14ème législature

Question N° 57261
de M. André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > agriculture

Tête d'analyse > apiculture

Analyse > abeilles résistantes aux pesticides. conséquences. biodiversité.

Question publiée au JO le : 17/06/2014 page : 4795
Réponse publiée au JO le : 05/08/2014 page : 6674

Texte de la question

M. André Chassaigne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur le projet d'une multinationale de sélectionner ou de modifier génétiquement les abeilles afin de leur faire acquérir ou d'accroître leur résistance aux pesticides. Ce projet, présenté par un leader international de traitement phytosanitaire et de vente d'organismes génétiquement modifiés, suscite de grandes inquiétudes chez les apiculteurs. En effet, il pourrait réduire la biodiversité, bousculer les équilibres naturels entre les pollinisateurs et présenter des dérives économiques et sociales majeures, surtout si ces abeilles ainsi modifiées étaient certifiées et brevetées, à l'instar de ce qui a été constaté pour les plantes OGM. De plus, la « mise au point » d'abeilles résistantes aux pesticides par ceux qui les commercialisent, pourraient, comme pour certains OGM, entraîner une surconsommation de pesticides et une pollution environnementale supplémentaire. Dans ces conditions, et dans l'attente d'en savoir davantage sur ce projet, les apiculteurs demandent la suppression de toute subvention publique de recherche sur tout projet de modification ou de brevetage des abeilles génétiquement modifiées. Il lui demande des informations sur les recherches publiques éventuellement entreprises en matière de sélection génétique des abeilles et son avis sur la pertinence de telles recherches au regard des difficultés récurrentes de l'apiculture.

Texte de la réponse

Les différentes populations d'abeilles (sous-espèces, races géographiques, colonies...) ne présentent pas la même sensibilité aux pesticides. Une sélection sur la résistance à un ou plusieurs pesticides est donc théoriquement possible. Toutefois, il convient de souligner que ce type de sélection, qui viserait à maintenir une espèce dans un environnement dégradé, est totalement opposé aux orientations déclinées dans le plan de développement durable de l'apiculture et aux objectifs des organismes de recherche et des instituts techniques français. La recherche publique programmée en France sur la génétique apicole s'inscrit dans les objectifs du plan de développement durable de l'apiculture, lancé par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt le 8 février 2013, et notamment de son axe 5 visant à l'émergence d'une filière française compétitive d'élevage de reines et d'essaims afin de favoriser le développement des cheptels. Ses orientations ont été co-construites avec les représentants de la filière. Les recherches programmées visent à connaître et caractériser les populations d'abeilles existantes en France, aussi bien du point de vue de leur patrimoine génétique que de leur production. Ces travaux permettront, d'une part, de mieux connaître et protéger les populations d'abeilles locales, et, d'autre part, de sélectionner des races et populations adaptées à leur contexte d'utilisation : besoins des différents acteurs de la filière apicole et variété des environnements (climats, agro-systèmes). La sélection envisagée est « classique » et du même type que celle utilisée pour les autres animaux de rente (sélection et multiplication des individus les mieux adaptés à une production et à un milieu donné). Cette sélection génétique, qui peut éventuellement utiliser l'analyse moléculaire du génome, ne manipule pas le vivant : elle permet de mesurer ou de prédire une performance et par là même de sélectionner des reproducteurs. Elle ne peut donc en aucun cas être assimilée à du génie génétique (ou transgenèse). Les chercheurs s'impliquant dans le développement de nouveaux outils pour la sélection apicole française ont donc pour objectif d'apporter des solutions innovantes aux apiculteurs français en termes de méthodes de gestion de la diversité génétique et de sélection (qui peuvent aussi limiter les risques sanitaires liés aux importations). La mise en oeuvre de ces outils dépendra toujours de la volonté des apiculteurs, seuls maîtres d'oeuvres de la sélection.