14ème législature

Question N° 58174
de Mme Bérengère Poletti (Union pour un Mouvement Populaire - Ardennes )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi et dialogue social
Ministère attributaire > Travail, emploi et dialogue social

Rubrique > retraites : généralités

Tête d'analyse > réforme

Analyse > compte pénibilité. modalités. réglementation.

Question publiée au JO le : 24/06/2014 page : 5143
Réponse publiée au JO le : 26/08/2014 page : 7246

Texte de la question

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur la mise en place du dispositif du "compte pénibilité" au sein des entreprises dans le cadre de la loi portant sur la réforme des retraites. La loi prévoit qu'à compter du 1er janvier 2015, chaque salarié exposé à un facteur de risque (liste définie) permettant de caractériser la pénibilité devra bénéficier d'un "compte pénibilité". Ce dernier, établi à partir de fiches à remplir, permettra de cumuler des points en fonction du nombre de facteurs de risques auxquels le salarié est exposé et de la durée d'exposition. Le compte permettra ainsi au salarié de prendre sa retraite plus tôt ou de bénéficier d'un temps partiel pour sa fin de carrière. La santé et la sécurité des salariés est un enjeu majeur. Pour autant, les salariés du secteur privé expriment leur inquiétude face à l'instauration d'un tel dispositif. Ils font part de la difficulté et la complexité à appliquer concrètement le procédé. Il sera difficile de savoir et évaluer pour chaque salarié dans chaque entreprise si le salarié durant la réalisation d'une tâche a été dérangé par une source de bruit, de chaleur, par une posture pénible ou autre... et durant quelle durée précise. Tout cela relève d'un véritable casse-tête ! Tout ceci risque d'avoir des conséquences négatives au sein des entreprises : une nouvelle augmentation du coût du travail, un climat social tendu et la dévalorisation de certains métiers car présentés comme pénibles, avec le risque de voir ces emplois désertés alors que le taux de chômage de notre pays est en hausse constante ! Par ailleurs, le dispositif sera a priori financé par des sur-cotisations patronales qui pourraient atteindre des sommes colossales et être évaluées à 500 millions d'euros les premières années et représenter jusqu'à 2,5 milliards d'euros en 2040. C'est pourquoi elle souhaite connaître la position du Gouvernement sur le sujet et sur les conséquences que pourrait avoir la mise en place du dispositif au sein des entreprises, et quelles réponses il compte apporter aux inquiétudes auxquelles sont confrontés les salariés.

Texte de la réponse

Afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites, le gouvernement s'est engagé, et c'est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail. Elle passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente, à cet égard, une avancée sociale essentielle. Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, la priorité du gouvernement a été de privilégier des solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits. La concertation conduite par Michel de Virville s'est efforcée de trouver les modalités de mise en oeuvre les plus simples, les moins coûteuses et les plus sûres. Beaucoup de propositions ont été prises en compte : annualisation des seuils, déclaration unique en fin d'année, dématérialisation et simplification de la fiche de pénibilité, calendrier très progressif de montée en charge des cotisations. Cette réforme est importante et engage sur le long terme. Elle crée un droit, non pas pour quelques années, mais pour des générations entières de salariés. Elle mérite, pour assurer sa réussite, un temps d'appropriation pour les entreprises par une montée en charge progressive du dispositif. C'est la raison pour laquelle, l'année 2015 sera une année de « rodage » du dispositif sur une partie des facteurs de pénibilité identifiés (4 sur 10, les plus simples à identifier), avant sa généralisation en 2016, car il ne peut être question de remettre en cause l'objectif. Comme l'a réaffirmé le Président de la République lors du discours d'ouverture de la troisième Grande Conférence Sociale : « traiter de la pénibilité, là encore, a été un progrès [...]. Cette pénibilité aura maintenant toute sa place dans la législation française ». La loi s'appliquera donc bien à partir du 1er janvier 2015 et sera pleinement opérationnelle et effective dès 2016. Cela laisse une année pour permettre aux entreprises d'assurer une pleine application dans la durée du compte pénibilité et ainsi garantir la réussite de cette réforme.