14ème législature

Question N° 55014
de M. Sylvain Berrios (Union pour un Mouvement Populaire - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Famille, personnes âgées et autonomie
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > famille

Tête d'analyse > divorce

Analyse > situation des pères. disparités de traitement. conséquences.

Question publiée au JO le : 06/05/2014 page : 3656
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9900
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 09/09/2014

Texte de la question

M. Sylvain Berrios attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, sur la prochaine inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale de la proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant. En effet, depuis l'adoption de la loi du 4 mars 2002 ouvrant droit à la résidence alternée, on n'observe aucune avancée dans ce domaine. À l'heure ou la parité et l'égalité sont partout mises en avant entre les hommes et les femmes, le droit de l'enfant à bénéficier aussi bien de son papa et de sa maman est le plus souvent ignoré par les juges qui n'accordent presque jamais la résidence alternée à un père qui la souhaite si la mère n'y consent pas, mais strictement toujours dès que la mère y consent. Cette rigidité entraîne des douleurs inextricables pour tous, enfants, parents et grands-parents. Avec le recul, on peut mesurer aujourd'hui les conséquences non négligeables pour les enfants élevés en majeure partie par l'un des parents seulement. L'absence durable de l'un des parents est un handicap significatif pour l'enfant dans sa construction personnelle. Il ne s'agit pas de jouer l'un des parents contre l'autre mais de jouer collectif. Nos enfants ne sont pas nos enfants, ils nous sont confiés pour leur plus grand épanouissement. Encore une fois, la nouvelle proposition Le Roux va dans le bon sens mais, en n'indiquant pas clairement l'égalité des droits d'hébergement entre les deux parents, elle ouvre la porte à une nouvelle discrimination. Il convient donc de préciser dans le texte le principe d'égalité, en temps, de la garde des enfants, laissant exceptionnellement au juge la possibilité de l'aménager dans des cas dirimants qui peuvent relever de considérations géographiques, matérielles ou morales imputables au demandeur de cette égalité. Dans cette perspective, afin de mettre fin à ces souffrance inutiles, aujourd'hui reconnues par le plus grand nombre, il lui demande de de bien vouloir lui préciser l'état de sa réflexion à ce sujet.

Texte de la réponse

Afin de disposer d'une analyse précise sur la résidence des enfants dont les parents sont séparés, la Chancellerie a initié, au cours du mois de juin 2012, une étude portant sur l'ensemble des décisions rendues par tous les juges aux affaires familiales sur une période de quinze jours. Cette étude, effectuée à partir de 6042 décisions et publiée au mois de novembre 2013, laisse apparaître que, dans 80 % des situations, les parents sont en accord sur la résidence des enfants, dans 10 % ils sont en désaccord et dans 10 % des cas, l'un des deux parents ne forme aucune demande. S'agissant des parents qui sont d'accord sur la résidence, ils demandent pour 71 % des enfants, une résidence chez la mère, pour 10 % une résidence chez le père et pour 19 % une résidence alternée. Parmi les 10 % de situations où les parents sont en désaccord, les juges fixent pour 63,1 % des enfants une résidence chez la mère, pour 24,4 % une résidence chez le père, pour 12,3 % une résidence alternée et pour 0,2 % une résidence chez un tiers. Compte tenu du nombre très important des parents en accord, dans l'ensemble des parents ayant fait une demande relative à la résidence, les décisions prononcées par les juges reflètent très largement le choix établi en commun par ces parents. Ainsi, la résidence chez la mère est plus fréquemment prononcée par le juge, ce mode de résidence étant le plus sollicité par les parents séparés. S'agissant plus particulièrement de la résidence alternée, l'étude laisse apparaître, toutes décisions confondues, que les juges ont prononcé une résidence alternée pour 17 % des situations. Pour les seules procédures de divorce, l'exploitation du répertoire général civil montre que la part d'enfants mineurs pour lesquels une résidence alternée a été prononcée est passée de 11,5 % en 2004 à 22,8 % en 2013. La proportion d'enfant pour lesquels une résidence alternée est prononcée est plus importante dans les procédures de divorce en raison du nombre important de divorces par consentement mutuel dans lesquels la résidence alternée est plus fréquemment choisie par les parents. Lorsque les parents sont en désaccord, l'étude précitée montre que la résidence alternée est prononcée pour 12 % des enfants. Le taux de rejet de la résidence alternée est de 75 % lorsque le père la demande et la mère la refuse et de 60 % lorsque la mère la demande et le père la refuse. Le taux de rejet de la résidence alternée est donc relativement important en cas de désaccord entre les parents, quelle que soit l'origine de la demande. Il ressort ainsi de l'étude précitée que le principal frein au développement de la résidence alternée provient du choix des parents qui la demandent peu. S'inspirant de certaines pistes proposées par le groupe de travail sur la coparentalité mis en place par la garde des sceaux et la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille sous le précédent gouvernement, la proposition de loi n° 1856 relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant, adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 27 juin 2014, modifie les règles relatives à la fixation de la résidence de l'enfant en prévoyant qu'elle est fixée au domicile des deux parents selon les modalités déterminées d'un commun accord par les parents ou à défaut par le juge. Sans imposer de résidence alternée paritaire, il est proposé que l'enfant bénéficie d'un double rattachement au domicile de chacun des parents. Le rythme et la durée des séjours de l'enfant chez chaque parent resteront déterminés par ces derniers ou, en cas de désaccord, par le juge, conformément à son intérêt. La rédaction proposée permet, sans imposer de règle prédéterminée, de valoriser la place des deux parents notamment en supprimant le terme de « droits de visite et d'hébergement » qui est souvent mal vécu par le parent qui en bénéficie.