Rubrique > politiques communautaires
Tête d'analyse > commerce extracommunautaire
Analyse > accord transatlantique. contenu.
M. Bruno Nestor Azerot attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la défense des intérêts nationaux en termes de protection des producteurs comme des consommateurs français dans le cadre des négociations concernant la création d'un traité de libre-échange entre l'Union européenne et les États-unis, ainsi que sur ses conditions de négociations. Le projet est d'une envergure telle qu'il reviendrait à créer un marché commun de 820 millions de consommateurs. Dans ce contexte, il convient d'alerter sur les conditions d'opacité, voire le caractère anti-démocratique d'un tel accord. En effet, seules des fuites dans la presse permettent de rendre compte du contenu des négociations, menées d'ailleurs par la Commission européenne qui est un organe non élu. La suppression des tarifs douaniers, l'harmonisation progressive des réglementations de part et d'autres de l'Atlantique ou encore la mise en place d'un mécanisme de règlement des différends entre les entreprises et les États prévu par ce traité ne doivent pas remettre en cause la souveraineté des États en favorisant les entreprises. En outre, ces accords ne doivent pas constituer une menace pour les producteurs (par la suppression des droits de douane) et pour les consommateurs (par l'affaiblissement des normes sanitaires nationales et communautaires). Plusieurs secteurs pourraient être bouleversés par ces accords, en tout premier lieu l'agriculture, qui joue un rôle majeur dans nos économies d'outre-mer, ou encore les secteurs des transports ou l'industrie. Il souhaite attirer plus particulièrement l'attention du Gouvernement sur la défense des productions agricoles ultramarines, moteur de nos économies et donc important pourvoyeur d'emploi, dont l'avenir pourrait être plus que jamais incertain en mettant en concurrence des productions ne répondant pas aux mêmes normes salariales, sociales, sanitaires et environnementales. En effet, outre-mer, ce traité s'inscrit dans la continuité des mesures libérales mises en place par les accords de libre-échange entre l'Union européenne et plusieurs états d'Amérique du sud et d'Amérique centrale dont la Colombie, le Pérou ou encore le Costa-Rica. Une telle libéralisation faisait craindre l'importation massives de productions agricoles sud-américaines, et notamment de bananes, au détriment des productions issues des régions ultrapériphériques qui représentent pourtant près de 12 % des ventes au sein de l'Union européenne. Pour reprendre les termes de Mme Annick Girardin, aujourd'hui membre du Gouvernement, ces accords risquaient « de porter un coup fatal aux filières sucres, banane, rhum des Antilles et de la Guyane ». La quasi-disparition de la filière horticole domienne au profit des productions sud-américaines ne peuvent qu'attester du bien-fondé des craintes exprimées alors par cette dernière. Le traité de libre-échange avec les États-unis aujourd'hui en débat pourrait donc constituer un nouveau coup dur pour les productions agricoles outre-mer. Le commerce alimentaire doit constituer un point central des négociations car porteurs de grandes difficultés, du fait des importantes divergences de normes phytosanitaires, de normes OGM ou encore de standards sociaux. Ainsi, outre la banane, le rhum bénéficie actuellement d'une protection douanière importante pour les rhums traditionnels importés. Cet avantage devra être préservé. De même, la filière sucre risque d'être soumise à la concurrence du sucre américain, majoritairement issu de betteraves OGM, et plus largement à l'importation de produits provenant d'États tels que le Mexique, signataires de l'accord de libre-échange nord-américain dit ALENA. Enfin, les autorités américaines ont fait part de leur intention de remettre en cause les obstacles relevant des domaines technique, sanitaire, phytosanitaire afin notamment que les Européens laissent entrer sur leur marché des produits d'origine bovine en provenance des États-unis. Or une telle remise en cause des normes européennes induirait une mise en concurrence des produits importés des États-unis, respectant des conditions moindres avec les productions locales, notamment antillaises et guyanaises du fait de la proximité géographique de ces territoires. « La plus grande des injustices est de traiter également des choses qui sont inégales ». Ces mots d'Aristote s'appliquent plus que jamais à la situation de l'outre-mer au travers de ce traité. En conséquence, il l'interroge donc sur les démarches que celui-ci compte adopter pour faire face à l'opacité de ce traité et protéger les intérêts des producteurs et des consommateurs français, et particulièrement ceux des agriculteurs ultramarins.