14ème législature

Question N° 54732
de M. Christian Franqueville (Socialiste, républicain et citoyen - Vosges )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > retraites : régimes autonomes et spéciaux

Tête d'analyse > artisans et commerçants : annuités liquidable

Analyse > conjoints collaborateurs.

Question publiée au JO le : 29/04/2014 page : 3472
Réponse publiée au JO le : 11/11/2014 page : 9480
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de signalement: 07/10/2014

Texte de la question

M. Christian Franqueville attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation des femmes de commerçants et d'artisans qui, n'ayant pas opté assez tôt pour un statut de conjoint collaborateur, se trouvent confrontées à des perspectives de départ à la retraite lointaines et, qui plus est, avec l'assurance de toucher de faibles pensions. Pour ces femmes de commerçants et d'artisans qui ont travaillé pendant des années, voire des décennies, aux côtés de leurs maris, et qui sont aujourd'hui hui veuves ou divorcées, les conséquences de cette absence de statut sont lourdes et difficiles à accepter : elles estiment que le manque de publicité et de lisibilité de la législation alors en vigueur leur a porté préjudice en ne les enjoignant pas formellement à adopter un statut de conjoint collaborateur. En effet, pour les conjoints d'artisans et de commerçants, les périodes accomplies avant la création du statut de conjoint collaborateur le 1er avril 1983 sont validées et cotisées en tant que périodes équivalentes - c'est-à-dire prises en compte pour fixer le taux de la pension - par le régime auprès duquel elles ont cotisé (le régime général des salariés le plus souvent). Depuis la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, la législation est plus claire : le conjoint qui participe régulièrement à l'activité de l'entreprise artisanale, commerciale ou libérale, doit obligatoirement choisir un statut et s'affilier à l'assurance vieillesse. Or, entre le 1er avril 1983 et la loi du 2 août 2005, le caractère flottant de la législation laissait une place au doute et des femmes ne se sont pas mises à l'abri en adoptant le statut de conjoint collaborateur. Elles ont le sentiment aujourd'hui de subir de manière rétroactive les répercussions d'une législation alors floue. Ces situations sont symptomatiques des inégalités qui subsistent entre hommes et femmes face à la retraite. Les personnes qui participent à l'activité professionnelle de leur conjoint sont effectivement très majoritairement des femmes : 8 conjoints collaborateurs sur 10 sont des femmes chez les artisans, 9 sur 10 chez les commerçants et les professions libérales Certes, la réforme des retraites initiée par la Gouvernement répond à une partie de ces préoccupations en permettant aux quelques 100 000 conjoints collaborateurs des artisans, des commerçants et des agriculteurs d'adhérer à l'assurance volontaire vieillesse pour compléter leurs droits à la retraite. Jusqu'à présent, en cas de divorce, de décès ou de départ en retraite du chef d'entreprise, le conjoint n'était plus couvert. Néanmoins, le problème des années de travail non validées et cotisées du fait de l'absence de statut demeure, ce qui place des femmes de commerçants divorcées ou veuves dans des conditions financières préoccupantes. Par conséquent, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement pour permettre à ces femmes de valider et de cotiser ces périodes d'activité dans le calcul de leurs droits à retraite afin de remédier à ces situations iniques.

Texte de la réponse

Les droits à pension sont normalement acquis en contrepartie de cotisations prélevées sur le revenu d'activité et leur montant est largement fonction de l'effort contributif de l'assuré. Jusqu'au 1er janvier 2004, les commerçants étaient réputés être aidés dans l'exercice de leur activité par leur conjoint et s'acquittaient, à ce titre, d'une cotisation additionnelle. Toutefois, les cotisations versées par l'assuré ne lui permettaient de bénéficier d'une majoration de sa retraite de base que sous certaines conditions, dont notamment celle d'être marié pendant au moins deux ans avec le conjoint coexistant à la date d'effet du droit personnel et d'être à jour des cotisations dues. Il est exact que cette majoration disparaît à l'occasion soit du divorce soit du décès du titulaire, puisqu'elle est indissociable de la pension de base du chef d'entreprise. C'est pour mettre fin à cette situation insatisfaisante qui voyait les conjoints des chefs d'entreprise n'acquérir que des droits limités, malgré une contribution déterminante et régulière au fonctionnement de l'entreprise, que les pouvoirs publics ont décidé de donner un véritable statut social aux conjoints collaborateurs dans le cadre de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. En effet, le conjoint du chef d'entreprise qui y exerce de manière régulière une activité professionnelle doit opter pour le statut de conjoint collaborateur, conjoint salarié ou conjoint associé. Cette mesure permet dorénavant à de nombreux conjoints, essentiellement des femmes, d'être reconnus pour l'activité qu'ils ou elles exercent aux côtés de leur conjoint et d'en tirer, notamment, des droits personnels à retraite. Il est également possible aux conjoints collaborateurs de racheter des périodes d'activité dans l'entreprise familiale au titre desquelles ils n'ont pas versé de cotisations. En effet, l'article L. 633-11 du code de la sécurité sociale dispose que le conjoint collaborateur peut demander la prise en compte de périodes d'activité, sous réserve de justifier par tous moyens d'avoir participé directement et effectivement à l'activité de l'entreprise et d'acquitter des cotisations garantissant la neutralité actuarielle. Jusqu'à six années sont susceptibles d'être rachetées à ce titre, alors que le rachat d'années d'études ou d'années incomplètes est limité à trois ans. Le rachat est autorisé jusqu'au 31 décembre 2020. Les modalités d'application ont été précisées par le décret n° 2012-1034 du 7 septembre 2012 relatif à l'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales et aux régimes d'assurance vieillesse de base des conjoints collaborateurs des professions libérales et des avocats. Enfin, l'article 32 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites améliore les droits à pension des conjoints collaborateurs, en leur ouvrant la possibilité de cotiser à l'assurance volontaire vieillesse. Il s'agit de protéger les droits à pension des conjoints collaborateurs en cas de divorce, de décès ou de départ à la retraite du chef d'entreprise ou du professionnel libéral. Réservée aujourd'hui aux seuls chefs d'entreprise cessant toute activité professionnelle avant d'atteindre l'âge de la retraite, l'assurance volontaire vieillesse permettra aux conjoints collaborateurs d'améliorer le niveau de leur pension ou de partir plus tôt à taux plein. Les conjoints collaborateurs, qui sont environ 100 000 au total, sont dans leur immense majorité des femmes. Cette mesure favorable participe donc au renforcement des droits à pension des femmes, en particulier lorsqu'elles sont en fin de carrière et éprouvent plus de difficultés à se réinsérer dans l'emploi. Un décret, dont la publication interviendra prochainement, précisera les modalités de mise en oeuvre de cette assurance volontaire et notamment le délai dans lequel la demande d'adhésion devra être formulée.