14ème législature

Question N° 53714
de M. Alain Gest (Union pour un Mouvement Populaire - Somme )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Tête d'analyse > organisation

Analyse > tribunal d'instance. carte judiciaire. perspectives.

Question publiée au JO le : 15/04/2014 page : 3320
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9920
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Alain Gest attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les juridictions de proximité. La réforme de la carte judiciaire, entreprise en 2008, a débouché avec les décrets du 15 février et du 23 mai 2008 sur la suppression de 21 tribunaux de grande instance, 178 tribunaux d'instance et 55 tribunaux de commerce. Parallèlement ce sont 14 juridictions qui ont été créées. Il s'agissait ainsi de faire évoluer une organisation territoriale qui datait de 1958 et qui n'était plus en adéquation avec les réalités démographiques. Cette réforme devait aussi permettre une justice plus efficace en rationalisant les moyens déployés. Cependant dans certains cas, la suppression des juridictions a été concomitante de la disparition d'autres services publics notamment de santé donnant ainsi le sentiment d'un abandon de ces territoires par l'État. C'est ainsi le cas de la ville de Doullens dans le département de la Somme qui a perdu son tribunal d'instance, sa base aérienne et sa maternité en quelques mois réduisant ainsi significativement l'activité et le dynamisme du secteur. Par ailleurs, l'absence d'une desserte routière de qualité rend les déplacements à Amiens, où se situe le tribunal, plus difficiles. La commission des lois du Sénat a rendu, le 11 juillet 2012, un rapport d'information relatif à l'évaluation de la réforme de la carte judiciaire. À l'issue de ce rapport, ses auteurs ont formulé des propositions parmi lesquelles la possibilité de réimplanter la juridiction supprimée lorsque le défaut de pertinence de sa disparition est avéré. Par ailleurs, durant la campagne de l'élection présidentielle, le parti socialiste et son candidat avaient dénoncé la réforme de la carte judiciaire et préconisé la mise en place d'un bouclier territorial afin de garantir dans les territoires ruraux et péri-urbains défavorisés, l'accès aux services de santé, d'éducation, de sécurité et de justice. Dans ce contexte, il lui demande de lui indiquer si elle prévoit de rétablir le tribunal d'instance de Doullens et à quelle échéance.

Texte de la réponse

Le décret du 30 octobre 2008 a renforcé les inégalités entre les justiciables notamment en accroissant la désertification judiciaire de certaines régions. La garde des sceaux, ministre de la justice, a donc confié le 23 novembre 2012 à Monsieur Serge DAËL, conseiller d'Etat honoraire, Président de la commission d'accès aux documents administratifs, Monsieur Michael JANAS, Président du tribunal de grande instance d'Angoulême, et Madame Marie-Reine BACRY, Consultant expert, CETE du Sud-Ouest, spécialiste de l'immobilier judiciaire, une mission concernant l'implantation judiciaire de huit villes dont le tribunal de grande instance a été supprimé lors de la réforme de la carte judiciaire de 2008 : Belley, Dôle, Guingamp, Marmande, Millau, Saint-Gaudens, Saumur et Tulle. Ces villes ont été choisies à partir des conclusions du rapporteur public au Conseil d'Etat qui, lors de l'examen de la légalité des décrets de suppression des tribunaux de grande instance implantés dans ces communes en février 2010, avait jugé « douteuse » la suppression de ces juridictions. Seule Marmande y a été ajouté en raison du caractère très récent du palais de justice. Suite au rapport remis par cette mission, et également aux travaux des sénateurs Yves Détraigne et Nicole Borvo Cohen-Seat, « La réforme de la carte judiciaire, une occasion manquée », les tribunaux de grande instance de Tulle (Corrèze), (Haute-Garonne) et de Saumur (Maine-et-Loire) ont ouvert en septembre 2014. Aucune autre ouverture ou réouverture de tribunal d'instance ne sera effectuée. En revanche, des chambres détachées ont également été mises en place à Guingamp, Dôle, Marmande, Millau et Saint-Laurent-du-Maroni, renforçant la justice de proximité qui est une priorité fixée par le Président de la République. La chambre détachée de Millau ouvrira quant à elle le 1er janvier 2015. La garde des sceaux est ainsi dans une démarche inverse de celle du précédent gouvernement, en remettant de la justice de proximité, au plus près des besoins. Par ailleurs, la réforme de la carte judiciaire n'a apporté aucune vision de ce que doit être une organisation judiciaire digne du 21e siècle. C'est dans cet objectif qu'a été engagée une réflexion sur l'organisation judiciaire de première instance qui, après le débat national qui a eu lieu les 10 et 11 janvier 2014 à la maison de l'Unesco à Paris, s'est poursuivie par les consultations des juridictions qui ont donné lieu à 2000 contributions. Le 10 septembre dernier, la garde des sceaux a présenté au conseil des ministres la réforme judiciaire « J21 », justice du 21e siècle, découlant de ces différentes concertations. Cette réforme comporte 15 actions pour une justice du quotidien plus proche, plus efficace et plus protectrice et se soucie notamment de la proximité de l'institution et de son accessibilité en facilitant les démarches des citoyens dans toutes les juridictions par l'accueil physique unique, en renforçant l'accès au droit et à la justice et en organisant l'évaluation des besoins de justice au niveau local.