14ème législature

Question N° 52101
de M. Denis Baupin (Écologiste - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > géothermie

Analyse > forage de recherche. Bure. perspectives.

Question publiée au JO le : 18/03/2014 page : 2519
Réponse publiée au JO le : 24/02/2015 page : 1355
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Denis Baupin attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la question du potentiel géothermique dans le sous-sol de Bure, site retenu pour le projet de création d'un stockage réversible profond de déchets radioactifs (Cigeo). L'Andra a été chargée par la loi du 28 juin 2006 de choisir le lieu pour l'implantation de CIGEO. Parmi les différents critères à prendre en compte pour le choix du site, détaillés dans le guide de l'ASN de 2008 figure celui de l'absence de ressources géothermiques potentiellement exploitables. Dès 1979 le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) considérait que la ressource géothermique de cette zone pouvait avoir une bonne productivité, semblable à celle existant dans le bassin parisien. En 2008, l'Andra a fait effectuer un forage pour vérifier le potentiel géothermique de la région, mais en a tiré un bilan négatif, estimant que « la production mesurée en test est nettement inférieure à la gamme des débits des exploitations thermiques ». Or selon un ancien responsable de la géothermie au BRGM, l'Andra aurait arrêté son forage de recherche juste avant d'atteindre la source la plus prolifique de géothermie. Ce même ancien responsable recommande aujourd'hui d'engager aux frais de l'Andra mais en s'adressant à une « entreprise compétente une opération de forage et d'essais de reconnaissance géothermique selon les règles de l'art sur la totalité de la hauteur du trias ». Considérant que l'Andra « a délibérément dissimulé l'intérêt de la ressource géothermique à Bure afin de favoriser l'implantation de CIGEO », 6 associations ont assigné l'Andra en responsabilité pour faute en mai 2013, assignation en cours de traitement par le tribunal de grande instance de Nanterre. En novembre 2013, le cabinet d'experts Geowatt, mandaté par le comité local d'information et de suivi du laboratoire de Bure, a produit un rapport dans lequel il conclut : « Les ressources géothermique du Trias dans la région de Bure peuvent être aujourd'hui exploitées de manière économique avec l'emploi de techniques et de matériel appropriés ». Depuis, en février 2014, la conférence de citoyens, qui s'est tenue dans le cadre du débat public piloté par la CNDP, s'est également saisie de ce sujet. Dans ses conclusions, le panel de citoyens relève les propos contradictoires de l'Andra qui affirme d'une part « Il n'y a pas de ressources exceptionnelles dans le sens de primordial pour la Nation », et d'autre part, « si quelqu'un a les moyens et qu'il y a de la demande, il y a de quoi faire de la géothermie ». Et de poursuivre : « Face à cette contradiction, l'incertitude demeure quant au caractère exploitable du site en accord avec la loi. Il s'agit pour nous d'une question juridique fondamentale. Et nous recommandons des études pour connaître son caractère exceptionnel ou non ». Une clarification apparaît donc indispensable. Il lui demande si le Gouvernement envisage comme le suggère la Conférence de citoyens de commanditer pour cela des études complémentaires indépendantes de l'Andra et un forage spécifique de recherche de géothermie, si nécessaire, d'autant plus que la loi de finances rectificative vient de doter richement l'Andra pour les études préalables au site d'enfouissement.

Texte de la réponse

La question de l'évaluation du potentiel géothermique profond dans la région de Bure et surtout des conséquences de cette présence potentielle pour l'implantation du projet Cigéo a fait l'objet de recherches depuis plusieurs années. En 2008, l'Andra a réalisé, à la demande du Comité local d'information et de suivi (CLIS), une opération de forage dont l'un des buts était l'évaluation du potentiel géothermique du site prévu pour l'implantation du stockage géologique profond. En effet, selon le guide de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le site retenu ne doit pas se situer à l'aplomb d'une ressource exceptionnelle qui pourrait présenter un attrait potentiel pour les générations futures : après la fermeture et l'éventuel oubli du site, un potentiel géothermique exceptionnel augmenterait la probabilité de réalisation de forages en vue d'exploiter cette ressource, et donc le risque d'intrusion dans le stockage. Les données obtenues à l'issue du forage demandé par le CLIS ont permis à l'Andra de conclure que le potentiel géothermique de Bure ne présentait pas de caractère exceptionnel et était équivalent à la moyenne européenne. Le site n'est donc pas plus susceptible qu'un autre de faire l'objet d'une exploration géothermique future. En 2010, dans son rapport annuel, la Commission nationale d'évaluation (CNE), écrit : « La Commission adhère, comme l'Andra, à la conclusion que le Trias dans la région de Bure ne représente pas une ressource géothermique potentielle attractive dans les conditions technologiques et économiques actuelles. Cependant cette considération repose plus sur la modestie de la température et l'incertitude qui demeure sur les possibilités de réinjecter l'eau que sur la productivité de l'aquifère du Trias inférieur dont il n'est pas pour l'instant démontré qu'elle soit inférieure à celle constatée dans les installations géothermiques au Dogger existantes dans le centre du Bassin parisien. » De même, selon le schéma régional climat air énergies de Lorraine (SRCAE) : « Le potentiel régional de développement de la géothermie profonde est très faible. » Au delà du possible potentiel géothermique du site, la principale question est l'impact sur la sûreté de scénarios d'intrusion qui pourraient, notamment, être consécutifs à la recherche ou l'exploitation de ressources en faisant l'hypothèse d'une perte de mémoire du site. L'ASN, souhaite engager une démarche pluraliste afin d'examiner les scénarios d'intrusion à prendre en compte dans la démonstration de sûreté que l'Andra devra étudier, dans le cadre du groupe de travail du Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR).