Moyen-Orient
Question de :
M. Jacques Bompard
Vaucluse (4e circonscription) - Non inscrit
M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la situation des Chrétiens d'Irak. Depuis le lundi 9 juin, la ville de Mossoul est aux mains des djihadistes de l'État islamique d'Irak et du Levant (EIIL). Les chrétiens, qui se comptaient au nombre de 30 000 sur une population totale de deux millions d'habitants, ne représentent plus qu'une cinquantaine de familles, affirme Monseigneur Georges Casmoussa, ancien archevêque syriaque catholique de Mossoul qui avait été enlevé par un groupe islamiste en 2005. Le reste des familles ayant fui à l'annonce de la chute de la ville en direction des villes encore sécurisées (Qaraqosh, Erbil ou encore Duhok, au Kurdistan). Quelques familles ont trouvé refuge dans le couvent de Mar Matta qui accueille pour la troisième fois des chrétiens persécutés. Aujourd'hui, à Mossoul il n'y a plus aucun prêtre. Les chrétiens sont progressivement exclus des postes clefs de l'administration publique, et sont systématiquement subordonnés par un responsable musulman. Des lois auraient été votées pour établir des quartiers exclusivement musulmans et distribuer aux occupants des terrains appartenant aux chrétiens afin de précipiter leur exode. Selon le site Alsumaria News de la Haute Commission pour les droits de l'Homme en Irak, et confirmé vendredi 20 juin par le site Assist News Service, les chrétiens de Mossoul restés sur place devraient désormais payer la djizîa, c'est-à-dire l'impôt à l'occupant musulman. Faute de payer la djizîa - dont le montant minimum est de 250 US$ [soit 183,80 euros] par mois - les chrétiens sont passibles de la mort et la saisie de leurs biens. Les chrétiens redoutent également l'instauration de codes vestimentaires imposés aux femmes, comme ce fut le cas à Raqqa en Syrie, du fait de la Commission de la Charia, l'aile juridique de l'EIIL qui veille à l'application d'une interprétation stricte du code islamique. Les chrétiens de la ville irakienne de Bartala toute proche de Mossoul sont à la merci de l'occupant armé. La police ayant fui la ville à l'approche des insurgés, les habitants ne peuvent plus compter que sur quelque 600 habitants chrétiens et les Peshmergas, les forces kurdes, pour les protéger. Des barricades ont été dressées autour des églises de la ville. Les insurgés sunnites ont lancé la semaine dernière une vaste offensive dans le pays. Rappelons que les chrétiens d'Irak représentent aujourd'hui 2 % de l'ensemble de la population irakienne, contre 20 % en 1932 et 5 % à la veille de l'invasion américaine en 2003. Leur position minoritaire les rend d'autant plus vulnérables face aux forces islamiques insurgées. Il lui demande si des décisions vont être prises en matière de politiques étrangères et comment.
Réponse publiée le 14 octobre 2014
La France défend partout dans le monde la liberté de religion ou de conviction. Elle intervient auprès des Etats concernés, dans le cadre de sa politique de défense des droits de l'Homme, afin qu'ils assurent la protection du libre exercice des cultes par leurs citoyens et éliminent toute forme de discrimination fondée sur la religion ou la conviction. La politique de la France vis-à-vis des chrétiens au Proche et au Moyen-Orient s'inscrit dans cette politique à portée universelle. Elle inclut notamment le respect des droits des personnes appartenant aux minorités religieuses et prend en compte les liens spécifiques hérités de l'Histoire qu'elle entretient avec les communautés chrétiennes d'Orient, notamment au Liban, en Irak, en Egypte, en Turquie, en Syrie, en Jordanie ou en Israël et en Palestine. La situation en Irak est d'une extrême gravité et d'une ampleur inédite. La France soutient l'Etat irakien dans sa lutte contre le terrorisme, tout en rappelant aux autorités leurs obligations s'agissant du respect du droit international humanitaire et du droit des réfugiés. La France a affrété quatre vols humanitaires et 77 tonnes d'aide à destination du Kurdistan irakien dès le mois d'août, représentant une valeur de 1,3 M€, et poursuit son action humanitaire en Irak. Elle a par ailleurs débloqué, sur les sept premiers mois de l'année 2014, 1,2 M€ d'aide humanitaire au profit des déplacés internes présents dans les gouvernorats de Dohuk et de Ninive ainsi que des réfugiés syriens. Les projets retenus sont actuellement mis en oeuvre par des ONG françaises ainsi que par le Programme alimentaire mondial. Ce sont donc au total près de 2,5M€ qui ont été mobilisés. La priorité de la France est de créer les conditions du maintien des minorités dans leur pays. C'est là que se trouve leur avenir. Néanmoins, devant la gravité de la situation, la France a décidé de favoriser l'accueil de réfugiés irakiens. Les consulats à Erbil et Bagdad ainsi que l'OFPRA et l'OFII sont mobilisés dans le cadre des procédures accélérées pour favoriser l'accueil de ces réfugiés irakiens. Au niveau des Nations unies, la France s'est mobilisée pour accélérer l'adoption de la résolution 2170 le 15 août dernier, sous chapitre VII de la Charte. Cette résolution prévoit tout un dispositif pour lutter contre Daech (EIIL) notamment pour assécher les financements, sanctionner les personnes et éviter l'extension de la menace. Cette première initiative de la France a mobilisé la communauté internationale et renforcé l'efficacité de la lutte contre l'« État islamique », qui a montré toute son horreur au cours des dernières semaines - notamment avec l'exécution des deux journalistes américain et du travailleur humanitaire britannique. Le ministre des affaires étrangères et du développement international s'est rendu à Bagdad et à Erbil le 10 août dernier et le Président de la République le 12 septembre pour manifester le soutien et la solidarité de la France à l'Irak. C'est dans le but de mobiliser la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme de Daech en Irak, de protéger les populations civiles et de rétablir l'Etat de droit sur l'ensemble du territoire irakien que la France a organisé la conférence internationale de Paris sur la paix et la sécurité en Irak du 15 septembre.
Auteur : M. Jacques Bompard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 1er juillet 2014
Réponse publiée le 14 octobre 2014