14ème législature

Question N° 56342
de M. Jean-Louis Christ (Union pour un Mouvement Populaire - Haut-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > santé

Tête d'analyse > protection

Analyse > pratiques addictives. lutte et prévention. milieu scolaire.

Question publiée au JO le : 27/05/2014 page : 4194
Réponse publiée au JO le : 25/11/2014 page : 9870
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 09/09/2014

Texte de la question

M. Jean-Louis Christ appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le développement inquiétant des trafics de stupéfiants aux abords et à l'intérieur des établissements scolaires. Les réseaux se structurent en effet dans les collèges et dans les lycées pour toucher une population vulnérable : selon les chiffres publiés en 2013 par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, reprenant les résultats d'une enquête réalisée en milieu scolaire par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Escapad, Espad), l'expérimentation du cannabis chez les jeunes de 15 ans et plus est en hausse (41,5 % de jeunes concernés), de même que la consommation régulière (6,5 %). L'usage des autres produits stupéfiants de type champignons hallucinogènes, poppers et produits à inhaler demeure également en progression dans cette tranche d'âge. Face aux enjeux de santé publique, de sécurité publique et d'intégration sociale qui dépendent de ce phénomène, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour faire reculer significativement les trafics de stupéfiants en milieu scolaire.

Texte de la réponse

Les études scientifiques récentes font effectivement apparaître une stabilisation à un haut niveau de l'usage du cannabis, produit stupéfiant le plus consommé en France, principalement par une population jeune et masculine, avec une entrée en consommation précoce entre 15 et 16 ans [1]. Plus globalement, les données de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) mettent en avant une hausse de la consommation de drogues, notamment parmi les catégories d'âge les plus jeunes. La situation est d'autant plus préoccupante que certaines des drogues sont aujourd'hui peu onéreuses, d'un accès facile (cannabiculture personnelle...), voire sont des substances psychoactives légales. Il s'agit notamment du poppers qui, après avoir été interdit [2], est en vente libre à la suite d'un arrêt du 3 juin 2013 du Conseil d'Etat. Il en va de même pour les nouveaux produits de synthèse, en vente sur internet quasi-exclusivement, et dont les molécules chimiques inédites ne font de ce fait pas l'objet d'une interdiction légale avant leur identification puis leur classement. Par conséquent, les forces de sécurité ne peuvent légalement agir ni sur le trafic, ni sur l'usage de ces derniers produits. La lutte contre la consommation de stupéfiants, chez les jeunes en particulier, exige donc une mobilisation de l'ensemble des acteurs publics et privés concernés, aussi bien en matière de prévention et de prise en charge que de répression, notamment dans le cadre du plan gouvernemental de lutte contres les drogues et les conduites addictives 2013-2017. Dans ce domaine, des politiques partenariales sont engagées de longue date entre les services du ministère de l'intérieur et de l'éducation nationale, en particulier dans le cadre du protocole d'accord relatif à l'amélioration de la sécurité des établissements scolaires signé le 4 octobre 2004 par les ministres de l'intérieur et de l'éducation nationale (dit « protocole de Dreux »). Ce dispositif partenarial se fonde en particulier sur les « correspondants sécurité-école » (policiers ou gendarmes-référents) qui ont été désignés, au sein de chaque structure de police ou de gendarmerie, pour être des interlocuteurs clairement identifiés par leurs partenaires de l'éducation nationale. L'objectif est de faciliter les signalements aux forces de l'ordre, des réponses rapides et coordonnées face à tout acte délinquant, dont l'usage ou le trafic de stupéfiant. Ces correspondants, qui travaillent en concertation avec les chefs d'établissement, organisent en particulier des actions d'information éducatives sur la lutte contre toutes les formes de délinquance. Sur le plan de la prévention, en complément de la politique du ministère de l'éducation nationale en matière de prévention des conduites addictives, menée par exemple dans le cadre des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté, diverses mesures sont mises en oeuvre par le ministère de l'intérieur. Les forces de police et de gendarmerie réalisent, en partenariat avec la communauté éducative, des actions de sensibilisation en milieu scolaire sur les dangers des stupéfiants et la prévention des conduites addictives. En 2013, près de 500 000 personnes ont ainsi pu bénéficier d'une intervention dispensée par des policiers formateurs anti-drogue (PFAD) ou des formateurs relais anti-drogue de la gendarmerie (FRAD). Plus de 400 000 ont d'ores et déjà été sensibilisées au premier semestre 2014. Par ailleurs, en application de circulaires interministérielles Intérieur/Education des 24 mars et 23 septembre 2009, des diagnostics de sécurité sont réalisés dans l'ensemble des établissements scolaires, par les « référents sûreté » de la police ou de la gendarmerie spécialement formés. La question de la lutte contre les usages et trafics de stupéfiants y est systématiquement abordée. 3 188 établissements scolaires ont pu bénéficier d'un diagnostic établi par des policiers de la direction centrale de la sécurité publique, 2 158 par des militaires de la gendarmerie nationale, et 659 ont été réalisés dans la zone de compétence de la préfecture de police de Paris. Ces établissements font l'objet de visites complémentaires dans les années qui suivent afin d'assurer le suivi de la mise en oeuvre des préconisations du diagnostic et le cas échéant de l'adapter. Il y a lieu de noter que les formations initiale et continue des policiers et gendarmes intervenant en milieu scolaire, en voie de complète mutualisation depuis 2013, intègrent, au-delà des rappels du cadre juridique et des dangers sanitaires, le développement des compétences psychosociales des élèves, l'objectif étant de donner aux adolescents les moyens de faire des choix éclairés et responsables. Les forces de l'ordre organisent par ailleurs des opérations de sécurisation, de surveillance ou de contrôle aux abords des établissements scolaires ainsi que dans les secteurs, parfois plus distants, identifiés localement comme « sensibles », par exemple car étant habituellement fréquentés par les jeunes usagers et leurs revendeurs (moyens de transport collectif...). Ainsi, 22 000 opérations de sécurisation ont été réalisées au cours de l'année scolaire 2013-2014 par la seule direction centrale de la sécurité publique en collaboration étroite avec les services de l'éducation nationale. L'investissement des forces de sécurité peut notamment se lire dans le fait que 86 % de ces opérations ont été menées d'initiative, 14 % l'ayant été à la demande des chefs d'établissement. Sur le plan de la répression, si les réseaux de trafics et d'importation ou de production de produits stupéfiants ne se structurent pas dans les lycées ou collèges, ces derniers sont en revanche concernés par les phénomènes de consommation ainsi que par le développement de réseaux locaux d'usagers-revendeurs. Ainsi, police et gendarmerie s'engagent systématiquement dans la répression des comportements délinquants au sein même des établissements scolaires, lorsqu'ils sont requis par le chef d'établissement ou d'initiative dans le cadre d'une enquête judiciaire sous la direction du procureur de la République. [1] Voir « Enquête ESPAD 2011 », dont les principaux résultats sont accessibles via le site de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies. [2] Arrêté du 29 juin 2011 portant application d'une partie de la réglementation des stupéfiants aux produits contenant des nitrites d'alkyle aliphatiques, cycliques et hétérocycliques et leurs isomères.