14ème législature

Question N° 53227
de M. Paul Molac (Écologiste - Morbihan )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > déchets, pollution et nuisances

Tête d'analyse > déchets

Analyse > tri mécano-biologique. compost produit. politiques communautaires.

Question publiée au JO le : 08/04/2014 page : 3137
Réponse publiée au JO le : 17/03/2015 page : 1968
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Paul Molac attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conséquences sur l'environnement de la pratique du tri mécano-biologique (TMB). Le TMB s'applique aux ordures ménagères résiduelles et consiste en l'intrication étroite de plusieurs opérations de traitement et de tri mécaniques qui visent à fractionner les déchets et à isoler progressivement certains éléments en tant que matériaux (métaux, plastiques, verre, etc.), déchets fermentescibles ou déchets combustibles à fort pouvoir calorifique. Il peut également consister en des opérations biologiques telles que le compostage ou la méthanisation qui transforment la fraction fermentescible isolée en produits valorisables (compost, biogaz) ou en produits "stabilisés" pouvant être mis en décharge. Ainsi, en fonction des politiques mises en place, le tri mécano-biologique peut éventuellement être envisagé et trouver sa place dans la gestion des déchets comme outil de stabilisation des ordures ménagères résiduelles (OMR) après collecte sélective des biodéchets, des emballages et des déchets dangereux des ménages, notamment pour minimiser l'impact des déchets mis en décharge (neutralisation des émissions de méthane de la matière organique résiduelles et réduction du volume enfoui). En revanche, selon le Centre national d'information indépendante sur les déchets (CNIID), il s'agit d'un leurre de croire qu'il pourrait être considéré comme un moyen efficace et privilégié de produire du compost normé utilisable en agriculture. En effet, d'après l'ADEME, seulement 7 % des composts issus d'ordures ménagères répondraient à la norme sur les amendements organiques (NFU 44051) à respecter depuis le 1er mars 2009. En effet, la matière organique contenue dans les poubelles résiduelles est contaminée par différents polluants. On ne peut donc obtenir un compost de qualité en récupérant la matière organique à partir d'ordures en mélange. Cette matière non normée est ainsi intégrée dans des plans d'épandage ou rejoint un centre de stockage. Les constructeurs d'usines de TMB reconnaissent parfois eux-mêmes qu'ils ne peuvent garantir la conformité à la norme NFU 44051, notamment en ce qui concerne les traces de métaux lourds. C'est ce qui amène le CNIID à ne pas considérer le TMB comme un outil pertinent pour développer la valorisation de la matière. Le traitement des ordures ménagères résiduelles par TMB ne permettra donc pas d'atteindre selon le CNIID l'objectif fixé dans la loi dite Grenelle 1 et, il ne peut donc être considéré comme une alternative à l'incinération ou à l'enfouissement. Dans le cadre des réflexions sur la sortie du statut de déchet, le centre de recherche de la Commission européenne (JRC) a été missionné pour définir la nature des intrants dans les processus de compostage. Le rapport final provisoire, rendu public le 31 juillet 2013 confirme l'idée de limiter les intrants aux seuls biodéchets collectés séparément ; ce qui invaliderait les composts issus de TMB même s'ils répondent aux exigences de la norme NFU 44-051. Si lors des consultations la France s'est opposée à cette vision, Il lui demande toutefois si le Gouvernement compte désormais impulser une véritable politique de collecte séparée des biodéchets, sachant que seuls 3 % de la population française est concernée par cette pratique, et par la même occasion mettre fin à la pratique du TMB dont elle est l'un des derniers pays d'Europe à utiliser la technologie.

Texte de la réponse

Le Gouvernement est très attaché au développement de la méthanisation et du compostage qui est une pratique de valorisation des déchets organiques et un élément de la croissance verte avec ses emplois induits. Actuellement 5 % des collectivités collectent les biodéchets de manière séparée, et les valorisent, essentiellement sous forme de compostage. Certaines collectivités orientent les ordures ménagères vers des centres de tri spécialisés qui permettent de séparer la fraction fermentescible pour la composter ou la méthaniser : il s'agit de « tri mécano-biologique ». La qualité des composts ou digestats issus du tri mécano-biologique est fortement décriée par les associations de protection de l'environnement et des représentants du monde agricole comme porteurs de pollutions chimiques et contenant encore des indésirables (verre, plastique), bien que certaines installations de tri mécano-biologique soient en capacité de produire des composts qui respectent les seuils de polluants ayant été fixés par les normes en vigueur. Les collectivités engagées et les exploitants des installations de tri-mécano biologique considèrent que seul le respect de ces normes devrait prévaloir. Les craintes liées à la valorisation des composts et digestats issus d'installations de tri mécano-biologique, notamment du monde agricole, est telle que la solution de tri à la source est clairement l'option à privilégier pour l'avenir. Elle est aujourd'hui plus coûteuse du fait de coûts de collecte importants, mais les collectivités qui se sont engagées considèrent toutefois qu'elle entraîne une évolution globale des mentalités qui permet d'améliorer le geste de tri du citoyen sur les autres déchets, ce qui permet, à moyen terme, de réaliser des économies plus larges. Le projet de loi voté au Sénat le 3 mars, fixe comme objectif au service public des déchets, de progresser dans le tri à la source des déchets organiques jusqu'à sa généralisation pour tous les producteurs de déchets d'ici à 2025, pour que ceux-ci ne soient plus collectés dans les ordures ménagères résiduelles puis éliminés, mais valorisés. Ce texte marque ainsi une orientation politique forte en matière de mode de valorisation des biodéchets et rend de fait l'utilisation du TMB non pertinente.