14ème législature

Question N° 51256
de Mme Laurence Abeille (Écologiste - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > commerce et artisanat

Tête d'analyse > commerce

Analyse > produits importés d'Israël. appel au boycottage. attitude de l'État.

Question publiée au JO le : 04/03/2014 page : 1991
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9904
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 11/11/2014

Texte de la question

Mme Laurence Abeille interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la circulaire Alliot-Marie de février 2010. Plusieurs associations, dont fait partie le comité Palestine 94-Nord, se questionnent sur l'interprétation variable et abusive de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, notamment en ouvrant la possibilité d'engager des poursuites contre les personnes appelant ou participant à des actions de boycott des produits déclarés israéliens. En effet, la circulaire Alliot-Marie permet aux tribunaux de prendre des décisions allant dans des sens parfois opposés (décision du TGI de Pontoise du 20 décembre 2013, et décision du TGI de Paris, en matière civile qui condamne l'AFPS). Aussi, elle souhaiterait savoir ce que le Gouvernement prévoit d'entreprendre pour pallier cette imprévisibilité devant la loi, permise par la circulaire en question.

Texte de la réponse

Depuis le mois de mars 2009, plusieurs opérations appelant au boycott de produits israéliens ont été menées sur le territoire national. Le directeur de affaires criminelles et des grâces a diffusé une dépêche le 12 février 2010 aux procureurs généraux près les cours d'appel appelant « à une réponse cohérente et ferme à ces agissements » (circulaire dite Alliot-Marie). Elle a été confirmée et précisée par une dépêche en date du 15 mai 2012. Des parlementaires, de tous horizons, des associations et des intellectuels demandent le retrait de la circulaire du 12 février 2010. La Garde des Sceaux a organisé à la Chancellerie deux réunions de travail les 17 décembre et 6 mars 2013 avec les parlementaires et les responsables associatifs, en présence des services. A cette occasion, le directeur des affaires criminelles et des grâces a présenté l'état du droit en la matière. Il en ressort que les suites pénales données à ces affaires sont peu nombreuses. Les participants à ces réunions ont souligné la nécessité de mettre en commun toutes les réflexions et analyses sur le sujet et exprimé la volonté de créer les conditions d'un débat public serein, sur le bien-fondé de la pénalisation des appels au boycott, sans donner l'impression de réduire notre vigilance dans la lutte contre l'antisémitisme. La ministre insiste sur ce point. Toutes les personnes qui l'ont interpellé sur la circulaire Alliot-Marie sont par ailleurs très investies dans le combat contre l'antisémitisme et le racisme. Ce combat est plus que jamais d'actualité. En raison de la situation internationale en Israël et dans les territoires palestiniens, les tensions en France sont devenues extrêmement fortes ces derniers mois, pouvant conduire à une recrudescence des actes à caractère raciste, xénophobe ou antisémite. Face à ces actes intolérables qui déshonorent notre République, le gouvernement entend faire preuve d'une fermeté absolue. Par circulaire en date du 30 juillet 2014, le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve a demandé aux préfets de signaler systématiquement à l'autorité judiciaire les actes racistes, antisémites et antimusulmans. La Garde des Sceaux a adressé aux procureurs le 4 aout dernier une circulaire destinée à renforcer la mobilisation des parquets et rappeler l'importance de la réponse judiciaire à apporter à de tels actes. Cette circulaire s'inscrit dans le prolongement de la circulaire du 17 juin 2012 portant sur le même sujet. Dans ce contexte, la ministre considère qu'il faut dépasser le cadre partisan du débat actuel sur la pénalisation des appels au boycott de produits israéliens. Elle a sollicité des personnalités à la stature intellectuelle et morale incontestées pour lui faire des propositions en la matière. Elle a réuni le 13 mai dernier au ministère un « conseil des sages » composé de la sociologue Dominique Schnapper, du philosophe Olivier Abel, du magistrat Pierre Lyon Caen, de l'ambassadeur Yves Aubin de la Messuzière et du professeur au Collège de France, Henry Laurens. Ces personnalités sont libres de contacter et d'échanger avec les personnes et organismes de leur choix, afin de mieux apprécier les attentes de ces derniers et, surtout, assurer l'expression de la diversité des points de vue et enrichir la réflexion collective sur le sujet.