 2014, l'indication thérapeutique des spécialités à base de dompéridone a-t-elle été limitée au « soulagement des symptômes de type nausées et vomissements », les posologies ont été réduites et la durée du traitement a été limitée à une semaine. De plus, les médicaments contenant de la dompéridone sont désormais contre-indiqués chez les patients présentant une insuffisance hépatique modérée ou sévère, en cas d'affections qui allongent ou qui pourraient affecter la conduction cardiaque, et en cas d'affections cardiaques. Enfin, les spécialités fortement dosée (comprimé à 20 mg) ont été retirées du marché français en septembre 2014. Par ailleurs, les laboratoires concernés doivent également réaliser deux études : une étude d'efficacité dans la population pédiatrique et une étude d'utilisation pour évaluer l'efficacité des mesures de minimisation du risque mises en place et pour surveiller l'utilisation en dehors des termes de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) ainsi modifiée. Les informations relatives à l'état d'avancement de cette évaluation sont régulièrement mises en ligne sur le site de l'ANSM (www.ansm.sante.fr), accompagnées de mises en garde et de recommandations à l'attention des prescripteurs, lesquels ont également reçu une lettre d'information en septembre 2014 leur précisant l'ensemble de ces modifications.