légitime défense
Question de :
M. Jacques Bompard
Vaucluse (4e circonscription) - Non inscrit
M. Jacques Bompard attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'affaire du légionnaire qui, agressé gare du Nord par un dealer armé d'un couteau, a retourné son arme contre celui-ci et est désormais poursuivi pour homicide involontaire. Certes il n'est pas question de défendre ceux qui se feraient justice eux-mêmes, mais quand les forces de l'ordre sont absentes la loi reconnaît non seulement la nécessité de se défendre mais mieux condamne le citoyen qui assistant à une agression ne porte pas défense à l'agressé. Or, aujourd'hui, la non-assistance à personne en danger devient la règle. Cette agression du 2 mai 2014 et ces suites sont une illustration précise qui contribuent à expliquer, sans l'excuser, l'inaction des témoins lors de l'agression sexuelle dans le métro de Lille condamnée par la justice. Il lui demande s'il ne serait pas plus utile que la justice protège davantage ceux qui ont le courage de s'opposer aux agressions, tout particulièrement lorsqu'elles se font à l'aide d'armes par destination ou par utilisation.
Réponse publiée le 23 septembre 2014
La loi favorise et protège toute tentative d'un tiers de porter secours à une personne agressée. L'incitation législative est illustrée par l'existence du délit de non-assistance à personne en danger ou omission de porter secours prévue par l'article 223-6 du code pénal qui sanctionne d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75000 euros quiconque qui, sans risque pour lui ou pour les tiers, s'abstiendrait volontairement d'empêcher un délit contre l'intégrité corporelle d'une personne. La protection de tout individu qui, mu par le civisme, tenterait d'empêcher une agression dont il serait témoin, est en outre assurée par le régime de la légitime défense. Cette cause d'irresponsabilité pénale assure en effet l''impunité de celui qui, pour repousser une agression actuelle et injuste le menaçant ou menaçant autrui, est amené à commettre une infraction lésant l'auteur du péril. Comme pour toutes les causes d'irresponsabilité pénale, il incombe en principe à la personne poursuivie de démontrer qu'elle a agi en état de légitime défense. Le ministère public qui a pour tâche de démontrer, le cas échéant, l'existence des éléments matériels et intellectuels indispensables à la caractérisation de toute infraction devra, dans pareille hypothèse, répondre à l'argumentation de la défense qui arguerait de la légitime défense pour justifier le comportement poursuivi. Ce n'est que de manière exceptionnelle et pour épouser des situations qui correspondent a priori à des atteintes injustifiées dont il est légitime de se défendre que le législateur a édicté une présomption de légitime défense à l'article 122-6 du code pénal. Ne cédant que face à la preuve contraire, celle-ci vise deux hypothèses spécifiques : pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité et pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence. Cette présomption se justifie aisément par le fait que les circonstances mêmes des faits notamment le lieu où ils sont commis (domicile de la personne arguant de la légitime défense) sont de nature à limiter grandement toute contestation éventuelle sur la réalité de la légitime défense. Ce raisonnement ne saurait cependant prévaloir pour les autres types d'agressions lesquels demeurent soumis au régime général prévu à l'article 122-5 du code pénal. Cette distinction légalement définie fut le fruit de débats doctrinaux et d'une longue évolution jurisprudentielle finalement consacrée par le code pénal en 1994.
Auteur : M. Jacques Bompard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 3 juin 2014
Réponse publiée le 23 septembre 2014