14ème législature

Question N° 52993
de M. Patrice Carvalho (Gauche démocrate et républicaine - Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > énergie éolienne

Analyse > implantations d'éoliennes. réglementation.

Question publiée au JO le : 01/04/2014 page : 2906
Réponse publiée au JO le : 27/05/2014 page : 4319
Date de changement d'attribution: 03/04/2014

Texte de la question

M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les évolutions législatives et réglementaires relatives à l'implantation d'éoliennes. Le processus engagé tend à simplifier toujours plus les procédures afin de permettre l'extension du parc éolien. La loi POPE du 13 juillet 2005 avait d'abord créé les zones de développement de l'éolien (ZDE). La loi Grenelle II du 12 juillet 2010 l'avait complétée. Il s'agissait alors de planifier et d'organiser l'exploitation de cette énergie renouvelable, de stopper le foisonnement des projets et leur développement anarchique, en liaison avec les collectivités territoriales. La loi Brottes du 15 avril 2013 a supprimé les ZDE au bénéfice des schémas régionaux (SRCAE + SRE), ce qui donne pouvoir aux préfets de déterminer les communes qui seront concernées par l'implantation d'éoliennes, limite le pouvoir d'intervention des collectivités pour faire valoir leur point de vue et leurs intérêts. En outre, la suppression de la règle des cinq mats ouvre la voie au mitage du territoire. Une nouvelle évolution est intervenue avec des textes réglementaires dérogeant au régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) pour l'éolien industriel. Ainsi l'exploitant se voit délivrer une seule autorisation, qui regroupe permis de construire, autorisation de défrichement et permis d'exploitation. Cette fusion des procédures s'accompagne du raccourcissement des délais d'instruction à un an, ce qui court-circuite la consultation des communes impactées et du public. Est également supprimé le caractère obligatoire de consultation des organismes en charge de la protection de la nature et du paysage (CDNPS), des organismes de santé (CODERST). Le promoteur pourra, en outre, demander que ne soient pas soumises à enquête publique certaines informations sous couvert de secret de fabrication, ce qui lui attribue le pouvoir de faire prévaloir ses intérêts industriels privés sur l'intérêt général et l'information du public. Ajoutons que cette oeuvre dite de « simplification » est conduite par un recours aux ordonnances, ce qui aura dépossédé les parlementaires de leur pouvoir législatif sur d'importants enjeux. Le jeu en vaut-il la chandelle ? Par nature, la production d'énergie éolienne est intermittente puisque liée au vent. Il faudra donc doubler tout kilowatt issu de l'éolien par un kilowatt provenant de centrales thermiques, gaz et charbon, polluantes et émettrices de CO2. Nous risquons de nous retrouver avec des milliers d'éoliennes à faible rendement sur le sol de notre pays, détruisant nos paysages et portant atteinte à la qualité de vie de nos populations, tandis que d'autres énergies bien plus efficaces n'auront pas fait l'objet de la même attention (géothermie, biomasse, méthanisation, photovoltaïque). Il souhaite que, dans le cadre du projet de loi à venir sur la transition énergétique, la mesure soit prise de l'ampleur de ces enjeux et que soient ajustées notre législation et notre réglementation.

Texte de la réponse

La transition énergétique appelle un développement fort des énergies renouvelables. Parmi celles-ci, l'énergie éolienne terrestre est la plus compétitive avec l'énergie hydraulique, et son développement participe à l'atteinte des objectifs du Gouvernement en matière de diversification du mix énergétique par un développement massif des énergies renouvelables tout en contribuant à la réindustrialisation de nos territoires et en maîtrisant l'impact sur la facture des consommateurs d'électricité. La compétitivité de l'éolien terrestre fait que priorité doit être donnée à son développement pour l'atteinte des objectifs européens de production d'énergie renouvelable. Le Gouvernement y est particulièrement attaché. L'impact paysager, l'occupation de l'espace, mais aussi l'impact éventuel sur la faune sont néanmoins des points centraux à considérer pour permettre un développement fort mais raisonné de l'éolien terrestre. Il est indispensable de planifier l'implantation des éoliennes. C'est le rôle du schéma régional éolien (SRE), annexé au schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE), qui identifie à l'échelle régionale des zones favorables à leur développement compte tenu du potentiel éolien d'une part et d'autre part des servitudes, des règles de protection des espaces naturels ainsi que du patrimoine naturel et culturel, des ensembles paysagers, des contraintes techniques et des orientations régionales. Par ailleurs, en raison des risques et des impacts potentiels associés à l'exploitation des éoliennes, l'implantation de tout parc est soumise à un examen approfondi de l'intégration des éoliennes dans leur environnement et de la bonne prise en compte des risques associés à leur exploitation. C'est le rôle de l'autorisation accordée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Au cours de ce processus, les porteurs de projets doivent démontrer, notamment par le biais d'une étude d'impact détaillée, que ces risques et ces impacts sont maîtrisés. Avant décision du préfet, le dossier est par ailleurs soumis à enquête publique. Enfin, le préfet doit accompagner l'arrêté d'autorisation de prescriptions visant à réduire les impacts identifiés. L'inspection des installations classée veille ensuite au strict respect de ces prescriptions ainsi que de la réglementation technique nationale pendant toute la durée d'exploitation de l'installation. La procédure d'autorisation au titre des installations classées pour la protection de l'environnement permet ainsi de disposer d'un cadre plus robuste que le permis de construire pour la prise en compte des risques et des impacts environnementaux. S'il est important que l'ensemble des potentiels impacts positifs ou négatifs des parcs éoliens soient examinés avant autorisation, il est nécessaire que cet examen ne soit pas conduit au travers de procédures redondantes et fragiles. Les mesures de simplification administrative proposées par le Gouvernement et adoptées par le Parlement dans le cadre de la loi n° 2013-312 ne réduisent en rien les exigences de la procédure. Le dispositif des zones de développement de l'éolien a notamment été supprimé. Outil initialement pensé comme relevant de la planification, il a évolué au gré des jurisprudences comme relevant également de l'évaluation environnementale. Ce dispositif a été source d'un important contentieux participant à une insécurité juridique forte des projets. En s'appuyant sur les deux dispositifs postérieurement mis en place que sont le SRE pour la planification et la réglementation ICPE pour l'évaluation des impacts environnementaux, le Gouvernement a ainsi soutenu la suppression des zones de développement éolien (ZDE) afin de faire disparaitre une procédure devenue redondante dans ses objectifs et de sécuriser les projets éoliens sans réduire les exigences en terme de protection de l'environnement et des paysages. De plus, le parlement a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions permettant d'expérimenter une « autorisation unique » sur le territoire de sept régions, pour une période limitée de trois ans. Il convient de souligner que cette autorisation unique, fixée dans le cadre de l'ordonnance n° 2014-355, n'a pas pour but de déroger au régime ICPE, mais permet d'obtenir une seule autorisation pour un même projet en regroupant l'autorisation ICPE, le permis de construire, l'autorisation d'exploiter au titre du code de l'énergie ainsi que l'autorisation de défrichement et la dérogation « espèces protégées », lorsqu'elles sont nécessaires. Cette autorisation unique est délivrée sur la base de la procédure ICPE, aménagée pour intégrer les différentes autres législations. Conformément à l'engagement du Gouvernement, vis-à-vis de sa démarche de sécurisation et de simplification afin de réduire les coûts et les délais administratifs pour les entreprises, cette autorisation unique vise à réduire la complexité des procédures et raccourcir les délais d'instruction administratifs, sans pour autant diminuer le niveau des exigences applicables aux projets. Ainsi, si les délais ont été raccourcis, la procédure de consultation des communes concernées par les risques et inconvénients est maintenue, ainsi que la consultation du public au travers d'une enquête publique, telle que prévue dans le code de l'environnement. Ainsi, ce sont les règles usuelles de l'enquête publique qui restent applicables, et notamment vis-à-vis de la protection des secrets de fabrication qui peuvent ne pas être soumis à enquête publique afin de permettre à nos industriels de conserver leur compétitivité. D'une durée maximale de trois ans cette expérimentation doit permettre de relever les modalités de simplification les plus efficaces avant d'éventuellement envisager une généralisation du dispositif.