14ème législature

Question N° 52666
de Mme Isabelle Attard (Écologiste - Calvados )
Question écrite
Ministère interrogé > Enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Enseignement supérieur et recherche

Rubrique > enseignement supérieur

Tête d'analyse > universités

Analyse > fonctionnement. regroupement.

Question publiée au JO le : 25/03/2014 page : 2756
Réponse publiée au JO le : 03/06/2014 page : 4570
Date de changement d'attribution: 10/04/2014

Texte de la question

Mme Isabelle Attard attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les conditions d'application de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche. Le chapitre VIIIbis du code de l'éducation créé par cette loi prévoit, sans exception, une coordination des établissements d'enseignement supérieur sur un territoire académique ou inter-académique, jamais infra-académique. La coopération peut, au choix des établissements, être organisée selon les modalités suivantes : la fusion (section 2), la fédération (communauté d'universités et établissements, section 3) ou la confédération d'établissements (association, section 4). Elle rappelle que le travail d'amendement du texte par la représentation nationale a permis de faire évoluer profondément le regroupement par association. La loi votée consacre la dimension confédérale du mécanisme de l'association et rétablit l'égalité entre les établissements associés. Les comptes-rendus de séance du 21 juin 2013 au Sénat et du 9 juillet 2013 à l'Assemblée nationale témoignent de la volonté du législateur, volonté appuyée par le soutien de la plupart des groupes parlementaires à ces deux évolutions. Pour ne citer que Mme la ministre, "l'égalité est rétablie entre les établissements dans le cas des regroupements par association, conformément au souhait du groupe écologiste. [...] Toutes les mentions aux « établissements associés » ont été en conséquence reformulées pour que l'association n'apparaisse plus dissymétrique. Je rappelle que nous sommes partis de la notion de « rattachement », pour évoluer vers celle « d'association », laquelle permettait déjà d'atténuer l'idée d'un lien de sujétion ou de subordination, pour finalement supprimer les termes « d'établissement associé »." Elle rappelle que le principe d'autonomie statutaire des universités établi par la loi d'orientation du 12 novembre 1968, dite loi "Edgar Faure", prévaut et garantit que les conseils d'administration des universités sont, seuls, appelés à décider de changements de statuts et de structure interne, ce qui inclut les conventions d'association. La loi ne confère au ministère aucun pouvoir discrétionnaire en la matière. Le Premier ministre détient, lui, la compétence liée de créer Comue et associations par décret, ce qui suppose que seul un projet de regroupement non conforme à la loi puisse ne pas être promulgué. Dans ce contexte, elle s'étonne des courriers envoyés les 28 février 2014 et 6 mars 2014 par le ministère aux présidents d'universités. L'un nie la dimension confédérale de l'association introduite dans la loi et invente des dispositions, l'existence d'un "chef de file" qui représente, organise et pilote les autres établissements, qui ne figurent pas dans la loi. L'autre suggère que le ministère pourrait fixer les statuts des Comue en ignorant le pouvoir délibératif des CA des établissements, jusqu'à l'étape ultime de la validation de ces statuts : les CA des établissements membres des futures Comue, qui n'auraient à aucun moment participé à l'élaboration des statuts de ce nouvel EPSCP, devraient adopter ces statuts en des termes rigoureusement identiques à une version devant faire au préalable « l'objet d'une validation formelle du niveau ministériel ». Imposer au vote des CA des universités et établissements, sans même qu'une modification soit possible, des statuts engageant l'avenir de ces établissements sans qu'ils aient été à l'initiative de ces statuts ni même associés à leur rédaction, consiste à nier les compétences spécifiques et l'autonomie des universités et établissements fixée et garantie par la loi et se trouve en contradiction flagrante avec ses engagements solennels pris devant la représentation nationale. Elle lui demande si le ministère compte persister dans cette lecture peu fidèle de la loi et a envisagé les retards qu'entraîneraient des recours juridiques qui s'appuieraient sur le principe d'autonomie statutaire.

Texte de la réponse

La question de l'honorable parlementaire interroge le lien entre le texte de la loi sur l'enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 et l'interprétation qu'en ferait mes courriers des 28 février et 6 mars 2014, adressés aux présidents d'universités et aux directeurs d'établissements. Selon l'honorable parlementaire, la notion de « chef de file » introduite dans mes courriers pour désigner le coordonnateur du regroupement territorial voulu par le législateur dans l'article 62 de la loi (codifié dans les articles L 718-2 et sq. du code de l'éducation) serait en contradiction avec la possibilité introduite par la loi d'un mode confédéral de regroupement à travers la convention d'association. Si la notion de « chef de file » ne figure pas explicitement dans le texte, on peut toutefois soutenir que son usage s'inscrit parfaitement dans l'esprit de la loi du 22 juillet 2013. Cette dernière, en effet, stipule clairement en son article 62 (section 1 et section 4, codifiées notamment par les articles L 718-2 à L 718-5 et L 718-16) que, quel que soit le mode de coordination territoriale retenue, fusion, regroupement sous forme de communauté ou regroupement par convention d'associations, « la coordination territoriale est organisée par un seul établissement d'enseignement supérieur sur un territoire déterminé ». Cet établissement est, selon le cas, « soit le nouvel établissement issu de la fusion, soit la COMUE [communauté d'universités et d'établissements] lorsqu'il en existe une, soit l'établissement avec lequel les autres établissements ont conclu une convention d'association ». Quant à la dérogation prévue pour les trois académies d'Ile-de-France où « plusieurs établissements peuvent assurer la coordination territoriale », elle doit être entendue simplement comme la possibilité d'avoir plusieurs regroupements dans un territoire d'une telle dimension. La notion de « chef de file » employée dans mes courriers se comprend ainsi aisément comme la désignation d'un « primus inter pares » - notion à laquelle le système éducatif français est attaché de longue date - appelé à jouer le rôle de coordonnateur territorial du projet partagé et de ce fait interlocuteur privilégié de l'Etat pour le fonctionnement du regroupement correspondant. Dans le cas de la convention d'association, comme le dit très explicitement la loi, il est un établissement auquel les autres s'associent autour d'un projet partagé, défini librement en commun, et qu'il a la charge de coordonner et de porter vers l'extérieur, à l'instar des nombreuses confédérations qui organisent notamment le paysage social français. La notion ne saurait donc nourrir le soupçon d'une introduction subreptice d'une autorité institutionnelle non consentie au sein d'un regroupement : elle signifie, au contraire, la garantie que le projet partagé, sur lequel se fonde la convention d'association, soit réellement porté, au sein du regroupement comme vis-à-vis de ses partenaires extérieurs dont l'Etat. Ainsi, les différents textes d'application doivent avoir le souci de veiller à ce que soit respectée la volonté du législateur d'inciter à des regroupements adaptés autant que possible aux situations locales, le texte et l'esprit de la loi reconnaissant le pluralisme des universités. L'important à mes yeux est, en effet, la dynamique engagée, celle dotant notre pays d'une université de son temps, capable de rayonner à l'échelle internationale en toute région et à la hauteur des talents qu'elle accueille. C'est cette ambition qui guide mes décisions. Elle suppose de la souplesse, de l'intelligence des situations bien davantage que des modèles uniformes. Mais elle suppose aussi une volonté partagée par tous les acteurs d'aller de l'avant et de savoir inventer, dans la concertation et le respect mutuel, les nouveaux modes indispensables d'organisation et de fonctionnement au service de deux priorités : - la réussite des étudiants, de la formation à l'insertion professionnelle, - le renforcement de la recherche au niveau territorial, national, européen et international.