14ème législature

Question N° 57078
de Mme Isabelle Attard (Écologiste - Calvados )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > ministères et secrétariats d'État

Tête d'analyse > équipements

Analyse > parc informatique. logiciels libres. statistiques.

Question publiée au JO le : 10/06/2014 page : 4660
Réponse publiée au JO le : 27/09/2016 page : 8863
Date de changement d'attribution: 28/01/2016
Date de renouvellement: 07/10/2014
Date de renouvellement: 27/01/2015
Date de renouvellement: 01/09/2015
Date de renouvellement: 22/12/2015
Date de renouvellement: 05/04/2016
Date de renouvellement: 02/08/2016

Texte de la question

Mme Isabelle Attard attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application de la circulaire n° 5608 du 19 septembre 2012 du Premier ministre, définissant les orientations pour l'usage des logiciels libres dans l'administration. La circulaire incitait les ministres à l'utilisation des logiciels libres dans leurs services. Elle souhaite savoir quelles suites ont été données à cette circulaire, notamment les études d'opportunités de migration de logiciels, l'intégration de ce critère dans les appels d'offres, les projets de migration de logiciels propriétaires vers des logiciels libres ou encore la mise à disposition des sources de logiciels développés en interne ou par un prestataire, au sein du ministère et de l'intégralité des administrations qui en dépendent. Elle souhaite de plus connaître le montant des dépenses en logiciel, en distinguant les logiciels propriétaires des libres, au sein du ministère et des administrations qui en dépendent, pour chaque année de 2008 à 2013.

Texte de la réponse

La circulaire no 5608 du 19 septembre 2012 relative à l'usage du logiciel libre dans l'administration s'inscrit dans le contexte plus large de la mise en œuvre, à l'échelle interministérielle, d'un cadre stratégique commun qui fixe une ambition de transformation du système d'information de l'État au service de la modernisation de l'action publique. Dans ce contexte, l'État privilégie pour sa politique logicielle une approche globale, progressive et non dogmatique, visant à mettre l'administration en situation de choisir à tout moment entre les différentes solutions, libres, d'éditeurs ou mixtes, en fonction des critères de performance, de coût et d'efficacité. La circulaire n'a ainsi pas pour objet à proprement parler d'inciter les ministères à accroître l'usage des logiciels libres par rapport aux logiciels propriétaires de manière indépendante du contexte, mais à systématiquement considérer le logiciel libre à égalité avec les autres solutions, afin de répondre au mieux aux besoins des métiers. La mise en œuvre de ces orientations est engagée sous l'animation et la coordination de la direction interministérielle du numérique et des systèmes d'information et de communication (DINSIC). En l'occurrence, s'agissant du ministère de la justice, la circulaire du Premier ministre est venue totalement conforter les axes stratégiques retenus par ses services informatiques depuis une dizaine d'années : en effet, dès la version de 2003 de son cadre de cohérence technique (CCT), le ministère de la justice avait déjà mis en place une stratégie dite de « double source », visant à identifier aussi systématiquement que possible une alternative libre de référence pour chaque brique logicielle de base jusque là couverte par un logiciel propriétaire, dans le triple but à la fois de sécuriser l'approvisionnement, de faciliter la remise en concurrence dans le cadre de la tierce maintenance applicative, et de maximiser l'efficacité de la dépense publique. En pratique, une version à jour du CCT est systématiquement jointe au dossier de consultation des entreprises publié lors de chaque appel d'offres informatique conduit par la Chancellerie. Sans que la non-conformité au CCT soit éliminatoire, tout candidat qui propose dans son offre l'emploi d'un logiciel libre ou propriétaire divergeant par rapport à cette stratégie, a l'obligation d'expliciter les raisons de ce choix et de le justifier. Sur cette base est ensuite effectuée une évaluation dans le cadre de la note technique attribuée aux offres. Dans ces conditions, le libre, même hors CCT, est une possibilité systématiquement ouverte aux candidats dans le cadre des consultations, charge à ces derniers d'en démontrer la pertinence technico-économique. Rétrospectivement, force est de constater que cette mécanique incitative et pragmatique a globalement porté ses fruits, puisque la quasi-totalité des grands projets portés depuis dix ans par le ministère, tels que par exemple Cassiopée pour la refonte de la chaîne pénale (2008), Messager pour la gestion du courrier de la Chancellerie (2012), Genesis pour la refonte de la chaîne pénitentiaire (2013) ou encore le portail « justice.fr » ouvert en mai 2016, se sont appuyés essentiellement (quoi que rarement exclusivement) sur des composants libres éprouvés. En matière de développements réutilisables en interne ou par des tiers, le ministère a notamment fait réaliser en 2010 un système d'éditique, sous la forme d'un outil autonome libre s'appuyant sur le format normalisé OpenDocument. Ce composant, originellement développé pour les besoins de Cassiopée, a dès le début été conçu pour être réemployé dans tous les nouveaux projets et l'a systématiquement été depuis. Accessoirement, cela a favorisé le déploiement sur les postes de travail des utilisateurs d'une suite bureautique libre nativement basée sur ce format, désormais intégrée à tous les nouveaux ordinateurs installés. S'agissant de la migration de composants propriétaires vers un équivalent libre, le ministère a notamment pu porter sous PostGreSQL les systèmes de gestion de bases de données propriétaire utilisé par les conseils de prud'hommes. Enfin, s'agissant de la question portant sur le volet budgétaire 2008-2014, il est important de souligner que la valorisation des dépenses logicielles se heurte à d'importants obstacles méthodologiques et pratiques. En effet, la comptabilité analytique en vigueur dans l'administration ne permet pas de typer simplement les dépenses logicielles selon qu'il s'agit de propriétaire ou de libre. Aucune restitution par les outils comptables ne permet donc d'obtenir la ventilation demandée. La structure et l'organisation du marché du logiciel ne permettent pas davantage de réaliser une évaluation globale des coûts via un simple suivi des dépenses par fournisseur : en effet, la distribution des logiciels fait intervenir différents prestataires et intermédiaires, et certains éditeurs sont aussi fabricants de matériel et prestataires de service. De plus, il convient aussi de souligner que la plupart des grands projets applicatifs comprennent à la fois des composants libres et propriétaires dans leur architecture technique, dont les dépenses afférentes, notamment en matière d'intégration et de support, sont souvent incluses dans le coût général forfaitaire du projet sans qu'il soit simple (ni même parfois seulement possible) de les individualiser dans le bordereau de prix. Pour autant, malgré ces difficultés qui empêchent de donner une réponse exacte qui prenne en considération l'exhaustivité des dépenses du segment logiciel, le ministère est en capacité de fournir une estimation de ses principales dépenses logicielles (au sens strict) sur la période considérée sur le programme 310 « conduite et pilotage de la politique de la justice », géré par le secrétariat général, qui est celui sur lequel s'impute la grande majorité des coûts informatiques du ministère. Ces dépenses s'évaluent en l'occurrence dans un intervalle de 4 à 7 millions d'euros par an entre 2008 et 2013 s'agissant des logiciels propriétaires, et dans un intervalle de 0,3 à 1 million d'euros par an s'agissant des logiciels libres. Les variations existant d'une année à l'autre sont essentiellement dues au fait que la structure de certains contrats prévoit un paiement en une seule fois, couvrant plusieurs années de fonctionnement. S'agissant des autres programmes, gérés par les directions « métier » du ministère, la part des dépenses logicielles qui sont clairement identifiées comme telles, représentent sur la période considérée un montant total compris entre 2 et 3 millions d'euros par an. Sans qu'il soit possible de donner précisément la répartition de cette somme entre logiciel libre et logiciel propriétaire, il est toutefois certain que la part propriétaire est prépondérante.