14ème législature

Question N° 51685
de M. François de Rugy (Écologiste - Loire-Atlantique )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Tête d'analyse > magistrats

Analyse > droit à la mobilité. réglementation.

Question publiée au JO le : 11/03/2014 page : 2269
Réponse publiée au JO le : 29/12/2015 page : 10801
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 14/07/2015

Texte de la question

M. François de Rugy attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité d'une mise en cohérence de la législation française en matière d'accès des fonctionnaires aux emplois dits « hors hiérarchie ». En effet, alors que la loi organique 2007-287 du 5 mars 2007 impose aux magistrats d'effectuer une période de mobilité statutaire pour accéder aux emplois « hors-hiérarchie », il semblerait que le corps des magistrats - dans la mesure où il comporte des attributions d'ordre juridictionnel - échappe au champ d'application de la loi 2009-972 du 3 août 2009 qui crée précisément un droit à la mobilité pour les fonctionnaires. Aussi, il lui demande si le Gouvernement considère qu'il est nécessaire de spécifier que la loi de 2009 s'applique également aux magistrats.

Texte de la réponse

L’article 4 de la loi no 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique a introduit dans la loi no 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, un article 14 bis prévoyant notamment pour les fonctionnaires un droit à la mobilité. En excluant de son champ d’application les magistrats de l’ordre judiciaire, l’article 2 de la loi du 13 juillet 1983 précitée, qui constitue le titre I du statut général des fonctionnaires de l’Etat, se contente de tirer les conséquences des dispositions constitutionnelles qui consacrent la spécificité du statut des magistrats. Il résulte en effet de la Constitution elle-même que le statut des magistrats est fixé par une loi organique (article 64, alinéa 3). C’est uniquement lorsque ce statut le prévoit lui-même que les dispositions du statut général des fonctionnaires sont applicables aux magistrats et seulement dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux règles statutaires du corps judiciaire. Or, l’ordonnance no 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature prévoit en son article 72, un dispositif dérogatoire à celui applicable à la fonction publique, en ce que le placement en position de disponibilité ou de détachement est prononcé sur proposition du ministre de la justice et après avis du Conseil supérieur de la magistrature. Les dispositions du décret 93-21 du 7 janvier 1993 précisent en outre les conditions d’examen des demandes et notamment à l’article 36-1 qui prévoit la possibilité pour le garde des sceaux de s’opposer à cette demande, décision susceptible d’un recours contentieux. Dès lors, l’ordonnance statutaire fait obstacle à l’applicabilité de l’article 4 de la loi no 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique aux magistrats de l’ordre judiciaire. En outre, il importe de rappeler que les principes constitutionnels de séparation des pouvoirs et d’indépendance de l’autorité judiciaire imposent que des garanties particulières s’attachent à la qualité de magistrat de l’ordre judiciaire. Or, affirmer un « droit au départ » pour les magistrats souhaitant bénéficier d’une mobilité apparaît difficilement conciliable avec les garanties particulières qui entourent la procédure de nomination des magistrats et notamment l’exercice par le Conseil supérieur de la magistrature de sa mission constitutionnelle de son pouvoir d’avis sur les nominations des magistrats. Il convient enfin de souligner que la période de « mobilité statutaire » exigée aux articles 39 et 76-4 de l’ordonnance doit être différenciée de la mobilité à laquelle peut prétendre tout magistrat au cours de sa carrière. En effet, celle-ci est obligatoire et conditionne l’accès à certains emplois hautement qualifiés, les emplois dits « hors hiérarchie ». Une telle mobilité est, à titre comparatif, requise pour l’accès des fonctionnaires aux emplois fonctionnels de chef de service et de sous-directeur des administrations de l’Etat (décret no 2012-32 du 9 janvier 2012 relatif aux emplois de chef de service et de sous-directeur des administrations de l’Etat). Il est toutefois envisagé dans le projet de loi organique relatif à l’indépendance et l’impartialité des magistrats et à l’ouverture de la magistrature sur la société enregistré à la présidence du Sénat le 31 juillet 2015 sous le numéro 660, un report de la mise en œuvre de l’obligation de mobilité statutaire pour l’accès aux emplois hors hiérarchie en prévoyant que l’article 76-4 précité est applicable aux magistrats nommés dans leur premier poste à compter du 1er septembre 2020. Ce report devrait permettre une mise en œuvre dans de meilleures conditions, lorsque les vacances de postes seront moindres suite aux recrutements en cours.