14ème législature

Question N° 55779
de M. Patrice Martin-Lalande (Union pour un Mouvement Populaire - Loir-et-Cher )
Question écrite
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > tourisme et loisirs

Analyse > développement. Cour des comptes. rapport. préconisations.

Question publiée au JO le : 20/05/2014 page : 4001
Réponse publiée au JO le : 29/07/2014 page : 6536

Texte de la question

M. Patrice Martin-Lalande interroge Mme la ministre des outre-mer sur les mesures que le Gouvernement a engagées ou va engager pour aider l'outre-mer à redynamiser efficacement son activité touristique. Dans son rapport public annuel 2014 paru en février, la Cour des comptes constate que « le tourisme en outre-mer est en crise depuis le début des années 2000, alors même qu'il représente une chance pour les économies insulaires d'outre-mer, confrontées à un chômage élevé (entre 20 % et 30 % selon les territoires) ». Les sages de la rue Cambon posent le diagnostic suivant : « un manque de dynamisme des autorités locales » et « des actions publiques inefficaces », concernant notamment la promotion de la destination, l'accès aux îles françaises et l'offre hôtelière. Plus précisément, « les régions et la Polynésie Française peinent à agir sur les trois facteurs qui font le succès d'une politique touristique : [...] La promotion de la destination : elle est à la fois trop privilégiée et mal orientée. Elle reste dépendante de la clientèle française, et illustre un manque de professionnalisme. De nouvelles initiatives comme « les îles Vanille » à La Réunion ou les contrats de destination aux Antilles restent encore handicapées par des fragilités opérationnelles ; [...] L'accès aux îles françaises : il est rendu plus difficile par des exigences spécifiques de visa qui n'existent pas dans les îles voisines concurrentes. Peu de lignes aériennes régulières assurent une liaison d'une ville européenne autre que Paris. L'obligation, avec la plupart des compagnies, de changer d'aéroport est un autre inconvénient. Les prix des billets calculés selon la méthode du yield management (en fonction du taux de remplissage) peuvent atteindre un niveau dissuasif ; [...] L'offre hôtelière : en baisse ces dernières années, elle ne pourra être suffisante pour faire face à une augmentation substantielle des flux touristiques et corrélativement du trafic aérien. Sa qualité ne correspond pas toujours à la demande. Les aides existantes n'entraînent pas les résultats espérés. Globalement, les dispositifs d'aide sont peu lisibles et les mesures de défiscalisation n'atteignent pas leur but ». Les professionnels régionaux soulignent aussi la grande difficulté de devenir compétitif avec un coût du travail jusqu'à dix fois supérieur à celui des destinations concurrentes voisines et avec un différentiel de 40 % entre l'euro et le dollar. Les professionnels régionaux du tourisme mettent en avant deux mesures d'assouplissement des règles en vigueur qui pourraient être de nature à redynamiser l'activité touristique en outre-mer : d'une part, l'assouplissement de la politique des visas voire l'intégration des territoires ultra-marins français à l'espace Schengen dans des conditions adaptées aux spécificités ultra-marines ; d'autre part, l'assouplissement de la réglementation européenne afin d'autoriser le soutien financier des compagnies pour l'installation de nouvelles liaisons aériennes, comme cela est réalisé pour nombre de destinations concurrentes. Il demande quelles sont les mesures que le Gouvernement a engagées ou prévoit d'engager, avec quels objectifs et suivant quel calendrier, pour aider l'outre-mer à redynamiser efficacement son activité touristique.

Texte de la réponse

Même si le tourisme est une compétence largement décentralisée aux Régions, l'État apporte un soutien discontinu aux destinations d'outre-mer ces dernières années avec des actions menées tant au niveau de l'offre que de la demande. L'amélioration de la compétitivité de l'offre touristique a été priorisée avec la mise en place de dispositifs pour l'ensemble des DOM pour faire baisser les coûts de fonctionnement (salaires et impôts) et pour favoriser la construction et la rénovation de structures hôtelières. Le tourisme a ainsi été identifié comme un secteur prioritaire et bénéficie dans ce cadre des zones franches d'activité (abattement de 100 % sur la contribution économique territoriale et de 80 % sur l'impôt sur les sociétés et sur les taxes foncières, exonérations renforcées de charges sociales). Les exonérations de charges patronales de sécurité sociale constituent également une mesure essentielle en faveur des entreprises touristiques d'outre-mer au regard du coût budgétaire et du nombre de salariés concernés (respectivement 1,1 milliards d'euros en 2013 et 300 000 salariés pour l'ensemble des secteurs d'activité). Par ailleurs, la mise en oeuvre, dans le cadre du Pacte de Responsabilité, d'un crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) renforcé outre-mer à 9 % va procurer chaque année dès 2015 un allègement supplémentaire de la masse salariale des entreprises des DOM, dont bénéficiera pleinement le secteur du tourisme. Le mécanisme de soutien fiscal à l'investissement a été maintenu et enrichi de nouveaux outils de financement et la TVA non perçue récupérable, qui bénéficie au secteur de l'hôtellerie, a été intégralement préservée en 2014. Enfin, le travail d'appui et d'accompagnement des destinations, initié par le ministère des outre-mer dans le cadre de son partenariat en matière d'ingénierie avec Atout France, a été poursuivi en 2012 et en 2013 avec le financement de treize accompagnements techniques au profit de projets touristiques pour l'ensemble des destinations ultramarines pour un coût total de 360 000 euros à la charge du ministère des outre-mer. Des actions ont également été entreprises pour diversifier la demande avec le financement par le ministère des outre-mer chaque année depuis 2003 de campagnes de promotion touristiques déployées par Atout France sur les marchés européens, ainsi que d'actions marketing à destination du grand public, des professionnels du voyage et de la presse pour un montant total de 8 millions d'euros. Dans le cadre de son plan d'actions définies pour la période 2014-2015 en faveur du tourisme, le ministère des outre-mer prévoit la réalisation d'ici à 2015 d'expertises techniques sur des thématiques identifiées comme de véritables freins au développement touristique outre-mer : - en matière de restructuration du secteur hôtelier, une analyse du modèle économique de l'hôtellerie pour chaque territoire d'outre-mer, ainsi qu'audit économique et financier des entreprises hôtelières des Antilles vont être réalisés dans le cadre d'un conventionnement avec Atout France afin de permettre la mise en place de relations financières et sociales stabilisées dans la durée ; - afin d'atténuer la saisonnalité touristique outre-mer, il est également prévu qu'une expertise juridique et opérationnelle soit réalisée, en partenariat avec le ministère du travail, de l'emploi et du dialogue social, afin de mobiliser toutes les ressources prévues par la législation pour que les unités d'oeuvre disponibles puissent accompagner les différentes variations de la charge de travail définies dans la convention collective de l'hôtellerie-restauration (annualisation du temps de travail, contrat saisonnier, extras), ainsi que pour les départs anticipés à la retraite ; - un plan de formation professionnelle régionalisé au profit des personnels hôteliers qui sont au contact de la clientèle touristiques sera également défini pour chaque DOM dans un objectif d'amélioration de la qualité de service ; - afin de diversifier les clientèles touristiques outre-mer, Atout France procèdera à une analyse de la demande des marchés à potentiel les moins touchés par la crise économique ; - enfin, l'observation touristique doit être améliorée, un état des lieux détaillé des méthodes utilisées outre-mer en matière de production de données statistiques du tourisme sera réalisé, accompagné de propositions permettant la mise en place d'indicateurs identiques et homogènes par rapport aux données hexagonales, ainsi que des comparaisons avec les destinations concurrentes. Par ailleurs, la circulation des étrangers est facilitée depuis 2009 pour permettre notamment l'entrée dans les collectivités d'outre-mer sans formalité supplémentaire de certains ressortissants soumis à visa « Schengen ». Ces dispositifs ont été complétés suite aux Assises Nationales du Tourisme avec de nouvelles mesures de dispense de visa accordées notamment aux ressortissants et indiens souhaitant se rendre à la Réunion, ainsi qu'aux ressortissants brésiliens voyageant en Guyane par le biais d'agences agréées. Concernant enfin le secteur du transport aérien, la concurrence entre les transporteurs réguliers sur chaque destination se traduit non seulement par une politique tarifaire calculée au plus juste pour assurer leur maintien sur la liaison, mais aussi par une diversification de l'offre profitable au consommateur (liaison métropole-DOM de la compagnie à bas coût XL Airways depuis décembre 2012). L'ouverture de lignes nouvelles par les compagnies peut contraindre, dans certaines conditions, les différents acteurs en présence à reconsidérer leur politique tarifaire. Toutefois, comme l'a montré le retrait de la compagnie Air Caraïbes de certaines liaisons intérieures à l'espace Antilles-Guyane afin de retrouver des résultats économiques satisfaisants, la rentabilité de ces dessertes n'est pas aisée à assurer. Les nouvelles lignes directrices sur les aides publiques en faveur des aéroports et des compagnies aériennes adoptées le 20 février 2014 maintiennent les aides au démarrage de nouvelles liaisons aériennes au départ des aéroports comptant jusqu'à trois millions de passagers. A l'instar des lignes directrices adoptées en 2005, ces aides sont limitées dans la durée (trois années) afin de faciliter le lancement des lignes nécessaires au développement de la connectivité régionale sans introduire de distorsion de concurrence faussant le jeu du marché, ni risquer de créer des surcapacités aux conséquences négatives tant sur les compagnies que sur les usagers eux-mêmes. Dans un souci d'efficience, les nouvelles lignes directrices veulent s'assurer les meilleures conditions de réussite des services aidés. C'est pourquoi, afin d'atteindre une pleine efficacité, l'intensité des aides a été rehaussée de 30 à 50 % des coûts éligibles, et un plan d'affaires doit être produit, qui garantit la viabilité de la nouvelle liaison à l'issue de la période subventionnée.