14ème législature

Question N° 51874
de M. Olivier Dussopt (Socialiste, républicain et citoyen - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > sang et organes humains

Tête d'analyse > produits sanguins labiles

Analyse > collecte. rapport. recommandations.

Question publiée au JO le : 11/03/2014 page : 2216
Réponse publiée au JO le : 10/03/2015 page : 1688
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Olivier Dussopt attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'inquiétude de la filière sang française concernant la possible requalification en médicament du plasma frais congelé traité par solvant-détergent (PFC-SD). Le PFC-SD, appelé également plasma viro-atténué par solvant détergent, est une des techniques de sécurisation du plasma thérapeutique. Le plasma thérapeutique est obtenu soit lors d'un don de sang total, soit lors d'un don d'aphérèse. Depuis la réorganisation de la filière sang au début des années 1990, l'Établissement français du sang (EFS) a le monopole de la collecte du sang, de plasma et de plaquettes ainsi que le monopole de la commercialisation des produits sanguins labiles (PSL) aux établissements de santé. Le plasma thérapeutique fait partie des PSL. Par ailleurs, le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) fractionne le plasma acheté à l'EFS et commercialise ses produits sur un marché concurrentiel de trois classes de médicaments dérivés du sang (MDS). Les PSL se distinguent, en principe, des MDS sur deux points. D'une part, les PSL ont une durée de conservation beaucoup plus limitée que les MDS. D'autre part, les PSL ne nécessitent pas de processus industriel de transformation, à l'inverse des MDS. Aujourd'hui, la filière sang est fragilisé notamment en raison de la situation financière de ses deux principaux acteurs, l'EFS et le LFB, très interdépendants. En effet, le LFB voit ses parts de marché reculer en France face à ses concurrents étrangers et réduit ses commandes de plasma à l'EFS, ce qui fragilise l'établissement public. Dans ce contexte, le laboratoire Octapharma a saisi le Conseil d'État d'une demande de requalification du plasma thérapeutique SD en médicament. Dans sa décision datée du 26 octobre 2012, le Conseil d'État a transmis un renvoi préjudiciel à la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE). Si cette dernière répond favorablement à la demande de requalification d'Octopharma, l'EFS perdrait le monopole de la production du plasma thérapeutique SD, le PFC-SD devenant un MDS. La situation financière de l'EFS n'en serait que plus déstabilisée. En outre, cette probable requalification marquera un recul des principes éthiques de la filière sang. En effet, en France, le don du sang est bénévole, volontaire et non-rémunéré et les normes de vigilance sont nombreuses et strictes. Or les MDS importés de l'étranger ne sont pas toujours élaborés à partir de sang collecté selon les mêmes principes éthiques et avec les mêmes précautions. Aussi, il souhaiterait donc connaître les mesures que compte prendre la ministre pour anticiper la possible requalification en médicament du plasma SD, afin de préserver l'équilibre financier de l'EFS et le respect des principes éthiques de la filière sang.

Texte de la réponse

L'article 71 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2015 a pour objectif de mettre en conformité le droit français à la suite des arrêts de la Cour de Justice de l'Union européenne et du Conseil d'État qui ont requalifié le plasma sécurisé par solvant-détergent (dit plasma SD), considéré jusqu'à ce jour comme un produit sanguin labile, en médicament. L'arrêt du Conseil d'État ne laissant que jusqu'au 31 janvier 2015 pour permettre les adaptations nécessaires à cette requalification, le Gouvernement a proposé un dispositif permettant d'assurer dès cette date un haut niveau de sécurité pour les patients transfusés. Il est en effet impératif de garantir un système intégrant en toute sécurité des produits transfusionnels de statuts juridiques différents qui, sans modification de la législation, emprunteraient des circuits distincts de distribution et de délivrance jusqu'au lit du patient. Sans cette mesure, le plasma SD serait arrivé directement dans les pharmacies à usage intérieur des hôpitaux qui ne disposent pas encore des équipements nécessaires à la conservation et à la délivrance de ce produit et dont les personnels n'ont pas encore été formés à ce type de produit. Le danger que nous devons parer aujourd'hui est de désorganiser, du jour au lendemain, la délivrance des produits transfusionnels, désorganisation qui pourrait conduire à des retards de transfusion voire à des accidents plus graves. Par ailleurs, sans ces dispositions, il n'aurait pas été pas possible d'assurer un double suivi de ce plasma en pharmacovigilance et en hémovigilance, ce qui pourrait être préjudiciable à la sécurité de la chaîne transfusionnelle et à celle des patients. La mesure présentée par le gouvernement n'est absolument pas le signe d'un changement de conviction sur les grands principes qui régissent la transfusion sanguine en France. La France reste plus que jamais attachée aux grands principes d'organisation de la filière de la transfusion sanguine que sont la sécurité sanitaire, l'autosuffisance, le don éthique, bénévole, anonyme et non rémunéré, et la séparation entre le collecteur et le fractionneur. Par ailleurs, le monopole de l'établissement français du sang (EFS) sur la collecte des produits sanguins labiles en France n'est absolument pas remis en cause par cette mesure. L'EFS continuera ainsi à produire, distribuer et délivrer des plasmas transfusionnels et tous les autres produits sanguins labiles ; seul le plasma SD pourra être commercialisé par des laboratoires pharmaceutiques, sous réserve d'obtenir les autorisations prescrites par la loi. Enfin, il convient de souligner que des règles existent en France régissant les médicaments dérivés du sang afin de soutenir la promotion de médicaments d'origine éthique. Déjà aujourd'hui, nos règles nationales d'autorisation de mise sur le marché imposent le principe de l'origine éthique du plasma ; demain, le label éthique viendra encore renforcer la promotion de ces médicaments éthiques. Le plasma SD ne dérogera pas à ces règles.