14ème législature

Question N° 53119
de M. Patrice Carvalho (Gauche démocrate et républicaine - Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > plans de prévention des risques

Analyse > travaux des riverains. expropriations. prise en charge.

Question publiée au JO le : 01/04/2014 page : 2907
Réponse publiée au JO le : 17/06/2014 page : 5003
Date de changement d'attribution: 03/04/2014

Texte de la question

M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'élaboration des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) et leurs conséquences pour les populations et les collectivités locales concernées. Après la catastrophe d'AZF survenue à Toulouse, le 21 septembre 2001, la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 a prévu l'élaboration de ces PPRT avec le double objectif de réduire au maximum le risque à la source et d'organiser la cohabitation avec les riverains de sites industriels « à hauts risques » (établissements Seveso haut). La démarche est louable mais la mise en œuvre se révèle, à l'expérience, beaucoup plus périlleuse. Sur les 407 PPRT à réaliser, 248 étaient approuvés à la fin de l'année 2013. Beaucoup sont bloqués et font l'objet de recours à l'initiative des particuliers concernés et de leurs associations de défense, qui n'entendent pas légitimement être lésés et spoliés de leurs biens. Le point d'achoppement réside dans les règles de financement des mesures prescrites par les PPRT. Les mesures foncières d'expropriation ou de délaissement dans les zones qui restent soumises à un risque grave pour la vie humaine sont prises en charge dans le cadre de conventions tripartites par les industriels, l'État et les collectivités percevant la contribution économique territoriale. Dans les zones d'aléas moins importants, la loi prévoit que des prescriptions de renforcement du bâti peuvent être décidées. Ces travaux à réaliser sont à la charge du propriétaire. Certes, des aides, sous forme de crédits d'impôt, sont disponibles. Il reste que les familles concernées se voient contraintes de financer des travaux sur leurs propriétés, alors que la valeur de leur bien est dévalorisée en raison de la proximité du site industriel à risques et qu'elles n'ont aucune responsabilité dans cette situation. Les collectivités, quant à elles, se retrouvent sollicitées pour participer au financement des travaux chez les particuliers et aux dispositions foncières, quand leurs budgets leur permettent d'autant moins d'y faire face que la réforme de la taxe professionnelle les a amputées de ressources importantes. Le cas du PPRT en cours d'élaboration à Gournay-sur-Aronde dans l'Oise consécutif à la proximité d'un important stockage de gaz en sous-sol est exemplaire. Le zonage conduit, pour le hameau de Saint-Maur, à l'expropriation ou au délaissement de trois habitations, au délaissement ou à l'obligation de travaux de renforcement de six habitations et au démembrement d'un corps de ferme classé, pour partie, en délaissement, pour une autre partie, en travaux de renforcement. L'estimation réalisée des biens ne permet pas aux propriétaires de se loger ailleurs à l'identique. Les propriétés, qui pourraient être vendues, sont devenues, en réalité, invendables. Les riverains s'accordent pour partir à condition qu'ils soient indemnisés correctement. En l'espèce, la meilleure solution est le rachat du hameau par l'entreprise Storengy, filiale de GDF Suez. Le coût en serait moins élevé que les travaux de réduction du risque à la source qui lui sont exigés en raison de la proximité du hameau de Saint-Maur. Il lui demande ce qu'il compte entreprendre afin que les mesures préconisées par le PPRT excluent toute participation des habitants et des collectivités, qui subissent les risques qui leur sont imposées, qu'ils soient indemnisés en cas d'expropriation ou de délaissement, de sorte qu'ils puissent se reloger à l'équivalent. Enfin, il le prie, pour le PPRT de Gournay-sur-Aronde, d'intervenir afin que Storengy rachète les terrains du hameau de Saint-Maur et indemnise les propriétaires, l'État étant majoritaire dans le capital de l'entreprise.

Texte de la réponse

Le Gouvernement est très attaché à la protection des populations et de l'environnement, à la concertation locale autour des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) et à l'équité des efforts demandés aux différentes parties prenantes. Les PPRT ont pour objectif de résoudre les situations difficiles en matière d'urbanisme héritées du passé et de mieux encadrer l'urbanisation future. Leur élaboration prend en compte, à la fois, les aléas présentés par l'exploitation des installations industrielles en cause et les enjeux des territoires concernés, qu'il s'agisse de l'urbanisation future et de la vulnérabilité de l'existant. Les sites industriels soumis à un PPRT doivent, en premier lieu, respecter l'obligation de réduction des risques à la source. Les mesures correspondantes sont intégralement financées par les industriels et doivent correspondre aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce n'est qu'une fois ces dispositions mises en oeuvre qu'est adopté le PPRT qui peut notamment prescrire des mesures foncières (expropriation ou délaissement). Un PPRT délimite un périmètre d'exposition aux risques en tenant compte de la nature et de l'intensité des risques technologiques décrits dans les études de dangers et des éventuelles mesures complémentaires de réduction des risques. Dans le cas du PPRT de Gournay-sur-Aronde, un projet d'arrêté préfectoral, prescrivant de telles mesures de maîtrise des risques, a été présenté au Conseil de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) de l'Oise le 7 mai 2014. Elles sont entièrement à la charge de l'exploitant. Dans la démarche d'élaboration d'un PPRT, une grande importance est donnée à la concertation, tant dans la phase de diagnostic que dans la phase d'élaboration de la stratégie qui se conclut par l'adoption et la mise en oeuvre du PPRT. La démarche est notamment ponctuée par les réunions des Personnes et organismes associés (POA), définis par l'arrêté de prescriptions, mais aussi par une enquête publique sur le projet de PPRT. Pour ce qui concerne les mesures d'expropriation et de délaissement, la loi prévoit le principe d'un financement tripartite (État, collectivités territoriales, industriels). Une convention qui définit les contributions respectives des parties doit être établie. En l'absence d'accord dans un délai d'un an après l'approbation du PPRT s'appliquera le mécanisme de financement par défaut, qui prévoit une répartition par tiers entre l'État, les collectivités et les exploitants des installations à l'origine du risque. Selon les dispositions de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, les biens susceptibles d'être soumis à expropriation ou au droit de délaissement sont estimés sans tenir compte d'une dépréciation supplémentaire éventuelle liée à la servitude instituée par le PPRT. La mise en oeuvre des procédures d'expropriation et de délaissement qui font suite à l'adoption d'un PPRT est régie par les dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. La procédure d'expropriation, ou de délaissement, permet d'éviter le démembrement d'un corps de ferme classé notamment par le recours, auprès du juge de l'expropriation, à la réquisition d'emprise totale. Pour ce qui concerne le financement des travaux de renforcement prescrits sur le bâti existant, la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 a introduit plusieurs nouvelles dispositions permettant leur prise en charge. Le financement extérieur à celui des propriétaires concernés peut atteindre désormais 90 %. En effet, l'article L. 515-19 du code de l'environnement a été modifié pour créer une participation obligatoire couvrant jusqu'à 50 % du coût des travaux à la charge des exploitants des installations à l'origine du risque et des collectivités percevant tout ou partie de la contribution économique territoriale dans le périmètre couvert par le plan. Cette participation vient en complément du crédit d'impôts de 40 %. L'arrêté préfectoral de prescription du périmètre d'étude du PPRT du stockage souterrain de Gournay-sur-Aronde exploité par Storengy a été pris en date du 19 décembre 2012. Quatre réunions des POA se sont tenues les 8 octobre 2013, 26 novembre 2013, 14 janvier 2014 et 15 avril 2014. Au cours de celles-ci, les éléments précités ont été détaillés aux POA et ces derniers ont pu poser leurs questions et faire état de leurs positions. Les propositions de rédaction des différents projets de documents réglementaires du PPRT y ont été discutées. Les services de l'État seront présents auprès des élus et des habitants du hameau de Saint Maur pour les accompagner dans la phase d'élaboration du PPRT mais aussi après son approbation. Des mesures foncières étant envisagées, il est par ailleurs souhaitable que les démarches de négociation et d'élaboration de la convention de financement précitée soient d'ores et déjà entreprises pour que les mesures foncières puissent être mises en oeuvre rapidement après l'approbation du PPRT. A cet effet, les services de l'État se tiennent également disponibles.