14ème législature

Question N° 57578
de M. François Loncle (Socialiste, républicain et citoyen - Eure )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires étrangères
Ministère attributaire > Affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Tête d'analyse > Nigeria

Analyse > sécurité des populations. attitude de la France.

Question publiée au JO le : 17/06/2014 page : 4780
Réponse publiée au JO le : 15/07/2014 page : 6000

Texte de la question

M. François Loncle interroge M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur les progrès réalisés dans la lutte contre le groupe terroriste Boko Haram. Fondée au Nigéria en 2002, Boko Haram prône un islam rigoriste, vise à imposer la charia et à instaurer un État islamique. Dans ce but, ce mouvement extrémiste déchaîne une violence effrénée, multipliant les incendies, les pillages, les massacres, les attentats, les enlèvements. Mêlant fanatisme aveugle et grand banditisme, il attaque notamment les écoles, les banques, les églises, les gares, les bases militaires, les postes de police, les hôtels, les marchés... Il ne limite plus les raids à son sanctuaire du nord-est, mais opère aussi dans la capitale, sur le littoral pétrolier et au Cameroun limitrophe, au point d'ébranler gravement l'État nigérian et de déstabiliser toute la région. Boko Haram constitue une réelle menace, d'autant que le nombre de ses recrues ne cesse d'augmenter, surtout parmi la jeunesse désoeuvrée. Depuis un an, l'organisation fondamentaliste a plongé le pays dans une spirale sanglante, massacrant 44 personnes à Konduga, 85 à Kawuri, 106 à Izghe, 336 à Gamboru ngala et plusieurs centaines de villageois sont exécutés, le 3 juin 2014, dans l'État de Borno. Considérant que « l'éducation occidentale est un péché » - traduction en langue haoussa de Boko Haram -, elle cible particulièrement les établissements scolaires, notamment ceux fréquentés par les jeunes filles, détruisant les bâtiments, tuant les élèves et les enseignants. Elle acquiert une sinistre notoriété, en procédant, le 14 avril 2014, à Chibok, au rapt de 223 lycéennes, condamnées à être réduites en esclavage ou mariées de force à des djihadistes. Soulevant une vague d'indignation générale, cet enlèvement massif entraîne une mobilisation internationale à laquelle la France prend une part significative, dans la mesure où plusieurs de nos ressortissants avaient été capturés en 2012-2013 par Boko Haram. Notre pays a d'abord dépêché sur place une « équipe spécialisée » dans le renseignement et la lutte antiterroriste. Le Président de la République a ensuite convoqué, le 17 mai 2014, un sommet à l'Élysée réunissant les chefs d'État nigérian, tchadien, camerounais, nigérien et béninois. Un plan de lutte régionale a été adopté, prévoyant notamment un mécanisme d'échange d'informations et un dispositif de surveillance renforcée des frontières. Il lui demande de lui fournir des précisions sur l'avancement de ce plan de coordination. Il voudrait connaître les résultats de la réunion de suivi qui se serait tenue à Londres. Il aimerait savoir si les recherches entreprises ont permis de localiser les lycéennes enlevées et d'avoir des informations sur leur sort. Il souhaite enfin qu'il lui précise les solutions envisagées pour que les atrocités et les crimes commis par les terroristes de Boko Haram ne restent pas impunis.

Texte de la réponse

L'enlèvement de 279 lycéennes nigérianes par des membres de Boko Haram est survenu le 14 avril 2014 au coeur du fief de la secte terroriste, dans l'Etat de Borno (ville de Chibok). 53 lycéennes se sont enfuies, 226 seraient encore prisonnières. Depuis un an, l'Etat de Borno est le théâtre de violents combats opposant les forces armées nigérianes et le groupe terroriste. La population civile en paye le prix. Abubakar Shekau, le leader de la secte, a revendiqué l'enlèvement des jeunes filles le 5 mai et menacé de vendre ces dernières et de les marier de force. L'incertitude demeure quant à la localisation des captives. La France contribue à l'effort international pour le sauvetage des lycéennes, en déployant au Nigéria, depuis le 9 mai, une équipe spécialisée qui travaille en lien étroit avec les autorités nigérianes. Par ailleurs, le Président de la République a organisé le 17 mai dernier, à la demande du président de la république fédérale du Nigéria, un sommet des Chefs d'Etats de la région sur la sécurité au Nigéria. La France a ainsi marqué son engagement aux côtés du Nigéria dans sa lutte contre le terrorisme, dans le respect des droits de l'Homme, et a contribué à susciter une réponse régionale et internationale forte. Tous les voisins du Nigéria (Tchad, Bénin, Niger et Cameroun) étaient représentés par leur chefs d'Etat, et les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union européenne ont été associés. Le plan d'action né de ce sommet renforce la coopération entre le Nigéria et les pays frontaliers ; des actions spécifiques seront également entreprises en faveur du développement des zones concernées, avec un accent sur l'égalité homme-femme, les droits des femmes et des filles, et notamment leur droit à l'éducation et le soutien aux victimes des violences sexuelles. Une réunion de suivi de ce plan d'action, au niveau ministériel, s'est déroulée à Londres le 12 juin. Mme Annick Girardin, secrétaire d'Etat au développement et à la Francophonie, représentait la France. Cette réunion a permis de poursuivre la mobilisation en vue d'une meilleure coordination opérationnelle, entre les pays de la région, dans le cadre de la Commission du bassin du lac Tchad. Cette mobilisation a donné de premiers résultats : les organisations Boko Haram et Ansaru ont été placées sous sanctions des Nations unies ; les Etats de la région ont renforcé leur coopération opérationnelle, tant en matière de renseignement (création d'une cellule de fusion du renseignement) que de sécurisation des frontières (coordination des patrouilles et projet de force multinationale dans le cadre de la Commission du Bassin du Lac Tchad). La France appuie l'ensemble des pays concernés.