14ème législature

Question N° 56246
de M. Patrick Hetzel (Union pour un Mouvement Populaire - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > produits dangereux

Tête d'analyse > contrôle

Analyse > huile de neem. interdiction. pertinence.

Question publiée au JO le : 27/05/2014 page : 4161
Réponse publiée au JO le : 08/07/2014 page : 5845

Texte de la question

M. Patrick Hetzel attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur la nécessité d'autoriser l'utilisation de l'huile de neem en délivrant des autorisations de mise sur le marché (AMM) ou alors de la faire interdire sur l'ensemble de l'Union européenne. En effet, cette huile est nécessaire au bon contrôle d'un grand nombre de ravageurs attaquant les cultures maraîchères et les vergers conduits en agriculture biologique. À titre d'information, il est à noter que l'huile végétale obtenue à partir des graines du margousier, appelée huile de neem, est utilisée depuis des siècles dans le monde entier. Même si le principal principe actif de l'huile de neem, l'azadirachtine, a parfois été suspecté comme étant un perturbateur endocrinien, les travaux de recherche à ce sujet n'ont semble-t-il pas permis d'établir une telle causalité de façon certaine. Il semblerait que dès lors que certaines précautions seraient prises en matière d'usage, ce risque de perturbation endocrinienne serait extrêmement faible. Raison pour laquelle, l'azadirachtine a été inscrite en 2011 à l'annexe I du règlement n° 1107-2009 permettant aux États membres de l'Union européenne d'autoriser les préparations d'huile de neem. C'est le cas dans 15 pays européens dont l'Allemagne, l'Italie ou encore l'Espagne. La France, elle, l'interdit toujours sans que l'on sache précisément pourquoi. Une chose est toutefois certaine pour nos agriculteurs français de la filière biologique : cette situation crée des distorsions de concurrence. Inscrite au cahier des charges de l'agriculture biologique, les producteurs et leurs organisations attendent cette autorisation depuis longtemps et avec impatience puisqu'elle est indispensable pour la conduite des cultures maraîchères et des vergers biologiques. Sur la base d'une analyse bénéfices-risques, l'huile de neem qui contient de l'azadirachtine, pourrait donc aisément être utilisée de manière sécurisée moyennant des précautions d'utilisation. Nous sommes donc bien à une croisée des chemins. Ou bien la France considère que la réglementation européenne est adaptée, auquel cas il lui demande de quelle manière il compte autoriser l'utilisation de l'huile de neem en agriculture et accorder les autorisations de mise sur le marché des solutions qui contiennent de l'azadirachtine. Ou alors, la France dispose d'éléments qui prouveraient un degré de risque significatif lié à l'usage de l'huile de neem auquel cas il conviendrait de tout mettre en oeuvre pour faire interdire très rapidement son usage au niveau de l'Union européenne à la fois pour une question de santé publique et de suppression de la distorsion de concurrence entre les agriculteurs biologiques français et leurs homologues des autres pays européens. Il attend qu'il lui indique quelle sera la position du Gouvernement français en la matière et quelle que soit l'orientation retenue, sur quelles données scientifiques objectives il s'appuie pour prendre sa décision.

Texte de la réponse

L'azadirachtine, substance issue des graines de margousier, est une substance active inscrite au titre du règlement (CE) 1107/2009 relatif à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. L'article 28 de ce règlement, repris et précisé dans le code rural et de la pêche maritime (CRPM), prévoit que ces produits ne peuvent être mis sur le marché et utilisés que s'ils font l'objet d'une autorisation nationale. Cette autorisation ne peut être délivrée que si l'absence de risque est garantie par l'évaluation faite d'un dossier déposé auprès de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) en France. Selon les dispositions du règlement susmentionné et précisées dans le CRPM, une telle demande peut être effectuée sur la base d'un dossier spécifique soumis en France ou sur la base d'une évaluation et d'une autorisation existant déjà dans un autre État membre de l'Union européenne, autrement appelée « reconnaissance mutuelle ». Au titre de cette dernière procédure, en l'absence de manifestation d'intérêt pour un produit phytopharmaceutique donné par les opérateurs économiques, l'article 40(2) dudit règlement prévoit que « les organismes professionnels [...] agricoles ou les organisations agricoles professionnelles » peuvent introduire une demande de reconnaissance mutuelle à leur propre nom au titre de l'intérêt général. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, confirme qu'à ce jour, aucune demande d'autorisation pour un produit à base d'azadirachtine n'a été déposée à l'Anses. En l'absence de demande et d'avis subséquent de l'Anses, le ministre chargé de l'agriculture ne peut pas autoriser un tel produit, même si l'origine de la substance active est naturelle. Il convient donc de préciser que l'azadirachtine n'est pas interdite de façon spécifique sur le territoire français. Compte tenu de l'importance de cette molécule pour la filière biologique, les services du ministère chargé de l'agriculture appuient les professionnels concernés pour qu'une demande officielle d'autorisation pour des produits à base d'azadirachtine soit rapidement déposée à l'Anses. Les délais d'évaluation et de prise de décision sont limités à 12 mois par le CRPM, éventuellement portés à 18 mois en cas d'éléments complémentaires nécessaires pour conduire l'évaluation des risques à son terme. Enfin, face aux difficultés des producteurs en agriculture biologique, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, a délivré, le 2 juin 2014, une autorisation dérogatoire pour le produit NEEMAZAL-T/S, à base d'azadirachtine, pour 120 jours sur pommiers.